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Affaire Valls/Gabon : résurgence des réactions sur l’irrégularité de l’élection d’Ali Bongo

Affaire Valls/Gabon : résurgence des réactions sur l’irrégularité de l’élection d’Ali Bongo
Affaire Valls/Gabon : résurgence des réactions sur l’irrégularité de l’élection d’Ali Bongo © 2016 D.R./Info241

L’émission « Le Petit Journal » présentée par Yann Barthès, chaque jour à 20h10 sur Canal Plus+ a rajouté lundi soir, du grain à moudre, suite aux propos de Manuel Valls qui a affirmé qu’Ali Bongo n’avait pas été élu « pas comme on l’entend » dans l’émission ’’On n’est pas couché" sur France 2. En rediffusant, une émission de Mediapart où en 2012, le candidat François Hollande jetait également un discrédit patent sur l’élection du président gabonais en 2009. Quid des réactions sur l’authenticité du scrutin présidentiel.

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L’émission "Le Petit Journal" qui a fait de son originalité un traitement de l’actualité par un ton décalé couplé d’une analyse journalistique sarcastique et corrosive maniés avec maestria par son présentateur vedette Yann Barthès a tourné en raillerie, la réaction des autorités politiques gabonaises. Qui pour selon Marianne au sujet « d’un secret de Polichinelle, pour un régime autoritaire auquel la répression à l’égard des journalistes et les méthodes de gouvernance valent de figurer en bas des classements internationaux sur les droits de l’Homme. »

Qui plus est, pour une élection présidentielle de 2009 qui a enregistré des contestations notoires, non seulement des candidats en lice, mais aussi, de la population gabonaise. Qui les ont valu plusieurs morts, notamment ceux de Port-Gentil (capitale économique du Gabon). Pour cause, d’une contestation populaire à une forme de dynastie royale à peine voilée au sein d’un pays qui se présente comme une République démocratique.

Rappel des faits sur le contexte du déroulement de l’élection de 2009

S’exprimant sur le contexte antidémocratique de l’élection présidentielle de 2009, Yann Barthès a ironisé, Ali Bongo a remplacé son père qui a été au pouvoir depuis 1967. 42 ans à la présidence du Gabon, sans aucune alternance démocratique. En 2009, les observateurs se rappellent encore des déclarations des candidats au fauteuil présidentiel qui furent opposés Ali Bongo. Notamment, André Mba Obame et Pierre Mamboundou, mais aussi, celles de l’ensemble de l’opposition gabonaise qui crièrent hauts et efforts, à « un coup d’état électoral ».

Dès lors, en 2009 le pouvoir en place sous le prisme d’Ali Bongo avait brandi la réelle menace d’une répression militaire. Mise en exécution, le 3 septembre 2009 par l’armée gabonaise sous les commandes du général Jean-Claude Ella Ekogha. Bras droit d’Ali Bongo lorsqu’il fût ministre de la Défense Nationale. On se souvient que ce haut gradé orchestra des violences et des émeutes devant la cité de la démocratie.

En dispersant à coups de canons, de matraques et de bombes lacrymogènes, les citoyens et les leaders de l’opposition gabonaise qui avaient pris d’assaut la Cité de la démocratie, siège de la Commission Électorale Nationale Autonome et Permanente (CENAP), organe régulateur des élections. En manifestant pour l’alternance démocratique et le respect des résultats des urnes. Où le président de la CENAP, René Aboghe Ella, gardé par l’armée gabonaise, à huis-clos, avait déclaré vainqueur, Ali Bongo. Soulignons qu’il a été reconduit le 26 mars 2014 à ses fonctions, surement pour ses bons et loyaux services afin d’assurer à n’en point douter un autre passage en force en 2016.

Pour les opposants au régime Bongo, ce coup d’état électoral avait été fomenté bien entendu, par Ali Bongo de mèche avec la Cour constitutionnelle et tous les sbires du système quarantenaire d’Omar Bongo. Et naturellement, avec le soutien assuré de Paris qui avait mobilisé les autorités politiques françaises sous la présidence de Nicolas Sarkozy en vue de plébisciter l’héritier d’un système machiavélique conçu depuis les années 1960, par la France à travers Jacques Foccart, mandaté par le Général Charles De Gaulle.

En garantissent à l’Etat français, au détriment du développement du Gabon et du bien-être du peuple gabonais, la mainmise totale de toutes les richesses des ressources naturelles dont le pétrole, l’uranium, le bois et le manganèse.... Ainsi, la France a été le premier pays de l’Union Européenne et de l’hexagone a reconnaître la victoire contestée d’Ali Bongo.

Et ce, bien avant que la Cour constitutionnelle gabonaise ne se soit prononcée sur le contentieux électoral, né de cette élection de 2009. Où l’acte de naissance du vainqueur ’’françafricain’’ avait été mis en cause par une plainte de l’opposant Luc Bengono Nsi. Qu’à cela ne tienne, la chaîne d’Etat France 24 a été le premier média a annoncé, l’élection d’Ali Bongo au Gabon, ce avant toutes les chaînes nationales. En saluant la tenue démocratique d’une élection à coup sûr truquée par le système Bongo-PDG-Franceafrique.

