Portrait

Dr Albert Ndjavé Ndjoy, l’un des premiers médecins militaires du Gabon

Dr Albert Ndjavé Ndjoy, l’un des premiers médecins militaires du Gabon
Dr Albert Ndjavé Ndjoy, l’un des premiers médecins militaires du Gabon © 2022 D.R./Info241

En 1883, un patriarche d’une noble et grande famille gabonaise débuta son existence sur terre. Il avait pour nom Henri Ndjavé Ndjoy et fut l’ascendant d’une importante descendance dont Albert Ndjavé Ndjoy (1944-2021) appartenait. S’établissant géographiquement dans le village situé non loin de la région de Lambaréné dont le nom originel serait Lembaréni signifiant littéralement en langue Galoa « essayez donc de nous attaquer », Henri Ndjavé Njoy était normalement originaire du pays Nkomi se trouvant lui dans l’Ogôwè-Maritime, l’actuel Ogooué-Maritime dont la chef-lieu abrite la capitale économique du Gabon.

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C’est l’un de ses frères qui le fit venir dans le Moyen-Ogôwè, le Moyen-Ogooué actuel, dont Lambaréné est la capitale provinciale. Vers le milieu de l’année 1940, une nouvelle naissance au sein du clan Ndjavé Ndjoy viendra gonfler l’impressionnant nombre des porteurs dudit patronyme. Des dizaines d’années plus tard, son petit-fils, Albert Ndjavé Ndoy devint une figure importante de l’administration gabonaise. C’est d’ailleurs l’histoire de sa vie sur laquelle nous allons nous concentrer dans ce décryptage existentiel. Par ailleurs, le passé de sa famille est intimement lié à l’office religieux car plusieurs d’entre ses proches sinon quasiment tous étaient de fervents chrétiens protestants.

L’illustre disparu

Son grand-père fut même l’un des premiers pasteurs autochtones de confession protestante. Cet enfant des bords du fleuve de l’Ogooué et des grands lacs a su au fil des années, graver dans la mémoire collective, les traces de ses ancêtres mais plus considérablement de leur postérité. Il fut parmi les « architectes » du Gabon en étant un membre de premier ordre de la chaîne de commandement du président Bongo avec lequel, il entretenait une chaleureuse et bienveillante relation. Albert Ndjavé Ndjoy fut également l’un des premiers médecins militaires de son pays et développa, dès sa création, l’institution militaire sanitaire y afférente dans laquelle il devint le premier directeur général lorsqu’elle fut fondée.

 Naissance

Albert Ndjavé Ndjoy est né le 26 mai 1944 au village « Izolwè » dans la circonscription territoriale du Moyen-Ogooué basée en Afrique équatoriale français (AEF) au sein de son établissement humain portant le nom de « Gabon ». Sa mère, du clan Anouva était la nommée Onanga Christine Twetevô (un nom par défaut dont le diminutif est Itwé signifiant chevelure abondante ou les cheveux car elle avoir un cuir chevelu très fertile) et était affectueusement appelée « Ma Titine ».

Quant à son géniteur, il s’appelait Elie Ndjavé Ndoy, fils de Henri Ndjavé Ndjoy, l’un des pionniers de la profession pastorale d’obédience protestante. A cette période, cette région africaine qu’est le Gabon, longtemps parcellée en royaumes était une colonie africaine du très contrasté Empire français et rattachée à l’autorité de la Métropole au moyen de son administration coloniale, l’AEF.

Ses parents eurent cinq autres enfants : Madeleine Ezendjé, Phillipe Ndjavé Ndjoy, Berthe Vandji, Violette Kéwa et Jacqueline Môkèto. Cette progéniture ravit énormément Elie Ndjoy car le couple avait, dans un premier temps, perdu un premier enfant en 1929. Lui aussi fut le père de plusieurs enfants notamment avec son épouse Cécilia Ndjavé Ndjoy qui lui rendit père plus d’une fois. Albert Ndjavé Ndjoy était un digne fils de la communauté « Myènè » et était Galoa et Nkomi, deux des ethnies majeures de ladite communauté.

 Parcours scolaire

C’est à la mission protestante du village de Ngômô que Albert Ndjavé Ndjoy débute son cursus. Après l’obtention de son Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE), le jeune Albert s’inscrit au secondaire au sein de Libreville, la capitale de son pays, et décroche son baccalauréat.

Ce précieux parchemin acquis, Albert Ndjavé Ndjoy poursuit ses études et finira par être titulaire d’un diplôme d’Etat en médecine. Il se spécialisera dans la médecine militaire, un pan médicale consacrée à la prévention, au diagnostic et au traitement des maladies et des traumatismes liés à l’exercice de la profession militaire.

 Son arrivée à la direction générale de la santé militaire

A la fin de ses études, Albert Ndjavé Ndjoy intègre la fonction publique pour exercer passionnément sa carrière de professionnel de santé. Mais en ces temps, l’armée gabonaise était en pleine mutation et subissait une réorganisation profonde pour nationaliser son commandement et bâtir une véritable force de défense et de sécurité « vert-jaune-bleu ». En effet, les forces armées gabonaises furent créées de façon officielle moins de 100 jours après l’accession du Gabon à la souveraineté internationale. C’était un 6 décembre 1960.

Ce sont les officiers français qui étaient chargés de la formation de l’instruction des soldats gabonais constituant le premier bataillon d’infanterie nationale basés à l’époque, au camp militaire N’Tchoréré de Libreville. Il s’y trouvait approximativement 400 hommes. Par ailleurs, le président Léon Mba n’a jamais vraiment voulu faire confiance à des hauts gradés de son armée. Il craignait en effet être renversé par l’un d’entre eux. Il s’appuya donc sur les accords de défense franco-gabonais pour sécuriser son pouvoir car ils lui permettaient de nommer un chef d’Etat-major français et de s’entourer au palais, d’officiers de même nationalité pour sa protection personnelle.

