Séraphin Moundounga défenseur des aspirations démocratiques du peuple gabonais au Sénat français
La crise post-électorale gabonaise a fait l’objet d’une attention particulière à l’occasion du colloque du 03 novembre dernier à Paris dans l’hémicycle du Sénat, portant sur le thème : « L’Afrique est notre avenir, pour le pire ou pour le meilleur ? ». Un événement parlementaire organisé par le groupe UDI au Palais du Luxembourg, sous les auspices de Jean Marie Bockel, Sénateur du Haut-Rhin, ancien ministre, avec une conférence sur la crise électorale gabonaise animée par le Dr Séraphin Moundounga, ancien vice-premier ministre de la justice, Garde des Sceaux qui a diagnostiqué de l’intérieur, le processus électoral du 27 août dernier entaché selon l’Union Européenne « d’irrégularités évidentes. »
En présence de Jean Ping qui revendique toujours sa victoire avérée aux dernières élections présidentielles gabonaises et d’un parterre d’hommes politiques africains et français dont Lionel Zinsou, ancien Premier Ministre du Bénin, de Jacques Legendre, sénateur du Nord, président du groupe d’amitiés du Sénat France Afrique de l’Ouest, de Jeanny Lorgeoux, sénateur du Loir et Cher, de Rémy Rioux, directeur général de l’Agence Française de Développement..., le Dr Séraphin Moundounga a introduit son propos en mettant en exergue l’hypothèse selon laquelle l’avenir de l’Afrique est imbriquée avec celle de la France, de l’UE, des Nations Unies et du monde entier notamment dans la lutte contre le terrorisme, contre les guerres civiles, les dictatures présidentielles africaines qui empêchent l’installation durable d’un État de droit, contre la mauvaise gouvernance, mais aussi contre la bombe migratoire qui pèse sur l’Europe.
Selon l’ancien ministre de la justice qui a démissionné avec fracas du gouvernement présidé par Ali Bongo, en condamnant la mascarade électorale et les massacres du 31 août 2016, la recherche des solutions à tous ces épineux problèmes évoqués précédemment doivent être d’abord pensée et être à l’initiative de par « nous-mêmes les africains en consolidant nos institutions, avec le concours bien entendu de l’ensemble de la communauté internationale à promouvoir dans tous les États africains et dans toutes les instances régionales et sous régionales africaines, la paix démocratique ».
Poursuivant ses explications Dr Moundounga s’est fait l’écho du philosophe Emmanuel Kant et Michael Jung qui montrent que la paix démocratique est une visée essentielle dans leur théorie de la paix perpétuelle et l’intégration d’une démocratie qui est l’une des solutions idoine pour préserver la stabilité politique et endiguer la guerre. En effet, a expliqué l’ancien ministre de la justice gabonaise, « il est démontré dans le monde et l’Union Européenne ainsi que les États membres des Nations Unies sont bien placés pour le savoir que partout où les valeurs démocratiques sont promues, la paix s’installe durablement. Je ne veux pas le dire à la France et à l’Allemagne qui ont été les moteurs de la construction de l’Union Européenne qui ont œuvré par les conditionnalités politiques et l’élargissement de cet idéal européen au niveau de l’Europe de l’est et du centre ».
Pour l’ancien Vice-premier ministre démissionnaire , « il est plus qu’essentiel pour la coopération entre l’UE et l’Afrique que l’accord de Cotonou entre l’Union européenne et les États d’Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP) qui a été signé le 23 juin 2000 dans la capitale économique du Bénin, après l’expiration de la convention de Lomé ». Tout en rappelant à toutes fins utiles les dispositions et exigences démocratiques que doivent intégrer tous les Etats africains à l’instar du Gabon, signataires de l’accord de Cotonou qui comprend cinq axes. Premièrement, en conformité avec les prescriptions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), il vise désormais prioritairement à intégrer les pays ACP dans l’économie mondiale en libéralisant les échanges. L’accord met notamment fin au Stabex et au Sysmin, mécanismes de stabilisation des prix qui garantissaient les recettes des exportations des pays ACP pour les produits agricoles (Stabex) et pour les produits miniers (Sysmin), du moins sous les formes qui étaient les leurs depuis 1975.
