Portrait

Jean-Hilaire Aubame Eyéghé, un des chantres de l’indépendance du Gabon

Jean-Hilaire Aubame Eyéghé, un des chantres de l’indépendance du Gabon
Jean-Hilaire Aubame Eyéghé, un des chantres de l’indépendance du Gabon © 2022 D.R./Info241

Au début des années 1910, la toute nouvelle colonie du Gabon qui a été séparée du Congo français qu’elle constituait avec le Moyen-Congo jusqu’en 1906 est dorénavant sous la direction du gouvernement général de l’Afrique équatoriale française (AEF) pilotée depuis Paris, la Métropole. Deux ans plus tard, un épigone des « Bâtisseurs de Républiques » à l’instar du l’ancien premier ministre français Michel Jean-Pierre Debré du 8 janvier 1959 au 14 avril 1962 et du 6ème président des Etats-Unis d’Amérique de 1967 à 1848, John Quincy Adams, reconnu sur son acte d’Etat-civil sous le nom de Jean-Hilaire Aubame Eyéghé (1912-1989), débuta son incroyable et rocambolesque parcours de vie.

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Après avoir été morigéné dans les missions catholiques, il y reçoit dans le même temps l’enseignement nécessaire pour être gratifié du statut d’évolué indigène. Travailleur brillant aux compétences avérées, il fait carrière dans l’administration coloniale dans laquelle son pays est placée sous tutelle. Après la libéralisation en 1946 de la vie politique et associative des colonies africaines de « Marianne » qui sont désormais formalisées en territoires d’Outre-Mer de la République française, Jean-Hilaire Aubame Eyhéghé regagne son pays et débarque dans l’arène politique de celui-ci en créant son organisation, l’Union démocratique et sociale gabonaise (UDSG), avec un désir de grandes ambitions pour sa patrie après avoir aidé Paris à triompher de l’armée nazie en s’engageant dans la France Libre.

L’illustre disparu

Les années passent et le natif de Libreville, devenu un des locataires du palais de « Bourbon », domine la scène politique gabonaise avec l’appui des missions, de l’administration coloniale en ajout des religieux européens et locaux, bien qu’ayant Paul-Marie Indjendjet Gondjout et Léon Gabriel Mba Minko comme adversaires directs. Mes ces deux poids-lourds de la politique réussiront, par des malversations tordues, à faire de leur formation politique, le Bloc démocratique gabonais (BDG), la première entité politique du territoire lors des échéances électorales des années 1950 notamment celles de 1956.

Jean-Hilaire Aubame, chantre incontesté d’un régime parlementaire, soutiendra le « oui » lors du référendum constitutionnel de 1958 dans le but de faciliter, non sans être sous le joug de la France, l’accession du Gabon à la souveraineté internationale. Il sera emprisonné et tenaillé par la suite en raison de son opposition à l’autocratie que voulut imposer Léon Mba une fois porté à la tête de la nation. C’est assurément l’un des motifs qui justifiera sa participation au putsch de 1964.

 Accouchement et accueil

La mère de Jean-Hilaire Aubame Eyéghé le mit au monde le 12 novembre 1912 dans un village des environs de Libreville, principale circonscription du Gabon français qui lui était une colonie du gouvernement général de l’Afrique équatoriale française (AEF). Le jeune Aubame fut trouva refuge à l’âge de 11 ans à la mission catholique Saint-Paul de Donguila.

Il venait de perdre sa maman qui s’était vue, arracher à son affection, son époux au moment où le petit n’avait que 8 ans. Cette information pourrait bien indiquer que Jean-Hilaire Aubame était originaire d’un des villages contigus à ladite mission. Ce qui nous pousse à dire qu’il serait dans l’espace géographique qui constitue aujourd’hui le département du Komo-Mondah. Ses parents étaient tous les deux issus de la communauté Fang.

 Enseignement et éducation

A la mission de Donguila, Jean-Hilaire Aubame y est élevé dans la strict éducation catholique prônant le respect, le la discipline et l’intégrité. Un enseignement européen et républicain lui est aussi inculqué afin de maîtriser les outils d’expression et d’écriture de la langue de Molière. Lorsqu’il a 14 ans, il fait la connaissance au sein de la mission de l’abbé Jean Obame qui n’était autre que le demi-frère de Léon Mba. Sous sa protection, Jean-Hilaire Aubame sera conseillé et guidé par ce catholique autochtone qui le couva comme son propre fils. Ils ne passeront qu’une année ensemble mais deviendront extrêmement proches.

En 1927, le jeune Jean-Hilaire est envoyé au Séminaire Saint-Jean implanté à Libreville grâce à son mentor, l’abbé Obame, qui s’assure de la réussite de son protégé bien-aimé. Jean-Hilaire Aubame y poursuit sa scolarité et se forme pour devenir un agent de pédagogie. Il finira par devenir instituteur. Il fut, entre autres, titulaire du très respecté Certificat d’études primaires indigènes (CEPI), précieux sésame académique de l’époque en ces temps en particulier pour les populations autochtones des anciennes colonies françaises d’Afrique. Le père Jérôme Mba ainsi que le ainsi que le révérend père Marcel Lefebvre participèrent aussi à l’éducation du jeune Jean-Hilaire.

 Début de carrière professionnelle et premières luttes sociales

Son parchemin d’instituteur en poche, Jean-Hilaire Aubame décline son ambition de faire carrière dans l’enseignement et opte pour un parcours professionnel administratif. Il intègre l’administration coloniale le 24 mars 1931 pour y travailler dans le service des douanes. Son recrutement fut rendu possible par l’implication personnelle de Léon Mba qui occupait les importantes fonctions de chef de canton de Libreville Nord, Assesseur titulaire au Tribunal indigène de 1er degré avec voix délibératoire, chef du quartier « Mont-Bouët » et suppléant titulaire à la commission municipale de Libreville.

En effet, Contacté par son frère, l’abbé Jean Obame, pour facilement trouver un emploi a son « fils bien-aimé, Léon Mba matérialisa la requête de son consanguin ; sieur Mba connaissait également le jeune Jean-Hilaire avec qui il échangeait très souvent. Jean-Hilaire Aubame débute sa carrière d’abord sur place à Libreville où il passera près de quatre ans en poste. Puis, il est envoyé en 1935 sur le territoire de l’Oubangui-Chari-Tchad dans la ville de Bangui.

Notons qu’à cette période, l’actuelle République du Tchad et celle de Centrafrique étaient toutes les deux insérées dans le territoire sus cité. L’année d’après, il est affecté à Brazzaville. Arrivé dans cette ville qui abritait la capitale du gouvernement général de l’AEF, Jean-Hilaire Aubame croise le chemin d’un gabonais qui partageait des liens de parenté avec Louis Emile Bigmann Indjono, cousin du capitaine Charles N’Tchoréré et futur président de l’Assemblée nationale du Gabon du 12 février 1961 au 25 avril 1964.

Ensemble, ils mettent en place une représentation de la Mutuelle gabonaise. En effet, celle-ci avait été créée à Libreville en 1934 par des « instruits » gabonais de couleur noire pour lutter contre les avantages alloués à la communauté « métisse » par l’administration coloniale et la discrimination de celle-ci à leur égard. Tout commence en 1933 quand les enfants métissés de Libreville fondent une mutuelle appelée « L’Amical des métis » visant à apporter assistance aux moins nantis d’entre eux et à favoriser leur essor social par l’instruction.