Omar Bongo nourrissait lui pour l’armée gabonaise, une ambition légèrement opposée à celle de son prédécesseur. Pour le jeune président de 32 ans, il était nécessaire, au moment de sa prise de pouvoir en 1967, d’apporter de réels changements dans la constitution de l’armée mais en y éloignant pas, les officiers français. Au début des années 1970, les forces de sécurité et de défense gabonaise vont connaître plusieurs modifications essentielles dont la gabonisation des postes de commandement et de gestion administrative. Pour moderniser ses services, le président Bongo s’assure qu’un service de santé des armées puisse voir le jour. Pour le diriger, il fait appel à des nationaux qui ont une connaissance non négligeable en matière de médecine militaire.

C’est ainsi qu’au courant de l’année 1978, Albert Ndjavé Ndjoy alors docteur en médecine militaire, est propulsé à la tête de la Direction générale de la santé militaire nouvellement mise sur pied. Il était dans le même temps, très proche de Georges Rawiri, le « deuxième » homme fort du pays, qui en fit bonne presse auprès de Bongo afin de faire de lui le patron de cette ladite entité. Pendant plus de 10 ans, Albert Ndjavé Ndjoy ne ménagea pas ses efforts pour développer cette nouvelle institution médico-chirurgicale rattachée au ministère de la sécurité nationale. Il en quitta la Direction durant l’année 1992 avec le grade de général des armées du service de santé militaire.

 Vie politique et souci judiciaire

Au début des années 1990, le Dr Albert Ndjavé Ndjoy fut nommé Conseiller personnel du chef de l’Etat par Omar Bongo lui-même, très satisfait de son travail et de son entente avec le natif d’Izolwè. En 1994, il intègre le gouvernement et se voit offert le poste de ministre délégué au Commerce puis deviendra ministre des Transports et de l’Aviation civile. Il a aussi été élu plusieurs fois député du 3ème siège du département de l’Ogooué et des lacs pour le compte du Parti démocratique gabonais (PDG) au pouvoir qu’il adhéra bien avant les années 1990.

Albert Ndjavé Ndjoy était aussi un membre éminent du bureau politique du PDG au sein de sa province du Moyen-Ogooué et vice-président de l’Assemblée nationale. A la mort de Georges Rawiri en 2006, il était pressenti pour le remplacer à la tête de la chambre haute du parlement mais il ne fut finalement pas choisi. A l’intérieur du parlement gabonais, le général Albert Ndjavé Ndjoy marqua les esprits de tous par ses interventions souvent pragmatiques et constructives.

En 2012, il était monté au créneau envers les élus de sa famille politique, les exhortant à cesser de plébisciter à tout va leur appartenance politique du fait que les quelques députés de l’opposition ne possédaient pas un groupe parlementaire. Notable et comptant parmi les doyens au sein de l’hémicycle, le Dr Ndjavé Ndjoy, avait clairement passer au scalpel, les habitudes égoïstes et improductives de ses collègues en expliquant lors d’une session plénière, que le Gabon gagnerait bien plus si toutes les forces politiques travaillaient de concert.

Bien qu’étant un homme discret et très méticuleux du fait de son éducation protestante, le général Albert Ndjavé Ndjoy connut quelques ennuis judicaires notamment celui qui le confrontait à une Société à responsabilité limité (SARL) appelée IDEES 2000. Le 1er décembre 1999, la Cour judiciaire de Libreville le condamne à verser à IDEES 2000, la coquette somme de 80 millions de Francs CFA en ajouts des intérêts à compter du rendu de la décision.

Pour rentrer en possession de son dû, ladite société entame une démarche de vente concernant deux propriétés de sieur Ndjavé Ndjoy. Ce dernier s’y oppose et introduit un recours au Tribunal de Première Instance de Libreville qui le rejette le 19 mars 2001. Le 15 décembre 2004, le plaignant interjette cette décision à la Cour d’appel judiciaire de Libreville. Après une véritable rixe judiciaire, le général Albert Ndjavé Ndjoy est finalement condamné à s’acquitter de sa dette donc à accepter, la vente de ses biens immobiliers saisis pour l’occasion.

 Fin de vie

Souffrant depuis un certain temps d’un cancer de la prostate, celui-ci s’est montré plutôt tenace durant les derniers jours de vie du général Albert Ndjavé Ndjoy. Notre docteur ne put malheureusement pas trouver la cure au mal qui le rongeait. Il rejoint ses nombreux ancêtres, morts avant lui, dans la nuit du samedi 16 au dimanche 17 octobre 2021 à l’Hôpital d’instruction des armées Omar Bongo de Libreville. Son décès avait accidentellement été annoncée prématurément, le mercredi 23 octobre 2021.

Au moment de l’officialisation de sa disparition, plusieurs membres de la classe politique gabonaise avaient salué la mémoire du défunt et s’étaient recueillis dans le deuil en particulier les hommes et les femmes de sa formation politique. Quand il fut enterré dans son village natal, le PDG dépêcha une délégation composée de sa secrétaire nationale chargée de l’animation politique dans la province du Moyen-Ogooué ainsi que le secrétaire provincial de cette partie du pays.

Plusieurs responsables administratifs et politiques de la région et d’ailleurs à l’instar du gouverneur du Moyen-Ogooué, vinrent eux aussi s’incliner une dernière fois devant la dépouille de celui qui fut le premier directeur général du service gabonais de santé militaire.

@info241.com
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