Deuxièmement, l’aide n’est plus automatique et dépend de la réalisation de performances (réformes institutionnelles, utilisation des ressources, réduction de la pauvreté, mesures de développement durable…). Chaque pays dispose d’une enveloppe qui couvre l’aide programmée sur la base d’une stratégie de coopération nationale (SCN). L’aide se voit ainsi conditionnée. Troisièmement, la lutte contre la pauvreté, objectif central de l’accord, mêle les dimensions politiques (coopération régionale), économiques (développement du secteur privé, réformes structurelles et sectorielles), sociales (jeunes, égalité des chances), culturelles et environnementales de chaque pays.
Quatrièmement, les populations concernées doivent être informées et consultées afin d’accroître la participation des acteurs économiques, sociaux et associatifs locaux à la mise en œuvre des projets. Et enfin, le cinquième axe dispose qu’un « dialogue politique » est prévu sur toutes les questions d’intérêt mutuel, aussi bien au niveau national, régional ou du groupe ACP. Des procédures sont instituées en cas de violation des droits de l’homme ou de corruption, notamment la suspension de l’aide. Et que toutes ces dispositions doivent s’appliquer à la situation de crise post-électorale que traverse le Gabon depuis le 31 août 2016.
Retrouvez l’intégralité de la conférence du Dr Seraphin Moundounga au Sénat français.
Posant son curseur sur le processus électoral gabonais, le Dr Séraphin Moundounga a martelé que le cas du Gabon est d’une spécificité rare à son genre du fait du non-respect criard de la vérité des urnes, des institutions républicaines, eu égard la grossièreté et l’absurdité de la fraude orchestrée au soir du 27 août dernier. Dont rappelons-le, il a été un des acteurs majeurs puisque selon ses explications, « en tant que ministre de la justice, il avait été chargé par le pouvoir en place, de venir annoncer sur la place publique, la supercherie grotesque fomentée par Ali Bongo et son régime visant à faire croire que la centralisation des résultats sur des documents manuels par hackers ivoirien ».
Battant en brèche d’être l’instigateur d’une telle ignominie a fait remarquer M. Moundounga, « c’est dans ce contexte que j’ai invité le candidat Ali Bongo Ondimba à se conformer à l’unique exigence démocratique du recomptage de voix, appelée de tous leurs vœux par l’Union Européenne dont le Gabon a permis de son propre chef, une mission d’observation sur place qui a été mise sur écoute en violation de la loi sans réglementation, sans oublier l’organisation des Nations Unies et toutes les institutions démocratiques, ce que le pouvoir de Libreville a refusé ostentatoirement au mépris du respect de la volonté populaire gabonaise ».
D’où, a conclu l’ancien Garde des sceaux gabonais, « il ne s’agit pas comme je l’entends lors de mes échanges avec les partenaires français et européens, d’une affaire familiale entre Jean Ping et Ali Bongo Ondimba qui se discuterait un prétendu héritage. Mais il s’agit d’une lutte pour le peuple gabonais de réaliser son idéal démocratique républicain. Aujourd’hui, le Gabon est plongé dans une crise politique majeure, toutes les libertés publiques et fondamentales sont bafouées, les enlèvements et arrestations arbitraires sont perpétués tous les jours par le pouvoir tyrannique et sanguinaire en place, le récent exemple de l’arrestation musclée des journalistes de la rédaction d’Echos du Nord en est l’illustration ».
Tout en insistant, « qu’il va de la responsabilité de l’Union Européenne en général et de la France en particulier d’aider à la promotion des valeurs démocratiques et à l’instauration d’un Etat de droit qui faciliterait des échanges économiques et une coopération compétitive entre États. Non pas en se substituant aux africains et aux gabonais particulièrement qui sont engagés à réaliser le travail de terrain pour le respect de sa souveraineté nationale et de son droit de révoquer et d’élire son président de la république effectué par le peuple gabonais sur place et dans sa diaspora ».
Chose espérer que ces explications d’un ancien membre fort du régime qu’il conteste aujourd’hui, témoin oculaire des dernières joutes électorales gabonaises puissent éclairer davantage les élus français et européens qui semblent suffisamment avertis sur la crise post-électorale au Gabon afin de lever toutes les suspicions qui entourent cette situation alarmante dans laquelle le peuple gabonais est plongé. En attendant le rapport final de la mission d’observation de l’Union Européenne, le peuple gabonais entier et sa diaspora semblent engagés à lutter contre ce que les opposants du régime d’Ali Bongo Ondimba, sous le leadership de Jean Ping qualifient de coup d’état militaro-électoral, afin de réaliser une alternance démocratique en toute quiétude au Gabon. Affaire à suivre !
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