Ladite communauté sous la direction de Joseph-Gaston Walker Deemin, forestier français domicilié à Libreville, sans mauvaise intention aucune, adresse des correspondances de demande de soutien au gouvernement général et se voit accorder plusieurs privilèges notamment une propriété forestière. La situation prend une autre tournure quand le 15 janvier 1936, François-Joseph Reste, gouverneur-général de l’AEF, promulgue une prescription spéciale à l’endroit de la population « métisse » leur donnant plus facilement accès aux établissements européens, d’acquérir plus rapidement et plus facilement la nationalité française ou encore de d’accéder à des postes normalement réservés aux Occidentaux.

En 1943, les autorités coloniales vont plus loin en faisant sortir de terre, un complexe du nom de « Le Cercle des métis » comprenant une salle des fêtes et une bibliothèque. C’est ainsi que Jean-Hilaire Aubame et d’autres gabonais « non métis » instaurèrent cette « Mutuelle gabonaise » pour ceux-là qui étaient les plus nécessiteux à la quête d’une aide quelconque. Dans le même temps, notre ancien élève du séminaire Saint-Jean rejoint l’Association des fonctionnaires et Jean-Rémy Ayouné, cadre supérieur des expéditionnaires comptables et futur ministre de la Fonction publique et de la Coopération technique de 1966 à 1968 ainsi que des Affaires étrangères et du Tourisme du 4 juillet 1968 au 29 juin 1971 entre autres. Au sein de ladite organisation, Jean-Hilaire Aubame et ses compatriotes bataillent pour améliorer le statut et les conditions des travailleurs indigènes de l’administration aéfienne.

 Appel au devoir et suite de l’office professionnel

Alors qu’il est en poste à Brazzaville en 1940, le second plus grand conflit planétaire débute en Europe. En juin 1940, le Troisième Reich envahit la France. Les autorités allemandes contraignent leurs homologues français à signer un armistice dans lequel Paris serait dorénavant dirigé par les patrons nazis. Le général Charles André Joseph Marie de Gaulle s’y oppose et prend la fuite vers Londres. Sur place, il véhicule un message via la station britannique « BBC » invitant les ingénieurs, militaires et ouvriers français spécialistes de l’armement qui étaient présents sur le sol britannique à se rapprocher de lui pour poursuivre le Gabon contre les allemands.

C’est l’historique « Appel du 18 juin » prononcé à la même date de l’année 1940. Le général De Gaulle instaure alors un régime de résistance qu’il qualifiera de « France libre » demandant aussi aux français et amis de la France présents dans la Métropole, les départements d’outre-mer, les colonies françaises administrées sous la forme de territoires d’outre-mer, territoires associes et les Etats associés (respectivement sous mandat et sous protectorat) à le rejoindre pour la libération du pays. Jean-Hilaire Aubame, sensible à l’appel du Général, met ses compétences au service de la résistance française.

Il lui est fait injonction de rentrer dans sa patrie de naissance et de convaincre les populations notamment les hommes, pour qu’ils s’engagent dans l’armée coloniale afin de combattre au nom de la France libre pour annihiler l’invasion que la Métropole subit. Par centaines, des jeunes gabonais se rallient à la cause du colonisateur. Jean-Hilare lui est promu administrateur pour le compte de l’AEF. Il est rédacteur des services administratifs et financiers.

Du 30 janvier au 8 février 1944, Jean-Hilaire Aubame se rend à Brazzaville pour prendra à la conférence de Brazzaville organisée par le Comité français de la Libération nationale (CFLN) composé de la France libre du Général Charles de Gaulle et du commandement en chef français civil et militaire d’Alger dirigé par le général Henry Honoré Giraud. Le futur et l’utilité de l’empire colonial français sont les principales thématiques qui y sont développées.

Pendant qu’il se trouve à Libreville en février 1942, il se lie d’amitié au gouverneur-général de l’AEF, Adolphe Sylvestre Félix Eboué, qui en fait un de ses collaborateurs ; Aubame fournissait de précieuses informations à Félix Eboué concernant certains dossiers africains. Pour lui montrer toute sa reconnaissance, le gouverneur-général nomme Jean-Hilaire Aubame à son cabinet basé à Brazzaville, non pas sans avoir veillé à ce qu’il soit promu, le 23 février 1943, fonctionnaire ayant le même statut que les européens de la fonction publique de l’administration coloniale.

Ce rapprochement avec le patron de l’AEF donna à notre protagoniste, une importante stature. Il était désormais défini comme un indigène de haut-rang mais aussi comme un indigène « privilégié », ce qui lui permit d’être à la tête de la commune indigène de « Poto-Poto » en dirigeant la présidence de sa Commission municipale du 1er janvier 1944 au 10 novembre 1946. Mais hélas, Jean-Félix Eboué disparut durant le mois de mars 1944 et Jean-Hilaire Aubame fut très brisé. Mais il releva la tête et continue son aventure professionnelle.

Le nouveau gouverneur général, Ange Marie Charles André Bayardelle, tenait à continuer à travailler avec le gabonais. Même son secrétaire général, Jean-Louis Marie André Soucadaux, était sous son charme. Il fut nommé alors conseiller au sein du gouvernorat général. Fréquentant les salons feutrés de la ville de Brazzaville, capitale de l’AEF, ainsi que les cadres indigènes et européens, Jean-Hilaire Aubame était respecté et rendait fier les populations de chez lui qui voyait en Aubame, un digne, brillant et intègre représentant du Gabon.

 Débuts difficiles en politique

Paris connaît sa délivrance entre le 19 et le 24 août 1944. Quand la Guerre prend fin en 1945, les autorités françaises repensent les politiques de gestion de leurs colonies dont les hommes ont participé en grand nombre à l’effort de guerre. Un nouveau référendum est adopté et encadre les contours politiques de la 4ème République nouvellement née autour la nouvelle organisation structurelle dénommée L’union française. Elle permet notamment aux anciennes colonies formalisées en territoires d’outre-mer de s’émanciper politiquement en leur accordant le droit d’instaurer un environnement politique digne de ce nom.

En 1945 au Gabon, un premier parti politique, le Parti démocratique gabonais (PDG), existe déjà et est l’œuvre de Aristide Edgar Issembe Tchango, ancien fonctionnaire de l’AEF et premier ambassadeur du Gabon indépendant. Il l’a créé alors qu’il est en mission à Bangui pour le compte de l’AEF. Paul-Marie Indjendjet Gondjout, un écrivain-interprète et expéditionnaire-comptable d’un cadre supérieur de l’AEF, en était le vice-président.

Une fois, Emile Issembe en perte d’aura politique en raison de ses nombreuses défaites électorales avec son Parti démocrate gabonais (PDG), Paul Gondjout, aussi membre du PDG, facilitera le changement de paradigme politique dudit parti en usant de son influence pour qu’il soit renommé en Parti démocrate et africain (PDA). Cependant au courant de l’année 1945 après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, on assiste à l’instauration d’une Assemblée constituante pour redynamiser et redessiner le « faciès » politique français. Les populations autochtones pouvaient dès lors élire leurs représentants.

Ce profond bouleversement institutionnel aura pour conséquence l’implication des « évolués » autochtones dans les décisions politiques de bien plus grande portée. C’est ainsi que Léon Mba créera son parti, le Comité mixte gabonais (CMG), le 12 août 1946 après son retour d’exil en Oubangui-Chari-Tchad. En fait, le CMG tire son origine du Comité fang (CMF). Edouard Nguéma l’avait mis en place pour faire office de « droit de réponse » à l’ethnie Mpongwè, branche de la communauté « Gwémyènè », qui elle avait créé son Comité Mpongwè par l’entremise de jeunes instruits indigènes et auxiliaires de l’administration coloniale issus de la communauté susmentionnée à l’exemple de Frédéric Moreau, du prince Félix Adandé Rapontchombo ou encore de Amaka-Dassy.

