Brume politique

Future constitution du Gabon : entre mystères, secret de polichinelle et navigation à vue

Future constitution du Gabon : entre mystères, secret de polichinelle et navigation à vue
Future constitution du Gabon : entre mystères, secret de polichinelle et navigation à vue © 2024 D.R./Info241

Le Gabon va vivre un moment historique avec le futur référendum constitutionnel prévu pour décembre prochain, selon le chronogramme de la transition annoncé en octobre 2023. Pourtant, un voile épais de mystère entoure cette consultation populaire. Depuis la mise en place du Comité constitutionnel national chargé de la préparer d’ici le 6 juin dernier, personne ne semble connaître la teneur de cette nouvelle constitution. Faut-il s’en étonner ou simplement y voir la continuité d’une tradition de gouvernance opaque ?

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Le président de la transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, et ses soutiens sont déjà en campagne pour le « oui », notamment lors de récentes tournées provinciales. Une ferveur militante qui pourrait presque paraître sincère si ce n’était pour un détail trivial : personne ne sait ce que contient cette fameuse constitution. La population est donc invitée à approuver par avance et en aveugle un texte dont les détails demeurent un secret bien gardé. Un exercice de démocratie participative des plus innovants, pourrait-on dire avec une pointe de sarcasme.

Le président de la transition ici à Franceville

La future constitution, nous assure-t-on, devrait être fondée sur les conclusions du Dialogue national inclusif tenu du 2 au 30 avril à Libreville. Un dialogue qui, rappelons-le, avait pour ambition de réconcilier les diverses factions politiques et de tracer un avenir commun pour le pays après les 56 ans de règne de la famille Bongo. Cependant, le président de la transition avait lui-même précisé que ces conclusions n’avaient pas force de loi. Difficile donc de comprendre comment elles pourraient servir de base à un texte constitutionnel contraignant.

Peut-on raisonnablement appeler à voter pour le « oui » sans savoir ce que contient cette nouvelle constitution consécutive au coup d’État du 30 août qui a vu l’arrivée de l’armée gabonaise via le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) au pouvoir ? C’est un peu comme inviter quelqu’un à signer un contrat sans lui permettre de lire les clauses, ou plus simplement mettre la charrue avant les bœufs. Une pratique certes audacieuse, mais qui risque de laisser un goût amer à ceux qui espéraient un changement véritable et transparent.

Le Comité constitutionnel national, dirigé par l’actuel ministre de la Réforme des institutions Murielle Minkoué Mintsa, dans sa grande sagesse, a peut-être jugé que la transparence était un concept dépassé même à l’ère de la transition et de la restauration. Après tout, pourquoi encombrer le peuple avec des détails futiles comme le contenu exact de la constitution ? L’essentiel, c’est de voter « oui », n’est-ce pas ? Une confiance aveugle dans les dirigeants qui, jusqu’à présent, ont su démontrer que les militaires du CTRI voulaient absolument faire du neuf avec du vieux, y compris en sortant du placard les anciennes gloires du régime Bongo déchu.

Dans ce climat de mystère et de manœuvres politiques, le Gabon s’avance vers un référendum constitutionnel qui promet d’être mémorable. Si seulement les électeurs savaient pour quoi ils votaient, l’événement pourrait même avoir un semblant de légitimité. En attendant, le suspense reste entier, surtout que ce texte devra encore passer par la case parlementaire en octobre prochain. Peut-être découvrirons-nous enfin le contenu de cette constitution le jour du vote. Ou peut-être pas. Après tout, qui a besoin de transparence dans une république moderne ?

@info241.com
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