Entre temps, comme les archives servent toujours à remonter le temps, "Le Petit Journal" dans son édition du 18 janvier a ressorti comme à sa manière le grand jeu de la réactualisation des déclarations des hommes politiques. Cette-fois, il s’agissait d’une interview accordée à Médiapart par l’actuel président de la République Française.

En effet, François Hollande qui jadis fût en campagne pour les primaires en 2012 affirmait tout aussi, sans aucune rétention, que l’élection présidentielle de 2009 qui avait sacrée Ali Bongo à la tête du Gabon, n’avait pas été tenue en conformité d’une démocratie libre et républicaine. Interrogé sur cette consultation majeure gabonaise, il avait affirmé ce qui suit : « Je ne sais pas si elle a été truquée, en tout cas elle n’était pas dans les critères de ce que l’on peut appeler des élections démocratiques. »

Mais, à cette période, François Hollande n’était pas encore président de la République française. Sa déclaration n’engageait donc en rien la France. C’est ce qu’a minoré Manuel Valls. Car depuis son accession à l’Elysée, le président français a poursuivi tout comme ses prédécesseurs la dépendance françafricaine. En recevant Ali Bongo à l’Élysée dès juillet 2012. Et pourtant, comme Nicolas Sarkozy avant lui, avait annoncé l’enterrement de la Françafrique, dont Libreville est une cheville ouvrière. Et si Manuel Valls souhaite s’en débarrasser, il lui faudra attendre d’être élu à son tour à la fonction suprême

De ce fait, pour le journaliste de Canal +, les autorités gabonaises sont dans une surenchère réactionnaire. En faisant tout un plat, au sujet de la déclaration du Premier ministre français. Car ce n’est pas un fait nouveau. Et donc ne justifie pas un incident qui puisse légitimer l’agitation d’une tension diplomatique saugrenue entre Libreville et Paris. En l’occurrence, sur un lapsus bien que révélateur, ne vaut pas son pesant d’or, selon Yann Barthès. Comme à l’accoutumée, ce dernier a tourné en dérision l’intervention du ministre gabonais de l’Intérieur, Pacôme Moubelet Moubeya.

Tout en marquant son étonnement et son incompréhension suite aux propos de Manuel Valls, Pacôme Moubelet a tout de même affirmé sur les antennes de Gabon Télévision, le rappel de l’ambassadeur gabonais en France pour "consultations", par le Ministre gabonais des Affaires étrangères. A noté que depuis 2009, c’est la troisième fois que le Gabon rappelle son ambassadeur en France. Pour des drôles incidents diplomatiques dont les résolutions sont connues d’avance.

Vingt quatre heures plus tard, Matignon a d’ailleurs calmé le jeu. En réaffirmant par voie de presse, la confiance qui règne entre Libreville et Paris . Et en recevant en audience Ngoyo Moussavou, par l’entremise de son conseiller en diplomatie et son chargé de mission, Stéphane Romatet et Ibrabima Diawadoh. Vu qu’il est annoncé que Manuel Valls doit se rendre en février à Libreville pour une visite d’ordre économique. Mais cet excès de zèle et cette susceptibilité prononcés des autorités politiques gabonaises ont fait le lit d’une résurgence des réactions sur l’irrégularité de l’élection d’Ali Bongo à la tête du Gabon.

Réactions d’hommes politiques et d’un universitaire

De facto, le débat sur la légalité démocratique de l’élection d’Ali Bongo a resurgi comme lors de la publication du livre de Pierre Péan, « Nouvelles affaires africaines : mensonges et pillage au Gabon  ». Avec un florilège de réactions de tous genres. Pour sa part, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, président de l’UPG loyaliste et membre du Front uni de l’opposition revendique au nom du peuple gabonais, une fin « d’un soutien abusif » des autorités politiques françaises au régime Bongo-PDG qui règne au Gabon depuis 1967.

« Nous sommes très très heureux que la France, partenaire séculaire du Gabon, accompagne notre pays sur le chemin de la transparence », a confié Jean Ping, candidat à la présidentielle du Front de l’opposition pour l’alternance (Fopa), la plus importante coalition de l’opposition gabonaise à France 24.

De son côté, l’opposant Richard Moulomba Moumbo, président de l’Arena, Alliance pour le renouveau national s’est félicité de ces propos sur RFI : « Manuel Valls confirme ce que nous savions déjà. Ali Bongo doit tirer les conclusions de son imposture », a-t-il déclaré.