Le CMG serait devenu ensuite le Comité mixte franco-gabonais (CMFG) puis aurait pris le nom qu’on lui connaît ; Léon Mba l’aurait appelé ainsi pour se rapprocher de l’administration coloniale avec qui il voulait pacifier les relations. Bien avant cela, Léon Mba revint une première fois au Gabon en 1945 mais ce n’est qu’en 1946 qu’il s’y réinstalla définitivement. Le CMG peut être historiquement considéré comme le premier parti national gabonais en raison de la pluralité ethnique de ses membres et le mouvement « Jeunesse gabonaise » est quant à lui créé en 1922 par Laurent-Cyr Antchouey et Louis-Emile Bigmann et comptait dans ses rangs Benoît Ogoulala Iquaqua Djemba originaire de Port-Gentil, Michel Fanguinovény de Lambaréné et le même Léon Mba de Libreville.

Ledit mouvement peut par extension, être considéré comme le premier parti politique du Gabon. Par ailleurs, Jean-Hilaire Aubame, attendra le 9 septembre 1947 pour emboîter le pas et donnera à sa formation politique le nom de l’Union démocratique et sociale gabonaise (UDSG). Adepte du social-libéralisme et de la social-démocratie, il s’inspira évidemment du parti français, l’Union démocratique et socialiste de la résistance (UDSR) de René Pleven et de François Mitterrand, pour structurer son organisation. Le premier scrutin auquel Jean-Hilaire Aubame prendra part se déroula le 21 octobre 1945.

Il s’agissait de l’élection au sein l’Assemblée nationale constituante qui permettait dorénavant à un élu local d’un territoire africain de siéger au Parlement français. Lors de cette échéance électorale, Jean-Hilaire Aubame est défait au second tour par Jean-Félix Tchicaya, écrivain, instituteur et commis de finances à l’AEF, qui devient député au sein de l’hémicycle de la Métropole. L’élection suivante, la même scène se répète. En dépit de ses nombreux soutiens, le préféré de l’abbé Obame ne parvient pas au cours de ces deux échéances électorales à être élu au sein de la représentation du peuple en Hexagone.

 Le parcours du parlementaire du palais Bourbon

Après l’application du référendum portant création de l’Union française, le Moyen-Congo (actuelle République du Congo) et le Gabon français obtiennent désormais un siège chacun, les deux régions étant maintenant séparées en deux circonscriptions distinctes. Notons que lors des précédentes élections, le Gabon et le Moyen-Congo représentait une seule circonscription électorale en raison de leur population qui était moindre. Ils disposaient de deux sièges dont un pour le collège des citoyens français métropolitains et un autre pour les non citoyens originaires de ces territoires.

Le nouveau scrutin du 10 novembre 1946, dans lequel le Gabon constitue une circonscription, voit Jean-Hilaire Aubame être élu député au parlement français grâce à son affiliation à la Section française internationale ouvrière (SFIO), un parti politique de mouvance socialiste qui fusionna avec l’Union des clubs pour le renouveau de la gauche (UCRG) et donna naissance au Parti socialiste (PS) lors du congrès d’Issy-les-Moulineaux du 11 au 13 juillet 1969.

Jean-Hilaire devient ainsi le premier gabonais à siéger au sein du palais de Bourbon en remportant le scrutin avec 7069 voix sur 12 528. Mais son principal challenger, Emile Issembè du PDG, accusa ouvertement Aubame d’avoir eu recours à des malversations d’escobarderie et d’avoir bénéficié d’un soutien illégal de plusieurs chefs de districts et de subdivisions. Son élection fut donc entachée de graves soupçons de fraude mais tout de même validée.

Les élections législatives du 17 juin 1951 portent de nouveau Jean-Hilaire Aubame en triomphe car il est réélu à l’Assemblée nationale constituante en regroupant 17329 voix sur un total de 29203 voix. Près de sept mois après cette réélection, le natif de l’Estuaire est de nouveau le grand gagnant du scrutin législatif du 2 janvier 1956. Au cours de celui-ci, il se présente en indépendant et affronte Léon MBa puis le bat. Ce qui lui permit d’intégrer, pour la troisième fois consécutive, la nouvelle équipe législative de France.

Sur les 57031 voix, Aubame obtint 26712 voix. Au sein de l’hémicycle, Jean-Hilaire Aubame s’est toujours investit au profit de l’autonomisation des Etats africains et l’unification des peuples en votant par exemple la création d’un conseil de l’Europe lors de la session parlementaire du 9 juillet 1949 ou encore celle du 27 août 1947 portant sur l’indépendance de l’Algérie ; il se prononce à nouveau sur l’Algérie le 12 mars 1956 pour lui accorder un statut spécial.

Il mena plusieurs débats dans des commission sur la navigation, de la presse, de la communication, du travail et de la sécurité sociale lors de son premier mandat. Jean-Hilaire Aubame s’est aussi beaucoup investi dans l’amélioration des conditions de vie et de travail des africains. Il n’hésitait pas à proposer à l’Assemblée, des voies de sortie crise face aux nombreuses difficultés que rencontraient les populations africaines trop longtemps négligées.

Il n’hésitait aucunement à plébisciter la fixation d’une rémunération minimale sur l’ensemble des territoires d’outre-mer. Il votera d’ailleurs un projet de loi s’y rapportant. Ses positions au sein de l’Hémicycle l’ont davantage rapproché des groupes parlementaires d’aspirations africaines. Jean-Hilaire Aubame s’allia logiquement à eux notamment au sein du groupe parlementaire des Indépendants d’outre-mer (IOM) collaborant étroitement avec le député des indépendant d’outre-mer et secrétaire d’Etat à la présidence du conseil dans le gouvernement de Edgar Faure, Léopold Sédar Senghor.

Il a notamment été vice-président dudit groupe parlementaire, durant près de deux ans, avant d’en devenir président en 1955. Il proposera, entre autres, une loi relative à l’augmentation du nombre de représentation d’élus d’outre-mer au sein de la Conseil économique. Ces autres projets de loi primordiaux furent la fédéralisation de la République française comprenant les Etats d’outre-mer, l’urbanisation et la modernisation des villes des territoires africains (création d’un régime de communes de plein droit en lieu et place de celles de moyen exercice ou de communes mixtes) de France ainsi que l’établissement d’un code du travail au sein de ceux-ci. Le député originaire du Gabon fut aussi plusieurs fois secrétaire de la commission de la marine marchande et des pêches. Il fut député au palais Bourbon jusqu’au 15 juillet 1959.

 Mba et Aubame : les origines du mal

Tout d’abord, il a lieu de préciser que Léon Gabriel Mba Minko et Jean-Hilaire Aubame étaient tous deux Fang, une importante communauté ethnique qui s’établit principalement au cours de leurs migrations, dans l’actuelle terre gabonaise, au nord, au centre mais aussi dans l’Estuaire. Léon Mba voyait en Jean-Hilaire Aubame, un benjamin promis à un avenir somptueux car lors du cursus de ce dernier, il ne faisait aucun doute qu’il avait de les capacités intellectuelles requises pour faire partie du prestigieux cercle des « sachants » autochtones de cette époque.

De plus, c’est le frère du futur premier président gabonais, l’abbé Jean Obame, qu’il pris sous son aile Jean-Hialire et le présenta à Léon Gabriel. Quand il eut fini ses études indigènes, c’est Léon Mba alors chef de canton d’une section de Libreville et assesseur titulaire du Tribunal indigène de Libreville de 1er degré, qui orchestra le début de carrière du perspicace Jean-Hilaire Aubame au sein de l’administration coloniale. Mais, sieur Mba deviendra très vite persona non grata au sein de l’administration coloniale et des responsables religieux notamment des prêtres catholiques. Pire encore, même ses propres congénères « Fang » le désavouaient. Jean-Hilaire Aubame était lui bien plus apprécié, aimé et soutenu que son aîné.

