Travaux fictifs

Moabi : Total Gabon impliqué dans un scandale de travaux fictifs d’un ancien ministre d’Ali Bongo

Moabi : Total Gabon impliqué dans un scandale de travaux fictifs d’un ancien ministre d’Ali Bongo
Moabi : Total Gabon impliqué dans un scandale de travaux fictifs d’un ancien ministre d’Ali Bongo © 2024 D.R./Info241

Alors que les populations de Moabi (Nyanga, sud du Gabon) sont en proie à des problèmes d’eau, d’électricité dus au mauvais état de la route, l’Etat gabonais avait pourtant financé en 2016 des travaux similaires. Des fonds qui ont été détournés par l’ancien ministre du Pétrole et des Hydrocarbures Etienne Dieudonné Ngoubou via la Société d’entretien des routes du Gabon (SERG). On parle de la bagatelle somme de près de 3 milliards dérobés avec l’implication avec le géant pétrolier Total Gabon. Retour sur une bien sombre affaire de détournements de fonds publics qui auraient dû profité aux populations de la Nyanga.

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Rappel du cadre règlementaire

Conformément aux dispositions de la Convention d’établissement et des différents Contrats d’exploitation et de partage de production (CEPP) signés entre la République gabonaise et Total Gabon, dans le cadre des actions de développement durable, la société Total Gabon a contribué avec d’autres opérateurs pétroliers à la création d’un Fonds de développement des communautés locales (FDCL). Ce fonds vise à financer des projets visant à améliorer les conditions de vie des populations vivant à proximité de ses sites pétroliers et au développement des localités qui y sont proches.

L’ancien ministre d’Ali Bongo en chef d’orchestre de ce détournements de fonds de développement local

La mobilisation de ces fonds est encadrée d’une part par la procédure d’utilisation des fonds de développement des communautés Locales instituée par la tutelle (Ministère du Pétrole et des Hydrocarbures), et d’autre part par les directives, politiques, chartes, code de conduite, code d’éthique et toutes les procédures du groupe Total et internes à Total Gabon relevant du domaine du sociétal et des contrats-achats. Jusque-là pas de soucis particulier.

Des travaux fictifs

Cependant, le contournement de ces procédures bien établies, telles que les chartes, le code de conduite, le code d’éthique, etc., par les dirigeants de sociétés comme Total Gabon, continue de nuire au développement du Gabon. Cela compromet les objectifs visés pour une meilleure qualité de vie au bénéfice de tous, favorisant plutôt une minorité sans scrupules, animée par le désir de s’enrichir rapidement et illicitement.

Une irrégularité flagrante réside dans le financement par Total Gabon, en toute connaissance de cause, de "travaux fictifs" de réhabilitation des voiries de la commune de Moabi dans la province de la Nyanga. En effet, tout commence le 14 juillet 2016 lorsque le ministre Etienne Dieudonné Ngoubou, ministre du Pétrole et des Hydrocarbures de l’époque, par lettre n°00547 MPH/CM, demande au directeur général de Total Gabon Henry-Max Ndong Nzue de lui faire le point sur les fonds de développement des communautés locales et leurs soldes.

Des entorses à la règlementation

Une semaine plus tard soit le 21 juillet 2016, par courrier référencé n°2016-0042, Total Gabon transmet au ministre ces informations. Le 2 août 2016, par courrier n° 0062 MPH/CM, le ministre Etienne Dieudonné Ngoubou demande au directeur général de Total Gabon la mise à disposition du solde des fonds de développement des communautés dans un compte à la Caisse de dépôts et consignation (CDC).

Le responsable d’Affaires chez Total Gabon, jugeant cette procédure pas très orthodoxe, fait le mort et ne donne pas suite au courrier du ministre. Après des échanges avec Claude Sosthène Nziengui Nzaou, le chef de la Division Associations, qui insiste et arguant que le DG avait donné son accord de principe au ministre, le responsable du Service Développement Durable adresse au ministre un courrier pour lui notifier le refus.

Sommation de payer

Le 9 août 2016, par courrier n°006235 MPH/CM, le ministre Etienne Dieudonné Ngoubou transmet au directeur général de Total Gabon la facture n°FC226 de la Société d’Entretien des routes du Gabon (SERG) basée à Mouila ainsi qu’une copie du contrat référencé n°0063/04/Août/2016, signé par entente directe (gré à gré) entre le ministère du Pétrole et des Hydrocarbures et ladite société pour la réalisation des travaux de réhabilitation des voiries de la commune de Moabi dans la Nyanga pour un montant de près de 3 milliards de francs CFA (précisément 2 865 375 120 FCFA), pour paiement, sous huitaine, sur le Fonds de développement de communautés locales.

Le 12 août 2016, les responsables de l’entité concernée à Total Gabon, en accusant réception du courrier du ministre, lui font observer la violation des procédures régissant le FDCL. De plus, la société SERG n’était pas jusqu’alors enregistrée ni agréée chez Total Gabon.

Destination inconnue

Contre toute attente, le directeur général Henry-Max Ndong Nzue a accepté tout de même de payer, hors du périmètre de ses contrats d’exploitation, à la SERG pour des "travaux fictifs" une somme sur le compte bancaire n° 40021 01000 00099100159/67 ouvert chez ORABANK. Pour ce faire, il a retiré le dossier au responsable de l’entité Développement Durable et l’a confié à Claude Sosthène Nziengui (natif de Moabi), à l’époque chef de la Division Associations et actuellement à la Gabon Oil Company (GOC).

À ce jour, après vérification, ces travaux n’ont pas connu un début d’exécution à Moabi pourtant prévus ne durer que 8 mois. Par contre, le coût desdits travaux figure bel et bien dans les différents rapports produits par Total Gabon en 2016 pour vanter ses mérites d’entreprise citoyenne, alors que toutes ses actions de citoyenneté sont financées par les fonds contractuels et rien sur ses fonds propres.

Violations des procédures

Au regard de ce qui précède, Total Gabon a bel et bien méprisé les textes du Groupe Total et ses propres règles internes, notamment :

  • La politique sociétale du Groupe Total
  • La directive sociétale du Groupe Total
  • La politique de Prévention de la Corruption et Programme de Conformité
  • La politique Éthique de Total Gabon
  • Le Code de Conduite du Groupe Total
  • La Charte Éthique du Groupe Total
  • La Charte Intégrité du Groupe Total.

Ainsi donc, avec la complicité de Total Gabon, Etienne Dieudonné Ngoubou, qui avait été responsable de harcèlement professionnel et brimade des cadres gabonais au sein des sociétés pétrolières, et étrangement mis en liberté provisoire le 5 août 2018, après avoir été incarcéré pour malversation financière, est le principal bénéficiaire de ce financement fictif. Il a de facto permis de comprendre que la démarche de bonne gouvernance du géant pétrolier Total tant vantée et appliquée en Afrique n’est que de la « poudre aux yeux », voire de la mystification pour avoir bonne conscience.

@info241.com
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