Liberté de la presse

Deux journalistes gabonais condamnés à de la prison pour délits de presse

Deux journalistes gabonais condamnés à de la prison pour délits de presse
Deux journalistes gabonais condamnés à de la prison pour délits de presse © 2016 D.R./Info241

La liberté de la presse et d’expression est loin d’être totalement acquise au Gabon. En effet, suite à une plainte du « Charlie gabonais », Ali Bongo, la Chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Libreville a condamné le 9 juin deux journalistes exerçant dans le groupe Oloumambé ( qui publie La Loupe et Moutouki ) a des lourdes peines assorties d’un emprisonnement. Quid du respect de la liberté d’opinions made in Gabon.

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Selon des informations concordantes cette condamnation qui est marquée par l’emprisonnement d’un an de nos deux confrères est due au fait d’un article paru dans le journal l’Aube que la Cour d’Appel connaissant de l’affaire en second ressort les a condamné à des lourdes peines de prison. Il faut souligner que tous les présidents gabonais depuis 1968 n’ont jamais eu le courage de lever comme dans plusieurs pays démocratiques le délit de presse. Mais comme nous le rappelle à juste titre Jacques Prévert, « quand la liberté n’est pas libre, la vérité n’est pas vraie ».

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Pour rappel des faits, cette affaire remonte à janvier 2015 lorsqu’en marge de la Coupe d’Afrique des Nation, le président gabonais, Ali Bongo assiste à un match de football de poule opposant le Gabon à la Guinée Equatoriale. Suite à l’élimination des Panthères du Gabon de la compétition, l’Aube titrait en une, un article illustré par une photo montage, montrant Ali Bongo dans une tenue jugée désobligeante par le régime présidentiel de Libreville.

Ainsi, une plainte avait été portée par le président gabonais contre le journal L’Aube. Il s’est agi en première instance, du directeur de publication et bien entendu de l’auteur de l’article. Avec une condamnation à la clé à trois mois de prison. En appel, l’un des journalistes a écopé d’un an de prison dont 6 fermes et une amende de 500 000 FCFA. Le second journaliste avait écopé d’un an de prison dont 2 fermes et 1 million de FCFA d’amende.

Maître Paulette Oyane, avocate de nos confrères condamnés par la Cour d’Appel a toutefois récemment fait appel, en plaidant pour la réouverture des débats portant sur ce jugement qui comporte certaines irrégularités de fond. En effet, a-t-elle indiqué dans une correspondance à la présidente de la Cour d’appel judiciaire : «  Je sollicite respectueusement, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, la réouverture des débats, au nom du principe sacro-saint des droits de la défense, afin d’éviter tout scandale inutile ».

Selon Paulette l’avocate Oyane-Ondo sa démarche est construite sur une raison judiciaire. En effet, elle nous informe que l’affaire, mise en délibéré le 6 mai dernier, ait connu sa délibération avant même que son client n’ait été cité à comparaître. Ce, en flagrante violation de l’article 22 du Code de procédure civile. Ainsi, a-t-elle martelé, « Il est important de souligner que c’est moi, en tant qu’avocate de ce journal en appel, qui ai personnellement fait appel en son nom et pour son compte ». Car en tant qu’avocate elle avait la charge de ce dossier au greffe.

Or, a expliqué Mme Oyane-Ondo, au moment où elle a tenté de s’enquérir du dossier de son client cité dans cette affaire, elle a essuyé curieusement une fin de non recevoir du greffier. Tout en précisant que, «  Le greffier décida que les parties doivent être personnellement citées ! Qu’à cela ne tienne, j’attendais donc que mon client fut personnellement cité. Mais cela n’a jamais eu lieu », avant d’exprimer son étonnement : « Tout d’un coup, j’apprends que cette affaire a été mise en délibéré pour décision rendue le 9 juin, au motif que la citation aurait été faite à la mairie ».

C’est dans ce sens que l’avocate a rappelé l’esprit de la loi sur la procédure en vigueur en terre gabonaise. En effet, Maître Paulette Oyane affirme que la défense soutient que l’huissier ou l’agent d’exécution a violé le principe du contradictoire, le Code de procédure civile, ainsi que les directives et principes sur le droit à un procès équitable. « Et la Cour de céans, en acceptant une telle méconnaissance des règles, a entériné cette violation. Or, le rôle du juge n’est pas d’entériner la violation de la loi, mais de s’assurer que la loi est respectée et que les droits de toutes les parties ont été protégés pour les besoins d’un procès équitable. Ce qui n’est pas le cas en l’espèce », s’est insurgée l’avocate.

Il faut signaler que ces peines sont d’une gravité inqualifiables surtout quand le plaignant jouit d’une immunité de juridiction qui le met à l’abri de toutes formes de poursuites. Dans cette condamnation aux allures d’intimidation de la liberté de la presse, en terre gabonaise, l’hebdomadaire l’Aube a été condamné aux dépends. Il paiera les frais de procédures ainsi que les dommages et intérêts à la victime qui est autre que le président gabonais, Ali Bongo Ondimba. Une sanction d’une rare sévérité qui n’honore pas le Gabon dont le président se dit pourtant être “Charlie Hebdo”.

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A l’occasion de sa participation pour soutenir la liberté d’expression, la liberté de la presse et d’opinion en terre française lors de l’attaque terroriste contre le journal satirique "Charlie Hebdo", Ali Bongo affirmait donc : «  la liberté n’a pas de prix et doit être défendue à tout prix  » Or, au Gabon, la liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté d’opinions sont loin d’être une valeur démocratique partagée par le régime Bongo-PDG. Ce dernier a toujours brillé par des censures répétées de la presse antisystème, perpétuées par Conseil national de la communication (CNC) et par des récurrentes poursuites judiciaires contre des journalistes pour leur liberté d’opinions.

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Rappelons à toutes fins utiles qu’un « délit » de presse est une infraction (crime, délit ou contravention) ordinaire, commise par la voie de la presse, avec une certaine publicité et – c’en est un élément essentiel – l’expression d’une pensée ou d’une opinion. Il s’agit de cas où la loi autorise à sanctionner l’abus de la liberté d’expression. Eu égard au caractère particulier de la poursuite de faits intimement liés à la liberté d’expression, la Constitution a toutefois prévu des règles dérogatoires au droit commun ; ainsi, par exemple, la connaissance de tels faits relève-t-elle de la compétence exclusive de la Cour d’assises, dont le fonctionnement prend appui sur l’intervention du jury populaire.

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