Pour y voir plus clair, remontons en 1920. A cette époque, Léon Gabriel a 18 ans d’âge et est pressenti pour être un clairvoyant agent de l’administration coloniale. Il a en effet reçu l’enseignement républicain catholique et on lui reconnaît une bien belle intelligence. Il s’engage dans la branche gabonaise de la Ligue des Droits de l’homme (LDH) mise en place par Jean-Baptiste Ndendé Dibantsa, un anticolonialiste gabonais, provenant de la zone côtière du Sud du pays, ayant travaillé dans la Marine marchande française. Au sein de celle-ci, Léon Mba ne manque pas une occasion pour défendre les intérêts des africains en général et des gabonais en particulier.

Il s’active plus précisément pour les Fangs en réclamant une amélioration significative de leurs conditions de vie et de travail ; il ira même jusqu’à adresser une correspondance en septembre 1922, au lieutenant-gouverneur du Gabon, Edmond Cadier, pour que cette volonté puisse se matérialiser. Au mois de septembre 1922, il est reconnu coupable dans une affaire de falsification de documents et est mis aux arrêts. Cela fait suite à l’agacement que le « Pahouin », autre nom donné aux Fangs, provoque auprès des autorités de tutelle.

Entre 1924 e 1926, Mba finit de purger sa peine. Les autorités lui font à nouveau confiance pour prendre la place de chef de canton de Libreville Nord à la suite du décès brutal de son prédécesseur. Il devint impétueux et n’hésitait pas user de son rang social de « privilégié » ayant reçu l’instruction européenne, pour faire montre de sa déclamation emphatique à l’endroit des « Fangs » de Libreville afin de les mettre à nus. Aux commandes du canton d’une partie de Libreville, il utilise sa position pour escroquer l’argent des populations qu’il administre. Ses chefs hiérarchiques ne s’y mêlent tout de même pas.

Mais à la fin des années 1920, bien qu’il soit nommé chef supérieur de Libreville, Léon Mba est taxé de procommuniste car il entretient une relation très fraternelle, bien qu’à distance, avec le secrétaire général de la Ligue des Droits de l’homme accusé, lui d’être un soutien de l’Internationale communiste (IC) encore appelée Troisième internationale ou « Komintern », une organisation communiste fondée en 1919 par Vladimir Ilitch Lénine né Oulianov. Devenu un imposant chef administratif indigène, Léon Mba Minko se mit à mépriser et à négliger certains de ses congénères Fangs. Il n’hésitait pas à faire preuve d’injures et d’aversion à plusieurs d’entre eux.

Aussi, il participa à vulgariser la pratique du Bwiti, un rite initiatique ancien mystico-spirituel dont les Fangs sont particulièrement attachés. Cette initiative fut prise, par le clergé local, comme un impardonnable affront. Bien qu’ayant fréquenté les établissements catholiques, le « chef » Mba Minko était devenu incontrôlable pour la hiérarchie catholique ; c’était un disciple de la polygamie et son rapport à l’hygiène avait souvent été décrié. En 1931, des accusations de meurtre sur une femme gabonaise sont proférées à l’endroit des Bwitistes. Des restes humains sont découverts dans un coin du marché de Libreville. Le chef supérieur de Libreville est interpellé et accusé à son tour d’y avoir participé sans vraisemblablement aucune véritable preuve l’incriminant.

Il est fortement soupçonné d’actes de cannibalisme mais aussi d’être l’un des commanditaires de l’homicide d’un Monsieur du nom de « Dupuy », exploitant forestier français vivant au Gabon, mais aussi du meurtre d’un employé européen local de l’Union coloniale agricole et forestière (UCAF) du nom de Schoepflin. Des accusations de malversations financières pèsent aussi sur lui. Le désamour des communauté européenne, catholique et « Fang » envers Léon Mba précipitera sa chute ; même ses collègues administratifs indigènes et coloniaux ne lui apportèrent aucun appui. Il fut condamné à 10 ans d’interdiction de séjour et 3 ans de prison en Oubangui-Chari. Par ailleurs, au début des années 1950, Léon Mba est considéré comme l’instigateur du « racisme » à l’égard des français.

Issu de la communauté Fang, constituant la principale menace dont les européens se méfie du fait de son importance démographique, Léon Mba est craint par le colonat administratif qui considère ladite communauté comme le groupe ethnique le plus « indigène » et le plus hardi du Gabon. Les flux migratoires avaient fait de ce peuple, la communauté la plus nombreuse du territoire gabonais. Quand Léon Mba créa son parti en 1949, plusieurs « intellectuels » Librevillois y adhérèrent en guise de contestation contre l’occupation coloniale.

L’administration de l’AEF craignait ainsi qu’un envahissement Ekang, possible ethnonyme de Fang, ne se produise par le biais de la formation politique de Mba comprenant selon elle, plusieurs éléments dangereux et « instruits ». A contrario de Léon Mba, Jean-Hilaire Aubame était soutenu par l’administration coloniale qui en avait fait un haut cadre hiérarchique. Le gouvernement colonial du Gabon n’avait jamais eu à se plaindre pour ses agissements et la Métropole reconnaissait en lui, un ami de Paris qui n’avait pas atermoyé à s’engager dans la « France libre » en mobilisant pour la constitution de son armée, un nombre important de volontaires gabonais.

De plus, Jean-Hilaire Aubame était un fervent catholique, marié civilement et religieusement à son épouse. La communauté catholique l’affectionnait et les Fangs des milieux ruraux en avaient fait leur icône. Ces populations étaient très éprises du catholicisme et ne voyaient pas d’un bon œil, leurs compatriotes qui pratiquaient le culte Bwiti. Quand le Gabon s’ouvrit fut soumis au jeu de la démocratie en à partir de 1945, les missionnaires faisaient à la limite « campagne » pour Aubame au cours de leurs homélies.

C’est à partir de ce moment que cet « évolué Fang » fut surnommé « le poulain » ou encore « le candidat » des missions. Beaucoup de religieux prédisaient un destin présidentiel pour Aubame. La division entre l’aîné et son cadet fut dans un premier temps d’ordre religieuse, chacun étant fortement lié à sa croyance. Deuxio, l’avènement de deux pensées politiques au sein de la communauté « Fang » partagea l’électorat des deux hommes en un premier bloc composé de « Fangs » des villages de profession catholiques plus présents dans la partie du Nord du Pays. Ces derniers s’alignèrent derrière Jean-Hilaire Aubame.

Le deuxième bloc, plus au Sud, comprenait des Fangs vivant dans les milieux urbains ayant fait du Bwiti leur religion. Adversaires politiques les années 1949, Jean-Hilaire Aubame et Léon Mba finiront par enterrer définitivement leur entente en 1951. Le premier, député en France, s’indigne contre le traitement des autorités françaises à l’endroit des africains et plaide pour une réelle considération des peuples autochtones en particulier dans l’administration coloniale en favorisant une nationalisation des postes de responsabilités longtemps occupés par les européens.

Il avise aussi sur le désir pressant des populations d’outre-mer de disposer d’elles-mêmes tout en les accompagnant dans leurs évolutions républicaines. Léon Mba, lui, adopte une attitude d’allégeance et se met à disposition des desseins flous de la France concernant ses possessions en Afrique et plus particulièrement le Gabon, son pays. Cette démarche déplaît au député gabonais qui insulte son aîné de « souillé-bagnard ». L’outragé se sert de l’injure pour démoniser son cadet d’hier désormais ennemi en le taxant, entre autres, de « député-projets », suite à ses multiples propositions de lois au palais Bourbon.

