Portrait

Léon Gabriel Mba Minko, la figure de proue de l’indépendance du Gabon

Léon Gabriel Mba Minko, la figure de proue de l’indépendance du Gabon
Léon Gabriel Mba Minko, la figure de proue de l’indépendance du Gabon © 2020 D.R./Info241

Comme plusieurs anciennes colonies française d’Afrique, le Gabon commémore ce lundi 17 août 2020, sa soixantaine année d’accession à la souveraineté internationale. Une accession signée avec les autorités coloniales françaises par un certain Léon Gabriel Mba Minko (1902-1967). Retour sur les traces de celui qui est considéré comme le père de l’indépendance du Gabon.

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C’est non loin de l’ancien cimetière de Kerellé, où se situe son actuel mausolée à Libreville, que Léon Gabriel Mba Minko naît le 9 février 1902. Il est le fils d’Isidore Minko-Mi-Edang, petit gérant de commerce et présenté un temps comme le coiffeur de Pierre Savorgnan de Brazza, et de Louise Bendome, couturière de profession.

Un portrait officiel de Léon Mba

Il fréquente d’abord l’école Monfort puis le séminaire Saint-Jean en 1909 et obtient son brevet d’études élémentaires en 1916. Grâce à ce parchemin, il trouve un emploi à la sous-intendance militaire de Libreville mais en marge, il suit des études par correspondance à l’Ecole universelle et y finit sa formation en 1918. Il est alors engagé dans l’administration coloniale française en tant qu’écrivain-interprète.

Il occupe ensuite les fonctions de commis-expéditionnaire, des postes dans les villes de Libreville, Port-Gentil ou encore Pointe-Noire. Il est intégré dans l’administration douanière par voie de concours après plusieurs emplois comme employé de magasin, commerçant et exploitant forestier et ce, au cours de l’année 1920.

Engagements politique et citoyen

En 1920, Léon Mba intègre la Ligue gabonaise des Droits de l’Homme et en devient le secrétaire. Il est dans le viseur de l’administration coloniale car elle perçoit d’un mauvais œil cet engagement citoyen et panafricain qui secoue l’ensemble des colonies européennes d’Afrique. En 1926, à la suite de la disparition inattendue du chef de canton de Libreville, Léon Mba est nommé à ce poste par les autorités coloniales. Mis à part la gestion de Libreville nord, il est aussi chef du quartier Mont-Bouët, assesseur titulaire au tribunal indigène de 1er degré avec voix délibérative mais aussi suppléant titulaire à la commission municipale de Libreville.

De 1931 à 1942, Léon Mba est condamné à 15 années de prison et est déporté en Oubangui-Chari (République centrafricaine, depuis 1960). Il est accusé de détournements de fonds mais d’aucuns crient au complot. En 1946, alors qu’une remise de peine lui a été accordée, il revient dans son pays. C’est l’entrée en vigueur de la nouvelle constitution française du 13 octobre 1946, laquelle reconsidère l’Afrique équatoriale française en territoire d’Outre-mer.

Cette constitution influence considérablement l’engagement en politique de Léon Gabriel Mba Minko. Il crée dès lors le Comité mixte gabonais (CMG) qui partage les mêmes idéaux que la formation politique de Félix Houphouët-Boigny le Rassemblement démocratique africain (RDA), celle de l’unité et de la souveraineté africaine. Le CMG rejoint alors le RDA puis fusionne avec le Parti démocratique africain (PDA) qui est celui de Paul Indjendjet-Gondjout.

En 1953, la fusion entre le CMG et le BDG donne naissance au Bloc démocratique gabonais (BDG). C’est au sein de ce parti dont Léon Mba fut secrétaire général, qu’il accéda aux fonctions de maire de Libreville. Le parti fusionné obtient une écrasante victoire aux municipales du 18 novembre 1956, obtenant 19 des 27 conseillers. Le 31 mars 1957, il devient le président de l’Assemblée territoriale puis vice-président du Conseil du gouvernement du Gabon, la présidence étant assurée par le gouverneur français du territoire selon la loi-cadre du 4 avril 1957.

En route vers la souveraineté nationale

Il y a lieu de souligner que c’est sous l’impulsion du Général De Gaulle, soucieux du devenir des colonies françaises en Afrique, que le Gabon comme beaucoup d’autres pays africains va entamer sa marche vers l’indépendance par le biais de la conférence franco-africaine de Brazzaville qui débute le 30 janvier 1944. Ce n’est que seize ans plus tard que la souveraineté internationale deviendra une réalité.

