Résultats Présidentielle du 12 avril 2025
Rapport

Gabon : Briser le tabou des violences faites aux femmes, un phénomène tabou

Gabon : Briser le tabou des violences faites aux femmes, un phénomène tabou
Gabon : Briser le tabou des violences faites aux femmes, un phénomène tabou © 2025 D.R./Info241

Les derniers résultats de l’enquête (2024) de l’ONG Aurore sont tombés. Au Gabon, sur 900 cas de violences faites aux femmes, 500 ont abouti à un procès. Zoom sur le phénomène.

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Pourquoi la société gabonaise malgré les campagnes de sensibilisation et tout un arsenal juridique à travers notamment la loi n°006/2021 du 06 septembre 2021 portant élimination des violences faites aux femmes, ne parvient-elle pas éradiquer le phénomène ? Le site du ministère des Affaires sociales reconnaît que le phénomène devient une « urgence nationale ». Au Gabon, les femmes sont victimes de « 90 % des violences sexuelles ; 83 % des violences économiques et de 64 % des violences physiques » à un moment de leur vie.

En réalité, une multitude de facteurs entrent en jeu. En premier lieu, des facteurs culturels. En effet, les conceptions patriarcales et sexistes confèrent une légitimation à la violence. L’objectif est, pour la gente masculine, d’assurer sa domination et sa supériorité, notamment à travers la cellule familiale. C’est en partie l’idée défendue par la thèse de Nauria Yamba Namandzia (2021), qui met en avant l’idée de consécration familiale et d’honneur du lignage. C’est ce qui explique en très grande partie que les violences faites aux femmes sont considérées comme un tabou, du fait qu’elles sont pour la plupart d’origine familiale. Vient se greffer le faible signalement des violences et une importante autocensure des victimes. Cela provient de la pression du milieu familial et social, pouvant dissuader de porter plainte.

Deuxième élément : le facteur juridique. Passé le stade de la prise de conscience, l’application juridique des textes votés prend du temps. La loi gabonaise de 2021 est encore jeune et la période de transition politique n’a guère été propice à son application. Par ailleurs, rares ont été les pays africains, à l’image du Gabon, à signer la Convention d’Istanbul (2011) qui garantit le droit de chacun de vivre à l’abri de la violence, aussi bien dans la sphère privée que dans la sphère publique.

Quid des féminicides ?

Aux facteurs culturels et juridiques, s’additionne celui d’un manque de ressources budgétaires pouvant se combiner à des problèmes de gouvernance et à l’inertie de l’administration et des pouvoirs locaux. De fait, ceux-ci diluent fortement la force de frappe de l’État contre les violences. C’est en partie le cas pour les femmes et personnes en situation de vulnérabilité. Un phénomène exacerbé au sein de milieux modestes. En effet, lorsque le chômage et la pauvreté touchent les hommes, certains peuvent être tentés d’affirmer leur masculinité par des actes de violence.

Quatrième et dernier facteur : la représentation des femmes au pouvoir et en politique. Le nouveau gouvernement gabonais formé en mai 2025, sous la présidence de Brice Oligui Nguema, marque une progression notable en matière de représentation féminine, avec 11 femmes ministres sur 30. Si cette présence féminine reste encore en deçà d’une parité parfaite, elle témoigne néanmoins d’une volonté affichée d’accroître la visibilité des femmes dans les sphères décisionnelles. Plusieurs femmes occupent des portefeuilles stratégiques, à l’image de Camelia Ntoutoume-Leclercq au ministère d’État de l’Éducation nationale, Brigitte Onkanowa à la Défense nationale, ou encore Louise Ovono à la Planification et à la prospective.

Reste que le phénomène des violences faites aux femmes est loin d’être éradiqué : « Il y a quelques années, on ne parlait pas de féminicide, mais en 2024, nous avons eu près d’une quinzaine de cas. Durant l’année 2025, nous avons déjà eu deux cas de féminicide, deux femmes qui sont décédées le même jour  », dénonce l’ONG Aurore, très inquiète de l’émergence de ces crimes.

« La famille qui devrait être le lieu de sécurité, est malheureusement le lieu des plus grandes violences aujourd’hui », a déploré Honorine Nzet Bitéghé, ancienne ministre et présidente de l’Observatoire des droits de la femme et de la parité (ODFPA).

@info241.com
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