Léon Mba accuse aussi Aubame d’être le pantin des autorités françaises, vautré dans les beaux-quartiers de Paris, qui veulent en faire leur « élu ». Il était bien vrai que le député gabonais passait le plus clair de son temps en Hexagone bien qu’il se rendît de temps à autres au Gabon.

 Luttes électorales locales et offensive de Léon Mba

Le premier scrutin qui opposa véritablement les deux hommes se déroula en 1949. Mais en 1946, Jean-Hilaire Aubame s’était déjà fait élire au Conseil représentatif du Gabon pour le compte de l’Ogooué-Maritime. C’est d’ailleurs cette élection qui lui permit d’être élu député en novembre 1946. En septembre 1947, Jean-Hilaire Aubame crée sa formation politique, l’UDSG. Il se rapproche alors des principales figures politiques de la région du Woleu-Ntem à l’exemple de Yves Henry Evouna, Jean-François Ondo Ndong Owono ou encore Jean-Marc Ekoh Ngyéma pour qu’ils travaillent en étroite collaboration dans le but d’enraciner le parti qu’il dirige sur l’ensemble du territoire en général et dans le Nord en particulier.

L’UDSG gagne en notoriété et devient le principal parti du pays à partir de 1947, comptant le plan nombre de conseillers territoriaux au sein de l’Assemblée représentative du Gabon de 1947 ; en janvier 1947, Jean-Hilaire Aubame avait réussi l’exploit de faire gagner René-Paul Sousatte, un acteur important de son parti, lors des élections au Conseil territorial qui l’opposait à Emile Issembé, président du PDG. Ce dernier accusa une nouvelle Aubame d’être un fraudeur invétéré. Bien avant l’élection sénatoriale de juillet 1949, Jean-Hilaire Aubame et son « grand-frère » avait étroitement travaillé ensemble sur un plan politique.

Bien qu’il eût déjà à fonder son parti politique, le Comité mixte gabonais (CMG), tout en étant le patron de celui-ci, Léon Mba fut conseiller administratif au sein de l’UDSG. Cependant, la course au palais du Luxembourg fut dominé par Paul-Marie Gondjout qui remporta l’élection du Conseil de la République en prenant l’avantage sur ses poursuivants dont Jean-François Ondo Ndong Owono, Loui Emile Bigmann Indjono et Léon Gabriel Mba Minko. L’élection sera frauduleuse mais Gondjout deviendra sénateur.

Ondo Ndong Owono était un « Ekang » originaire de la région de Bitam affilié à l’UDSG d’Aubame qui le soutint pendant l’échéance au détriment de Léon Mba, son aîné. Les deux hommes prirent alors chacun leur distance. Lors des élections législatives de 1951, Jean-Hilaire Aubame, l’ancien rédacteur des services administratifs et financiers (SAF) de l’AEF, est de nouveau élu député face à Léon Mba avec un majorité non-négligeable. Les élections locales de 1952 marquent un tournant politique pour le Gabon parce qu’il subit un réaménagement territorial et institutionnel voulu par la Métropole pour mieux préparer ses territoires d’outre-mer à l’exercice du pouvoir législatif.

L’Assemblée ou Conseil représentatif est transformée en Assemblée ou Conseil territorial. Jean-Hilaire Aubame et son parti domine les débats lors des échéances et l’UDSG, occupe plus que jamais, le premier rang dans le microcosme politique gabonais arrivant en tête dans 14 des 24 sièges. En effet, l’élu du palais de Bourbon remporta les élections territoriales dans sa circonscription du Woleu-Ntem ainsi que d’autres membres de son parti tels que Jean Stanislas Migolet, commis des SAF, Eugène Amogho, commis des SAF, ou encore Yves Henry Evouna, moniteur de l’enseignement privé respectivement dans les circonscriptions « région des Adoumas », Haut-Ogooué et Woleu-Ntem.

Suite à l’urgence de la situation politique, Léon Mba encore appelé « le vieux » décide de repenser son approche politique. Premièrement, en soutenant Paul Gondjout lors des élections sénatoriales de mai 1952 au cours desquelles Jean-Hilaire Aubame, encore lui, avait tenté de faire barrage au sénateur sortant en l’opposant à un cadre de l’UDSG. Sieur Gondjout fut touché par le geste du « vieux » de 10 ans son aîné. Les deux hommes se rapprochèrent et consentirent à unir leurs forces. En 1953 voire 1954, une nouvelle formation politique voit le jour en la personne du Bloc démocratique gabonais (BDG) ; Paul Gondjout occupait la fonction de secrétaire général et Léon Mba était le secrétaire général adjoint.

Il était composé du Parti démocrate et africain (PDA) du Comité mixte gabonais (CMG). Léon Mba comptait en effet sur l’importance de Gondjout au sein de sein fief portgentillais pour lui donner davantage d’influence sur la scène politique nationale. Gondjout était un « évolué » brillant qui avait occupé un poste de conseiller à l’Assemblée représentative de 1947 et qui était sénateur au Conseil de la République en France. Il avait notamment mis sur pied une mutuelle à Port-Gentil et était très apprécié du cercle des « enseignés » de la ville. Sa consilience et sa perspicacité faisaient de lui, un véritable rassembleur.

Deuxièmement, Léon Mba pose les jalons de son pouvoir en popularisant son image et le nom de son parti au moyen d’un organe de presse régulier et d’une stratégie de propagande verbale. Mais pour ce faire, il fallait des fonds considérables. Il n’oublia pas qu’il s’était attiré la sympathie des européens du secteur privé du Gabon notamment les forestiers et d’autres hommes d’affaires qui n’hésitèrent pas à lui apporter leur soutien matériel et financier. En effet, à son retour de déportation en Oubangui-chari en 1946, Gabriel Mba s’était fait embaucher dans une factorerie appelé compagnie John Holt.

Il y travailla comme agent de commerce et était très souvent au contact du colonat privé. C’est durant ces années qu’il se construisit un vaste agenda relationnel avec ses amis européens du privé. Cette proximité lui permettra de financer son journal « L’Union gabonaise » apparu le mois de juin 1954 et publié une fois par mois. Au milieu de l’année 1955, celui-ci paraît désormais deux fois par mois ; cette initiative est adoptée pour préparer la campagne du BDG aux législative de 1956. Le parti de Gondjout et de Mba était désormais l’un des seuls, en Afrique coloniale, à posséder son propre organe médiatique.

« L’union gabonaise » servait aussi à blanchir le personnage de Léon Mba qui avait été pendant longtemps taxé de raciste, d’anticolonialiste barbare et de gourou « Fang ». Malgré qu’il ait purgé sa peine et qu’il ne montrait plus de signe apparent d’un courroucé de la présence des colons dans son pays, l’administration le surveillait tout de même et craignait qu’il dissimule au fond ses réelles intentions. Même s’il avait depuis quelques années fait montre d’un sincère changement et qu’il avait publié, avec la permission du gouvernement général, une œuvre intitulée « Essai de droit coutumier pahouin ».

Sur place à Libreville, les populations des quartiers « Fang » n’hésitaient pas lui faire part des problèmes qu’elles rencontraient comme s’il était toujours chef de canton ou chef supérieur de Libreville. En ce qui concerne sa propagande verbale pour qu’elle le propulse au centre des affaires politiques lors des prochaines échéances électorale, Léon Mba dû faire passer Jean-Hilaire Aubame pour le véritable candidat « pro-Fang » et discréditer l’autorité des dignitaires Mpongwè qu’il accusait être les pourfendeurs autochtones du colonialisme.

