Malversations

Delta Synergie, l’impitoyable machine à gros sous de la famille Bongo

Delta Synergie, l’impitoyable machine à gros sous de la famille Bongo
Delta Synergie, l’impitoyable machine à gros sous de la famille Bongo © 2015 D.R./Info241

Delta Synergie est sans nul doute, la plus importante entreprise gabonaise de tous les temps. L’entreprise est pourtant méconnue du grand public. Pour cause, ses actionnaires sont également aux commandes de tous les leviers de l’économie gabonaise depuis 47 ans. C’est du moins ce que révèle le très sérieux Mediapart ce 12 mars, comme un clin d’œil à la célébration du 47e anniversaire du Parti démocratique gabonais (PDG), parti fondé aux aurores, par Omar Bongo.

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Mais une autre création économique, plus secrète, confirmera le génie financier du patriarche de la françafrique : Delta Synergie. Une main-basse gigantesque sur l’économie gabonaise orchestrée par la famille Bongo pour s’offrir des parts sociales rentables de plus de 35 entreprises majeures de notre économie, au mépris de la Constitution et des règles juridiques pourtant établies. Dans cette prise illégale d’intérêts, au sommet de cette puissante pyramide de rente, figurent bien sûr Omar Bongo et son clan mais aussi le précieux atout, Nicolas Sarkozy.

La succession d’Omar Bongo chiffrée à 360 milliards, lève le voile sur le modèle économique à l’origine de son immense fortune. Laquelle ne serait rien sans Delta Synergie, une holding familiale conçue pour s’accaparer des bénéfices personnels en acquérant des parts sociales du fleuron de l’économie gabonaise. La répartition de cette manne fait grincer les dents parmi les héritiers alors que Ali et Pascaline Bongo raflent la mise avec les 2/3 du butin présidentiel à hauteur de 183,46 milliards. La cinquantaine d’autres héritiers doivent se contenter chacun de 3,39 milliards. Une injustice donc !

Officiellement, indique Mediapart, « Delta Synergie a été valorisée dans le cadre de la succession d’Omar Bongo à 27,8 milliards de francs CFA. Plusieurs héritiers soupçonnent une sous-évaluation massive, au regard de l’emprise réelle de la holding sur l’économie gabonaise. »

Les deux principaux héritiers de la fortune usurpée

Nombre d’entre eux, précise Mediapart « n’ont en effet découvert cet état de fait que ces derniers mois et ils se demandent aujourd’hui où sont concrètement passés les immenses flux financiers dégagés par Delta Synergie depuis 2009. Certains viennent d’ailleurs de missionner des avocats français ou américains et menacent d’engager des poursuites pénales pour détournement d’actif successoral, selon nos informations. »

Delta tout terrain

Pas un secteur de l’économie gabonaise n’est épargné par le système Delta Synergie : assurances, banques, agroalimentaire, sécurité, transport, médicament, BTP, agriculture, matières premières, immobilier, aviation d’affaires, textile, média, vente de gaz et de pétrole, bois. Rien qui brille n’échappe donc à l’entourloupe financière de la famille présidentielle qui s’offre ainsi, en toute clandestinité, tout le poumon économique gabonais sur son compte en banque.

Selon Mediapart, « au moins quatre multinationales françaises présentes au Gabon – Bolloré, Bouygues, Eramet et la BNP – sont citées dans les documents en notre possession. Au total, ce sont 35 sociétés majeures de l’économie gabonaise au capital desquelles Delta Synergie est partie prenante, à des degrés divers. »

Un exemple de l’actionnariat de Delta Synergie

Les actionnaires de cette puissante entreprise gabonaise étaient connu que d’une poignée de personnes au Gabon. Jusqu’en 2009, Omar Bongo détenait 37 % des parts de la société (soit 114 700 actions), d’après deux déclarations de succession rédigées les 10 juin et 1er octobre 2014. Ali et Pascaline Bongo se sont vu gratifié secrètement de 10 % chacun à titre personnel. Six autres membres de la famille se partageaient le reste.

La constitution gabonaise souligne pourtant sous l’article 14 que la fonction de président République n’est pas compatible avec toute autre activité lucrative. C’est donc peine perdue puisque Omar Bongo a bien durant 42 ans foulé au pied cette disposition de notre loi fondamentale.