Sur France24, Zacharie Myboto s’est réjouit que la réalité sur l’illégalité et l’incohérence démocratique de l’élection d’Ali Bongo soient révélées au grand jour par la première autorité gouvernementale de l’Etat français. Car selon lui, c’est une mascarade politique connue par tout le peuple gabonais. Et, d’affirmer que le parti l’Union Nationale (UN), dont il est un des membres fondateurs avait mis en lumière ce coup d’état électoral. En créant une défiance du régime en place avec l’acte politique qu’on a nommé, le gouvernement du PNUD. Par l’entremise du leadership du secrétaire exécutif, André Mba Obame.

Un autre son de cloche a élégamment été relayé. Cette fois-ci, il s’agit du Professeur, homme des lettres, philosophe et politologue gabonais qui a été couronné à Bruxelles, savant africain, par les héritiers de Cheikh Anta Diop, Grégoire Biyogo, de donner son avis sur les déclarations de Manuel Valls. Au sujet de la non-conformité de l’élection qu’il qualifie d’anti-démocratique du chef de l’Etat gabonais.

Tout en invitant à débattre sur le fond, Grégoire Biyogo s’interroge : « Est-ce heurter les clauses de confidentialité qui régentent la coopération entre deux Etats que de prendre position au sujet d’une élection anti-constitutionnelle ayant conduit à un septennat hors-Droit, à quoi on peut ajouter répressif, sanglant et de paupérisation du Peuple ?" Ali Bongo n’a pas été élu... ", telle a été la déclaration de Manuel Valls, Premier Ministre de la République française, sur France 2, à Paris, le 16 janvier 2016.  »

L’universitaire ne s’arrête pas là, M. Biyogo salue les propos de Manuel Valls en indiquant que, « ce que l’on savait au Gabon et partout ailleurs en Afrique et dans le Monde depuis la consultation présidentielle de 2009 et que personne n’avait encore relayé avec autant d’autorité et de franchise en Afrique, en Europe, en Amérique ou ailleurs dans le Monde, vient d’être définitivement confirmé - mais sans ambages - par la plus haute autorité de l’exécutif de France. Il s’agit de la sorte d’un acte de responsabilité publique extrêmement important, qui honore le Chef du Gouvernement français lequel, avec son franc-parler rappelle simplement la conception constitutionnelle et républicaine de la Gouvernance électorale... Et déductivement, que son déni est un acte répréhensible en Droit... Une violation constitutionnelle. »

Le philosophe égyptologue s’explique en ces termes, « ce qui peut paraître aujourd’hui surprenant, et de bien mauvaise foi, c’est que l’on vienne à s’en étonner ou à s’en offusquer un tant soit peu, en adoptant des réactions obscurantistes ou obstructionnistes...en décidant de suspendre la Mission diplomatique gabonaise accréditée en France... Aurait-on pensé qu’une élection aussi ostentatoirement usurpée et imposée avec autant de répression sanglante sur les populations, les Leaders politiques et les Intellectuels... pouvait être ignorée ou oubliée de si peu par les électeurs ou par les Observateurs internationaux ? ».

Et d’ajouter, « ce ne serait pas seulement avoir la Mémoire courte mais cela révélerait encore et surtout le principe de naturalisation et de pseudo-normalisation et de confusion systématique entre cela qui est antidémocratique et sanglant et une élection régulière, constitutionnelle et démocratique - sans contrôle autoritaire ni répression militaires. »

Avant d’appeler à un sursaut d’orgueil patriotique primordial pour les intellectuels et une réaction proportionnelle politique de la part des barons de l’opposition gabonaise à ce qu’il qualifie comme une imposture : « il reste aux intellectuels prioritairement, aux leaders politiques et aux Forces de l’opposition, comme à tous les amis des libertés à tirer argument de ce contexte favorable aux élections libres qui s’offre à la veille de la consultation présidentielle de 2016 au Gabon - et en Afrique de manière générale - en faisant un "Aggiornamento", une mise à plat systématique et définitive des conditions élémentaires d’une élection démocratique constitutionnelle et démocratique - sans contrôle autoritaire ni répression militaires. »

Le professeur Biyogo argumente son point de vue en affirmant que, « cela signifie qu’il faille pouvoir réorganiser et dépouiller complètement les pouvoirs patrimoniaux, antidémocratiques et répressifs des instances d’organisation et d’arbitrage des élections dès lors que celles qui en ont eu la charge depuis toujours ont littéralement échoué et discrédité la constitutionnalité des élections. L’erreur fatidique serait de continuer de laisser des régimes politiques s’installer par la force en Afrique, et de capituler en leur donnant une sorte de chèque en blanc sur le devenir, en concédant qu’ils poursuivent des Mandats usurpés. »

Avant de conclure son adresse en précisant :« en somme, la déclaration de Manuel Valls vient d’entrouvrir une conjecture favorable et de rappeler l’impératif démocratique de la transparence constitutionnelle des élections.. Il reste maintenant à arracher le Droit à la souveraineté du choix des électeurs. Après l’anti-modèle des indépendances sans souveraineté, Kama doit s’inventer des gouvernances issues de la Constitution pour renforcer le caractère démocratique de la gouvernabilité. »

@info241.com
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