La nouvelle classe de « sachants » gabonais, impatients d’en finir avec le système de prédation coloniale, s’insurgea contre les chefs coutumiers « Omyènè/Myèné » tout en ralliant les rangs du BDG de l’homme providentiel de la capitale forestière (Port-Gentil) et du très dynamique Gabriel Mba Minko. Ce dernier se servit aussi du culte Bwiti pour rallier de nombreux compatriotes Ekang et d’autres ethnies. De plus, Léon Mba vanta la mixité de sa formation politique qui était hétéroclite par rapport aux origines régionales qui y étaient représentées.

Mis à part les cadres Fangs dans le directoire, on y trouvait également des Myènè/Omyèné et d’autres ethnies. Pour sieur Mba, l’UDSG de Jean-Hilaire Aubame était plus un parti communautaire qu’autre chose. Et sa vie de député l’éloignait des réalités du pays mais le rapprochait sûrement des bureaux de l’Elysée qui le préparait pour être son représentant, une fois le Gabon indépendant. C’est assurément ces arguments qui finiront par convaincre les électeurs des différentes régions du Gabon lors des scrutin de 1956.

 Renversement de l’UDSG

Les élections législatives de 1956 donnent Jean-Hilaire Aubame vainqueur. Il obtient 47% des suffrages contre 34% pour Léon Mba. Jean-Hilaire Aubame est donc réélu à l’Assemblée nationale française mais objectivement, c’est bien Léon Mba qui remporte le scrutin bien que le BDG n’obtienne que 16 sièges au sein de l’Assemblée territoriale et l’UDSG 18. Cependant, la formation de Gondjout et de Léon Mba arrivait en tête dans la région de l’Ogooué-Lolo, à Port-Gentil, à Haut-Franceville, à Libreville et dans la Nyanga. L’UDSG n’était vainqueure que dans l’Ogooué-Lolo et dans son fief historique du Woleu-Ntem.

Cette remontée fulgurante du BDG était due à l’appui du colonat qui s’était mobilisé massivement autour de la candidature de Mba. Des puissants forestiers français tels que Albert Thibaudeau, Paul Flandre, Jean-Gaston Walker Deemin ou encore Bernard Maridort apportèrent leur aide à Gabriel Mba Minko. L’entrepreneur et homme d’affaires français, Jean-Claude fut aussi aux côtés Brouillet avec sa compagnie aérienne « Transgabon ». Les deux hommes se connaissaient bien car Brouillet habitait au village « Mont-Bouët » à Libreville. Il avait mis sa flotte aérienne à disposition de Léon Mba.

De plus, il joua l’entremetteur entre le colonat privé et Léon Mba pour que ces derniers votent en sa faveur. Craignant le personnage au début, les forestiers français firent volt face quand il se rendirent compte que leurs intérêts étaient menacés par l’administration coloniale et par la population autochtone qui souhaitaient que Jean-Hilaire Aubame accèdent au pouvoir afin de les déguerpir. Dans ce cas de figure, ils furent obligés de se ranger derrière l’ancien chef de canton de Libreville.

L’élection se déroula pour la première fois en collège unique, autochtones et européens votant ensemble, et certains d’entre eux se présentèrent pour le compte du BDG. Claude Brouillet réussit à récolter, à lui seul, plus de deux milles voix pour le BDG sur les 57 135 suffrages exprimés des 57 975 votants dont 120 901 étaient pourtant inscrits sur les listes électorales. En s’attachant les services du colonat privé, l’amitié des francs-maçons et de ses réseaux de mécontents tapis dans « l’ombre » du difficile quotidien gabonais, Léon Gabriel Mba Minko réussit ainsi à faire du BDG, la première force politique du Gabon. Et les élections municipales à venir confirmeront cette approche.

 Prise de pouvoir du BDG

Durant les municipales du 18 novembre 1956, l’UDSG est battu à plate couture par le BDG qui porte son secrétaire général adjoint à la mairie de Libreville. La loi-cadre « Gaston Deferre » de 1956 et celle du 4 avril 1957 réorganisent les instances institutionnelles des territoires d’outre-mer. Celle de 1957 prévoit en effet la création d’un conseil de gouvernement dans lequel les différents membres dudit gouvernement ainsi qu’un vice-président seront issus de la population autochtone d’un territoire donné.

La présidence du Conseil étant destinée au gouverneur général colonial. Bien qu’ayant remporté 18 des 40 sièges, l’UDSG de Jean-Hilaire Aubame va se retrouver minoritaire au sein de l’Assemblée territoriale par une machination frauduleuse des résultats que le BDG mettra en place en se servant d’un recours. Le nouveau décompte donnera le BDG vainqueur du scrutin avec 21 voix contre 19 pour le parti rival ; le BDG n’avait pour l’heure obtenu que 16 sièges. Aucune des formations n’ayant la majorité, un gouvernement en format « union nationale » est élue le 21 mai 1957 et Léon Mba fut lui intronisé, le 15 mai 1957, vice-président du gouvernement car ayant une majorité bien qu’étant infime.

Mais l’entente n’est pas au beau fixe et des conflits réguliers gangrènent le bon fonctionnement du gouvernement. Jean-Hilaire Aubame oblige ses ministres à démissionner tout en déposant une motion de censure par la suite. Son initiative est un échec car 21 députés ont voté contre et 19 seulement l’ont soutenu. Suite à cela, près d’une dizaine des cadres de son parti lui tournent le dos pour aller gonfler les rangs de l’ennemi. Le BDG devient ainsi majoritaire à l’Assemblée avec 29 députés sur 40.

 Apôtre de l’indépendance

Le 28 septembre 1958, les territoires français d’outre-mer sont appelés dans les bureaux de vote pour valider ou non, la légifération de nouvelles dispositions référendaires qui offrent le choix aux populations des anciennes colonies française d’Afriques d’accéder directement à la souveraineté internationale ou de la préparer tout en restant sous la tutelle de la France par le canal d’une nouvelle organisation politique dénommée « La Communauté franco-africaine ». Jean-Hilaire Aubame, depuis la France où il effectue son mandat de parlementaire, donne pour consigne de vote, le choix du « oui » et oriente les généraux de son entité politique à faire campagne dans ce sens. En fait, Jean-Hilaire Aubame n’était pas réfractaire à l’idée que le Gabon reste un territoire français.

Souvenez-vous qu’il était même très engagé et en totale approbation avec l’idée que la France et ses anciennes dépendances puissent former une seule et même Etat. C’est bien sa fameuse théorie de fédéralisation de « l’empire » français donc d’une République fédérale, qu’il n’avait de cesse promue au sein de l’hémicycle de Paris mais dont il avait lucidement conscience de la non réalisation d’un pareil format politique. Mais pour le nouveau chef de file de l’opposition gabonaise, il était judicieux d’opter pour une parlementarisation du pouvoir, mettant les institutions au-dessus du chef de l’Etat afin de ne pas se frotter aux dérives autoritaires d’un président omnipotent. Il avait sans doute anticipé la condition psychologique dans laquelle pouvait se retrouver un homme nouvellement détenteur d’une autorité telle que celle de la magistrature suprême.