N’osons même pas évoquer les questions d’éthique et de moralité publique qui semblent bien loin le propos de la famille Bongo qui a amassé ainsi son précieux trésor de guerre au grand dam du développement de la réelle émergence du Gabon.

Ali et Pascaline Bongo aux manettes

Pour Mediapart, « Ali Bongo, élu en 2009 à l’issue d’un scrutin très contesté avec le fervent soutien du président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, a vu au terme de la succession sa part personnelle grimper à 19,25 %. Tout comme sa sœur aînée Pascaline, qui fut aussi la plus proche collaboratrice de son père à la présidence de la République » . On comprend mieux pourquoi Sarkozy fut le premier président à féliciter son partenaire d’affaires avant tout le monde, au nom de leurs intérêts économiques communs.

Six ans après la disparition du patriarche de la Françafrique, l’équation est donc simple explique Fabrice Arfi : « l’actuel chef de l’État gabonais en exercice et sa sœur sont aujourd’hui les principaux bénéficiaires de la mine d’or que représente Delta Synergie. Le tout avec l’assentiment d’avocats et de notaires – parfois français – qui ont pris activement part à la succession Bongo ».

Un autre exemple de l’actionnariat de Delta Synergie

Le journaliste d’investigation, affirme que la holding famille s’est entichée du secteur des matières premières dont celui des mines. « Delta Synergie apparaît aussi au capital de Gabon Mining Logistics (30 %), une filiale du groupe Bolloré qui offre un soutien logistique au secteur minier gabonais. Sollicité, le groupe Bolloré n’a pas donné suite à nos questions. La holding des Bongo est également actionnaire de Ragasel (29,1 %), une raffinerie de sel, qui partage quant à elle son capital avec l’actuel ministre des sports du Gabon, Blaise Louembé (1,7 %). »

Ce pillage abusif de l’économie gabonaise ne s’arrête pas là selon Mediapart, « on peut également citer la Somipar (28,5 %), la société Petro Gabon Holding (17 %), spécialisée dans la commercialisation des hydrocarbures, Les Carrières de Makora (13,04 %), Maboumine (5 %), qui gère un immense projet d’exploitation de gisement polymétallique au sud-est de Libreville, la Somivab (2,68 %), laquelle œuvre dans le bois, ou encore la Comilog (0,03 %), une filiale du géant français des mines et de la métallurgie Eramet.

Pour Fabrice Arfi, « le second secteur le plus représenté dans le portefeuille de Delta Synergie est le monde de la finance et des banques. La pépite des Bongo est ainsi parvenue à s’infiltrer au fil des ans dans le capital de la BGFI Bank Congo (10 %), d’Ecobank Gabon (7,5 %) ou de BGFI Holding (6,4 %), la plus puissante banque du pays. Sont aussi concernées la Finatra (6,25 %), spécialisée dans le crédit à la consommation, l’Union gabonaise de banque (UGB, 5,21 %) ou la Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Gabon (BICIG, 3,23 %), une filiale de la BNP. »

Selon Mediapart, « Delta Synergie est en outre actionnaire à 15 % d’un autre véhicule financier des Bongo, la Compagnie du Komo. C’est elle, par exemple, qui est au capital de la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG), filiale du géant français Veolia qui détient depuis 1997 le monopole absolu de l’eau et de l’électricité dans tout le pays ».

Fabrice Arfi va plus loin dans ses révélations qui jettent l’opprobre sur les manigances de pillage de la famille Bongo avec la complicité active d’Ali Bongo en relevant que « les assurances et les transports arrivent à égalité en troisième position des secteurs d’activité chéris par Delta Synergie. La principale compagnie d’assurances du Gabon, le groupe Ogar, est ainsi détenue à 60,69 % par la holding quand deux autres acteurs du marché, la Solicar et Assinco, sont contrôlés respectivement à hauteur de 55 % et 7,5 %. Quant aux transports, Delta Synergie apparaît au capital de la Sarep (54 %), qui fait dans le transport maritime, de la SN2AG (34,99 %), spécialisée dans l’aviation d’affaires, ou de Gabon Fret (20 %). »

Mediapart révèle aussi que « rien n’échappe à Delta. Ainsi, dans le secteur très lucratif du BTP, la Socoba, principale bénéficiaire des travaux publics du pays dirigée par un gendre d’Omar Bongo, a dû laisser au profit de Delta Synergie 50 % de ses actions. Le groupe français Bouygues, présent au Gabon au travers de la société ETDE/SOGEC, n’échappe pas à la règle : 4,54 % du capital de ses activités gabonaises sont contrôlés par Ali Bongo et les siens ».

