Omar Bongo, 16 ans après : Mémoire d’une nation confisquée, pillée et oppressée pendant 56 ans !

Ce dimanche 8 juin marque le 16e anniversaire de la mort d’Omar Bongo Ondimba, ancien président du Gabon, décédé en 2009 à Barcelone. Une date que certains, notamment au sein du Parti démocratique gabonais (PDG), continuent de commémorer dans le recueillement. Mais pour une large partie de l’opinion gabonaise, ce souvenir résonne davantage comme un soulagement historique que comme une occasion de deuil national. Car Omar Bongo, c’est d’abord plus de quatre décennies d’un pouvoir absolu, centralisé, clientéliste et profondément inégalitaire.

Un personnahge hors pair
Né Albert-Bernard Bongo le 30 décembre 1935 à Lewai, devenu Bongoville sous sa présidence, il entame sa carrière politique dans l’ombre de Léon Mba, premier président du Gabon. Après la mort de ce dernier en 1967, il accède au pouvoir à seulement 32 ans, avec le soutien appuyé de la France. Converti à l’islam en 1973 sous l’influence du colonel Kadhafi, il change de nom pour devenir Omar Bongo. En 2003, il y ajoute « Ondimba » dans un virage identitaire et nationaliste opportun. Mais derrière ces évolutions, l’homme reste fidèle à lui-même : autoritaire, calculateur et indétrônable.
Omar Bongo serrant les mains des plus grands du monde
Il dirigera le Gabon durant 41 ans sans discontinuer, imposant une vision personnelle de l’État comme prolongement de sa volonté. Aucun contre-pouvoir n’y survivra. Son règne prendra fin de manière indirecte, 14 ans après sa mort, lorsque son fils Ali sera renversé à son tour le 30 août 2023, par un coup d’État militaire. Le clan Bongo, qui aura régné pendant 56 ans, incarne désormais pour de nombreux Gabonais une page noire de l’histoire nationale.
Des présidentielles gagnées d’avance
Officiellement, Omar Bongo a « remporté » six élections présidentielles : en 1973, 1979, 1986, 1993, 1998 et 2005. Les trois premières ont lieu sous le régime du parti unique, quand le PDG régnait seul sur la scène politique. Avec le retour du multipartisme en 1990, le président adapte son système : la façade démocratique s’installe, mais le fond reste verrouillé. Les scrutins suivants sont émaillés de fraudes, de violences électorales, d’achats de consciences et de manipulations institutionnelles.
Un patriarche de la gagne électorale
L’arme fatale de ce dispositif reste la Cour constitutionnelle, alors présidée par sa compagne, Marie-Madeleine Mborantsuo, qui a validé sans ciller toutes ses « victoires » électorales. Ce verrou judiciaire neutralise toute contestation sérieuse. Résultat : aucune alternance, aucune surprise. Seul son décès mettra fin à cette mécanique huilée qui transformait chaque élection en formalité.
Un boom pétrolier, signe de fortune personnelle
Sous Omar Bongo, le Gabon devient une puissance pétrolière régionale, notamment grâce aux réserves offshore du golfe de Guinée. Mais au lieu de transformer cette manne en développement national, le président en fait une rente privée. Il prélève 18 % des recettes pétrolières de l’État à titre personnel, un détournement légalisé qui lui permettra d’amasser une fortune colossale, aujourd’hui diluée entre 54 héritiers officiellement reconnus.
Pendant ce temps, les infrastructures publiques stagnent, les inégalités explosent, et l’éducation comme la santé publique s’effondrent. Le pétrole, au lieu d’enrichir le pays, devient l’outil central d’un système de clientélisme politique, où la loyauté s’achète et l’opposition se punit. Le pouvoir devient un patrimoine, distribué entre les fidèles et consolidé par la misère organisée du plus grand nombre.
Un sage de la Françafrique
Omar Bongo excellait dans l’art de la diplomatie africaine. Il s’affichait comme un sage, un « père de la nation », un médiateur régional. En coulisses, il était le produit parfait de la Françafrique, jouant habilement des réseaux parisiens pour préserver son trône. En échange de contrats, de stabilité apparente et d’allégeance diplomatique, il obtenait la bienveillance des puissances étrangères, malgré les dérives de son régime.
Ici avec le président français de l’époque Chaque Chirac
Cette stabilité vantée par ses soutiens extérieurs cachait un autoritarisme rampant, un refus obstiné de réformes, et un culte du pouvoir où seul le clan comptait. En désignant son fils Ali comme successeur, il montrait clairement que son ambition n’était pas de servir la République, mais de fonder une monarchie républicaine, soutenue par l’appareil d’État qu’il avait entièrement façonné à son image.
Un héritage controversé
Ce 8 juin, le Gabon ne commémore pas un sage, mais un homme dont le règne a bloqué la marche du pays vers la modernité. Seuls les cadres nostalgiques du PDG, quelques notables enrichis par son système, et des héritiers du pouvoir perdu se prêteront à l’exercice du souvenir. Pour la majorité des Gabonais, la mort d’Omar Bongo n’a jamais été une tragédie, mais plutôt une opportunité manquée de changement, vite reprise en main par son fils.
Son héritage est lourd, non pas de réformes ou d’œuvres concrètes, mais de corruption, de dépendance économique, de démobilisation citoyenne. Il est temps de regarder en face ce qu’a été le règne d’Omar Bongo : un long tunnel d’autoritarisme habillé d’apparences démocratiques. Le Gabon ne pourra se reconstruire qu’en tirant les leçons de cette ère, et en refusant d’idéaliser ceux qui ont confisqué pendant trop longtemps le destin d’un peuple.
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