 Opposition et cohabitation

Jean-Hilaire Aubame rentre au Gabon en 1959 après la fin de son mandat de député en Hexagone. Léon a été, quelques mois avant son retour au pays, élu premier ministre le 19 février de la même année. Un nouvel organe institutionnel fait son apparition dans le paysage politique : il s’agit du Conseil de district. Ils sont au nombre de 38 et 321 sièges sont à pourvoit. Léon Mba façonne le découpage territorial à son avantage et s’octroie 277 des 321 sièges à pourvoir pour être sûre que le BDG puisse y être aussi majoritaire en obtenant le contrôle de 23 districts ; il s’était aussi par ailleurs assuré que le mode du scrutin, au format de liste majoritaire à un tour, ne puisse pas lui être défavorable.

L’USDG ne récoltera que 77 sièges relatifs à cinq maigres districts. Quand le Gabon acquiert le droit de disposer de lui-même, Jean-Hilaire Aubame est dans la tourmente permanente car sa formation peine à exister dans l’environnement politique. Mais du côté rival, les choses ne semblent plus aussi bien se passer. En effet, Paul-Marie Gondjout, alors président de l’Assemblée nationale, est en froid avec son premier ministre et compagnon de lutte, Léon Gabriel Mba Minko. Léon Mba tient à instaurer un régime hyper présidentiel tandis que Gondjout et plusieurs députés du BDG sont très partisans d’un régime parlementaire dans lequel le chef du gouvernement possède plus de pouvoir que le chef de l’exécutif.

Gondjout & Co, renforcés par l’opposition de l’UDSG, finiront par avoir gain de cause le 4 novembre 1960. A cette date, l’Assemblée nationale adopta, le 4 novembre 1960, une Constitution plus encline au pouvoir législatif. Par ailleurs, Paul Gondjout avait toujours partagé l’idée de Jean-Hilaire Aubame de faire de l’Assemblée nationale, la seule et unique voie du peuple et de ses aspirations ; ce qui était bien la contre-pensée de Léon Mba qui n’était obnubilé que par le renforcement de son autorité et donc par conséquent du pouvoir exécutif. Le secrétaire du BDG était donc d’avis avec le chef de l’UDSG.

Les deux hommes avaient toujours eu cette même rigueur démocratique et ce depuis leurs années à l’Assemblée nationale et au Sénat français où ils étaient proches du groupe parlementaire IOM. Le 10 novembre 1960, Léon Mba évince, sans consulter le Parlement, des ministres gabonais d’origine européenne comme le souhaitait la population qui ne cessait de crier leur colère sur à cela. Paul Gonjout est furieux par rapport à la décision de Léon Mba qui est en violation avec la Constitution.

Il dépose une motion de censure pour tenter de s’emparer des rênes du pouvoir. Mais Léon Mba, voyant l’arnaque arrivée, réagit de manière violente. Le 16 novembre, il déclenche un coup d’Etat institutionnel, en avançant le motif d’un complot ourdi contre sa personne. Il décrète l’état d’urgence et ordonne l’arrestation de Paul Gonjout et des autres frondeurs au sein du BDG en dépit de leur immunité parlementaire.

Il acte la dissolution de l’Assemblée nationale le jour d’après et convoque de nouvelles élections législatives devant se tenir le 12 février 1961. Malgré cela, Jean-Hilaire Aubame s’associe à Léon Mba. Les deux parties forment une liste d’union nationale. Le vil premier ministre s’arrange, comme à son d’habitude, à ce que Jean-Hilaire Aubame ne soit pas gênant pour lui lors de la présidentielle qui se tiendra le même jour que le scrutin législatif. Sous fond de corruption et de parrainages occultes, Léon Mba obtient la majorité absolue à l’Assemblée et devient au même moment, le 1er président du Gabon, sous le regard impuissant de Jean-Hilaire Aubame.

Le « vieux » s’était en effet, servi de ses réseaux parisiens, gabonais et ésotériques, pour obtenir une forte somme d’argent qui lui permit d’acheter des députés au sein de l’hémicycle. Devenu secrétaire général du BGD après avoir écarté Paul Gondjout, Léon Mba fit voter une nouvelle Constitution qui lui léguait tous les pouvoirs. Pour remercier Jean-Hilaire Aubame pour sa collaboration et son « mutisme », il le nomma, le 17 février 1961, ministre des Affaires étrangères.

 Rupture avec le pouvoir

En février 1963, Léon Gabriel Mba Minko règne en dignitaire absolu sur le Gabon. Il s’est arrogé presque tous les pouvoirs. Comme si cela ne lui suffisait pas, il demande à Jean-Hilaire Aubame d’unir son parti au sien pour qu’il puisse instaurer un parti unique dans le pays donc instituer une dictature dans le pays. Aubame refuse et Léon Mba réagit violemment. En fait, Aubame avait fait savoir à Léon Mba que s’il voulait mener à bien son opération, il fallait d’abord que toutes les formations politiques disparaissent et que des concertations aient lieu pour mettre sur pied, un parti « national ».

Ce que le « vicieux » président refusa. Il bannit tous les ministres du l’UDSG du gouvernement sauf ceux qui lui jure allégeance. Pour définitivement se débarrasser de Jean-Hilaire Aubame, le président Mba le nomme à la tête de la Cour Suprême le 25 février 1963. « Le patron » avait pour stratégie de faire occuper Aubame un deuxième poste dont il soulèverait l‘incompatibilité dans avec sa fonction de député. Le chef de l’Etat somme alors Jean-Hilaire Aubame de démissionner de l’hémicycle mais celui-ci a la malice de se défaire de ses fonctions au niveau de la Cour suprême. Furieux, Léon Mba Mba.

Le 21 janvier 1964, Léon Mba ordonne, une fois de plus, la dissolution du Parlement dans lequel il bénéficie pourtant d’une écrasante majorité estimée en pourcentage à plus de 70. Il appelle de nouveau à une échéance législative programmée pour avril 1964. Jean-Hilaire Aubame annonce dès lors la non-participation de sa formation au prochain scrutin. Il se questionne alors s’il n’aurait pas dû profiter du différend politique deux ans en arrière, entre Léon Mba et Gondjout pour tourner la situation en sa faveur. Une occasion gâchée et des erreurs à assumer.

Suite à l’hyper présidence exercée par Léon Mba et à son autoritarisme, une centaine de militaires de l’armée gabonaise prennent la décision de débouter le chef de l’Etat de ses fonctions dans la nuit du 17 au 18 février 1964. Ils invitent Jean-Hilaire Aubame à former une équipe gouvernementale de temporaire, après l’avoir nommé au poste de Premier ministre, Ministre des Armées du gouvernement de transition qu’il devait mettre sur pied. Celui-ci ne décline pas l’offre.

Au soir du 18 janvier 1964, des troupes françaises installées dans la capitale de la République du Congo et celles basées à Dakar lancent une offensive pour rétablir au pouvoir le président déchu, sous l’ordre des autorités de Paris qui partagent des liens très étroits avec Léon Mba. Le 19 janvier, le « vieux » est réinstallé sur son fauteuil présidentiel et ordonne que soit sévèrement jugés toutes les personnes ayant pris part à sa destitution. Il charge alors Léon Augé, un ancien résistant et fondateur du Mouvement gabonais d’actions populaire (MGAP) qui s’était opposé au référendum de 1958, d’être le principal juge du procès. Depuis, il avait rejoint le BDG.

 Condamnation et réhabilitation

Lors du procès du 25 août 1964 qui se tient à Lambaréné, ville du centre du pays, les auteurs du putsch sont appelés à la barre. Jean-Hilaire Aubame qui avait été rattrapé par l’armée, après avoir pris la poudre d’escampette, est aussi présent. Il nie toute implication dans l’organisation du coup d’Etat et s’en explique. En effet selon lui, c’est bien le chef diplomatique de la représentation française au Gabon, Paul Cousseran, qui lui avait donné l’information concernant le Putsch qui était en cours. Il s’était alors rendu sur place pour prendre attache avec les insurgés sur les conseils de l’ambassadeur.