Il faut souligner que Mediapart a également sollicité, le groupe Bouygues n’a pas donné suite. Dans l’immobilier, « le géant gabonais IMP est contrôlé à 35 % par Delta et son concurrent AICI à 20 %. Dans le textile, la société MGV, connue pour fabriquer tout ce que le pays compte d’uniformes (écoliers, armée, hôpitaux…), a dû laisser 34,7 % de son capital aux caciques du régime. Côté médicaments, aussi : la Société gabonaise de fabrication de médicaments, la Sogafam, a vu son capital tomber à hauteur de 60 % entre les mains des Bongo ».

Un autre exemple de l’actionnariat de Delta Synergie

En effet révèle Mediapart, « le pourcentage est encore supérieur (69,3 %) dans le domaine de la sécurité avec la Société gabonaise de sécurité, la SGS, leader dans la sûreté des sites sensibles, ambassades, ports ou aéroports. Depuis plusieurs années, de hauts gradés de l’armée française, comme le colonel Béthencourt ou le général Megel, défilent à la tête de la SGS, au capital de laquelle on retrouve également la famille d’Ernest Mpouho Epigat (9,2 %), l’actuel ministre de la défense. Un tout petit monde ».

La succession Bongo est une double bombe à retardement

Selon les informations rendues public par Mediapart, « pour la famille : les membres du clan s’entre-déchirent autour du magot laissé par Omar Bongo. Les sommes en jeu sont, de fait, vertigineuses. Un document du ministère de l’économie gabonais, obtenu par Mediapart, montre que Pascaline et Ali sont appelés à se partager plus de 183 milliards de francs CFA (280 millions d’euros) en tant que légataires universels du dictateur disparu. Soit 140 millions d’euros chacun  ».

Fabrice Arfi explique par ailleurs que, « la succession est surtout devenue un problème politique de premier ordre pour la présidence du Gabon, alors que le pays connaît depuis bientôt un mois l’une des plus graves crises sociales de son histoire. Les conditions de vie médiocres et les bas salaires, qui ne s’améliorent pas en dépit des nombreuses promesses de campagne d’Ali Bongo, ont poussé une partie des salariés à se mettre en grève et à plonger le pays dans un état de quasi-blocage ».

On serait curieux de connaitre les suites données à cette sombre affaire financière par la justice gabonaise ainsi que les chambres parlementaires. Quand le premier citoyen du pays foule au pied les dispositions constitutionnelles et légales pour se constituer un précieux trésor de guerre, quel âme revêt la politique gabonaise ?

La politique du ventre semble au bas mot, la leitmotiv de nos gouvernants qui n’hésitent pas à marcher à contre-vent de leur engagement à servir la Nation pour se remplir sans vergogne leurs poches pourtant déjà bien dorées par leurs inlassables aller-et-venus dans les caisses du Trésor public.

Détournement des deniers publics, prise illégale d’intérêts, appauvrissement volontaire des Gabonais au profit d’une infime minorité : une famille Bongo. Et ce, au détriment de tout le peuple gabonais. Est-ce de ce pillage criard des deniers publics du Gabon que le porte-parole de la présidence Billie Bi Nze qualifie de sphère privée des Bongos ?

Vive le désormais "Bongoland" où les politiciens tirent les cartes d’un pillage économique moribond qui fonde notre misère sociale pour constituer en définitive l’ADN d’une génération politique qui n’a décidément rien compris à l’idéal de Nation qui nous anime tous !

Les droits de succession d’Omar Bongo

Pour consulter gratuitement les documents de cette sombre affaire Bongolandaise sur le site de Mediapart, cliquez ici

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