En se rendant compte que le président avait « volontairement » démissionné de lui-même sur les ondes de la radio gabonaise, il prit donc la décision de former un gouvernement, en conformité avec la Constitution. Cependant, Jean-Hilaire Aubame prononça ce discours qui restera sûrement gravé dans les mémoires « Les enfants du Gabon n’oubliera jamais que, pour des raisons inavouables, une poignée de français ont détruit en un jour une amitié tissée en 125 ans, en préférant l’amitié d’un homme à celle d’un peuple (…) Cette agression est une immixtion intolérable dans les affaires intérieures du Gabon, une agression caractérisée…  ».

A l’issue du procès, Jean-Hilaire Aubame est condamné à 10 ans d’interdiction de séjour ainsi qu’à dix ans de travaux forcés, étant jugé comme le principal auteur du coup d’Etat. Par voie de recours, il tente de faire invalider la décision pénale en mettant en cause la conformité constitutionnelle de la Cour qui avait été mise en place par Léon Mba. Malheureusement sa démarche échouera et il fut envoyé à Dom-les-Bam (qui serait tiré du groupe de mots du patois Fang « Ndomlé-Mbam » signifiant littéralement sévère brimade), un ancien campement forestier transformée en centre d’incarcération par l’administration coloniale de l’époque localisé dans la région de l’Estuaire.

Sur ce bagne, Jean-Hilaire Aubame était supplicié presque quotidiennement par les matons qui étaient chargés de sa surveillance. Une information révélée plus tard mais non vérifiée laissait clairement entendre que Jean-Hilaire Aubame avait été mis au courant par l’un de ses neveux de l’opération secrète, le nommé Pierre-Claver Eyéghé, ancien ambassadeur du Gabon au Royaume-Uni, bien avant, et qu’il l’avait révélée à son oncle. Mais aucune preuve tangible ne permettait cependant pas de prouver la culpabilité d’Aubame. Après 8 ans d’emprisonnement, Omar Bongo, nouveau président du Gabon ayant succédé à Léon Mba, ordonne sa mise en liberté au courant de l’année 1972 soit deux ans avant la fin de sa peine.

Libre, Jean-Hilaire Aubame quitta le Gabon et s’établira dans la capitale française. Après avoir purgé sa peine d’interdiction de séjour, il rentra dans son pays en 1981. Bongo décida de le réhabiliter politiquement en faisant de lui et ce à titre honorifique, l’un de ses conseillers spéciaux. Menant une vie paisible au sein de la capitale gabonaise, Jean-Hilaire Aubame échappa de peu, le 12 décembre 1984, à une tentative d’assassinat fomentée par des individus proches du pouvoir. Ces derniers l’avaient dans le viseur, croyant qu’il servait d’informateur au Mouvement de redressement national (MORENA), une occulte formation politique opposée au régime et à la politique tyrannique de Bongo.

 Quelques ombres au tableau

Selon Emmanuel Ekomi Mbéné, responsable du portefeuille ministériel de l’Information, des Postes et des Télécommunications, dans son livre « Le coup d’Etat de 1964 : Ma part de vérité », son frère, le lieutenant parachutiste Daniel Adzo Mbéné et Jean-Hilaire Aubame Eyéghé, étaient tous deux liés par la fraternité maçonnique. C’est d’ailleurs Daniel Mbéné qui pesa de tout son poids pour remettre le pouvoir au président de l’UDSG qui était d’après Emmanuel Mbéné, un « assoiffé de pouvoir ».

On y apprend aussi que le neveu d’Aubame, Pierre-Claver Eyéghé était un des complices des putschistes car il avait été clairement mis au courant de l’opération militaire visant le renversement de Léon Mba par Daniel Mbéné et le lieutenant Jean Valère Essone. Ce dernier avoua même lors de l’interrogatoire musclé sous fond de torture qu’il subit, que « Je sais bien que mon oncle peut me sacrifier pourvu qu’il ait le pouvoir. ».

L’œuvre nous révèle aussi que Aristide-Edgar Issembé Tchango, premier ambassadeur du Gabon en France de 1961 à 1965 et commissaire du gouvernement, accusa Jean-Hilaire Aubame de détournements de deniers publics à hauteur de plusieurs millions lorsqu’il était ministre des affaires étrangères de 1961 à 1963. Aubame n’aurait aucunement nié les faits mais aurait par la même occasion accusé Issembé d’avoir commis le même délit dans ses fonctions en France.

Le commissaire du gouvernement, selon Ekomi Mbéné, avait fait savoir à l’assistance que Jean-Hilaire Aubame s’était fait complice d’acte incestueux en ayant cautionné le fait que son neveu qu’il avait morigéné comme un enfant provenant de ses entrailles, Pierre Eyéghé, avait conçu un enfant avec la fille aînée d’Aubame prénommée Georgette. Issembè soutenait sûrement dans le secret les putschistes mais il n’avait pas une once d’admiration pour Aubame et son neveu. Du moins, c’est ce que pensait Emmanuel Ekomi Mbéné.

Si ça avait été Gondjout, le jugement aurait été bien et profondément différent. De plus, Issembé disait d’Aubame qu’il avait de l’aversion pour les français. « C’est faux de dire que je n’aime pas les français. Je dis que je n’aime pas les mauvais français.  », ce furent les propos de Jean-Hilaire Aubame contre les accusations de francophobie dont il était visé par sieur Aristide Issembé.

 Dissolution de l’UDSG

Lors des élections législatives du 12 avril 1964, l’UDSG aurait remporté 16 des 47 sièges, le reste étant le trésor de guerre électoral de Léon et de son BDG. Mais à cette période, Jean-Hilaire Aubame est emprisonné et le Gabon connaît des tensions sociales suite à sa sombre actualité politique. Ce qui laisse penser que les résultats de ces élections étaient très certainement maquillés pour calmer la gronde populaire face à la barbarie du président Mba et faire croire à la communauté internationale que la démocratie était toujours de mise au Gabon. Après la mort de Léon Mba, son vice-président accède à la magistrature suprême. Il institutionnalise le monopartisme et dissout les autres formations politiques le 13 mars 1968. Cette logiquement cette date qui marque la fin de l’existence de l’UDSG.

 Disparition et hommage

Jean-Hilaire Aubame Eyéghé s’est tristement éteint à Libreville le 16 août 1989 à près de 77 ans. Sa santé s’était significativement altérée en raison des années passées en détention. Il se rendait régulièrement en France pour des soins sanitaires.

Omar Bongo avait tout de même souhaité qu’un établissement public de la capitale gabonaise puisse porter son nom. Il s’agit d’un établissement d’enseignement secondaire situé dans le quartier « Nzeng-Ayong » répondant au nom de Lycée Jean-Hilaire Aubame Eyéghé.

 Distinctions honorifiques

Jean-Hilaire Aubame a été médaillé de la Résistance française organisée pendant la Seconde Guerre Mondiale. Titulaire de l’Ordre national du Tchad, Titulaire de l’Etoile équatoriale décernée au Gabon. Il a aussi été titulaire de l’Ordre libérien de la rédemption africaine et de l’Etoile africaine octroyée au Libéria. Cet ancien député de l’Assemblée nationale française s’est aussi vu remettre l’Etoile noire du Bénin et fut titulaire de l’Ordre national du mérite de Côte-d’Ivoire, de l’ordre national du mérite centrafricain ainsi que de l’Ordre national du mérite du Tchad. Jean-Hilaire Aubame fut élevé en France au titre de Commandeur de la légion d’honneur.

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