Le 15 novembre 1946, des Africains et des Européens composent la première assemblée représentative du Gabon. En 1947, des éminences gabonaises sont invitées à siéger dans l’hémicycle français. Il s’agit de René Paul Sousatte, Mathurin Anguilé, Jean-Hilaire Aubame, Yves Evouna, Paul Gondjout et Edouard Mossot. Léon Mba décline cette offre et préfère lui rester au contact des populations et mener des actions fortes sur le terrain.

En 1957 après que Léon Mba n’accède aux plus hautes marches de la République, le Général De Gaulle s’empresse de convoquer un référendum pour établir une nouvelle constitution visant à rendre autonomes les pays de la communauté française comme il l’avait annoncé durant la conférence de Brazzaville en 1944. Le 28 septembre 1958, le oui l’emporte sur le non et le Gabon, ex colonie de l’empire français, devient alors un état associé dans la communauté française. On parle désormais de République gabonaise avec une assemblée législative en lieu et place de l’assemblée territoriale.

Le 18 février 1960, l’Assemblée législative adopte la première constitution. Le 20 mai, elle donne l’aval à Léon Mba alors chef du gouvernement, de finaliser les accords relatifs à l’indépendance avec la France. En juillet 1960, la délégation gabonaise, dont les membres sont Léon Mba, Eugène Amogho, André-Gustave Anguilé, Paul Gondjout, Jean-Félix Mba, de N’Nah Bie, de Jean Aveno-Davin, de Pierre Avaro et des princes Birinda et Rapontchombo, arrive à Paris. Les premiers ministres Michel Debré et Léon Mba, respectivement français et gabonais, ratifient le 15 juillet 1960 les accords permettant au Gabon de disposer de lui-même.

La délégation gabonaise rentre à Libreville le 22 juillet et le 23 juillet, l’Assemblée législative approuve les accords ramenés de Paris et s’active à déterminer les couleurs du drapeau ainsi que l’hymne de la patrie dont celle proposée par Georges Damas-Aleka retiendra l’attention de tous. Le 24 juillet, l’Assemblée législative devenue Assemblée nationale, vote le texte de loi qui attribue au Premier ministre, le rang et les pouvoirs de Président.

C’est le week-end du 15 août 1960 qui va être décisif dans l’accession du Gabon à la souveraineté internationale. Ce même jour aux environs de onze heures, la délégation française conduite par le ministre d’Etat André Malraux atterrit sur le sol gabonais et est accueillie par Léon Mba en personne. Après que les cérémonies diplomatiques de circonstance aient été effectuées, Léon Mba et André Malraux se rendirent dans le bureau du Haut-commissaire afin de conclure définitivement les tractations de transfert de compétences et attributs de la communauté à la nouvelle République gabonaise.

Lecture est faite d’une lettre de De gaulle adressée aux dirigeants Gabonais : « Au jour où le Gabon accède à la souveraineté internationale, la France lui adresse son salut de fraternelle amitié. Le lien séculaire qui unit les deux Républiques est si cher et si étroit qu’il garantit l’avenir de leur union. Que le Gabon le sache bien, la France demeure à ses côtés ! Elle sait qu’elle peut compter sur lui comme elle y comptait hier ! Vive le Gabon ! Vive la France ! »

Le 16 août 1960 peut avant minuit, le président Léon Mba prononce un discours de remerciement et de reconnaissance à l’endroit de la France et du Général De Gaulle. Il parle aussi des nouveaux défis et des efforts à fournir pour les remporter, des comportements à adopter ains que de la joie qui anime tous les Gabonais pendant ces instants. Le 17 août à minuit, le président Léon Mba déclare officiellement l’indépendance du Gabon en ces termes : « En invoquant Dieu et à la face des hommes, par la délégation des pouvoirs que je tiens du peuple gabonais et en vertu du droit de ce peuple à disposer de lui-même, je proclame solennellement l’indépendance de la République gabonaise  ».

Pour immortaliser cet évènement surréaliste à l’époque, les autorités gabonaises avec à leur tête Léon Mba, se retrouvent avec leurs convives dans les jardins de l’ex Haut-commissariat (devenu tour à tour palais du gouvernement puis Présidence de la République) pour assister à la première levée officielle des couleurs du drapeau du pays ainsi que pour le premier retentissement de l’hymne national.

Disparition et postérité

Léon Gabriel Mba Minko s’éteint officiellement le 28 novembre 1967 à l’hôpital Claude-Bernard de Paris, rongé par la vieillesse et la maladie, un cancer, après avoir été président du Gabon pendant 6 ans, 9 mois et 15 jours. Il avait 65 ans.

Son mausolée, à Libreville

Un institut du nom de Institut de Médecine et d’Epidémiologie Appliquée (IMEA), fondation internationale Léon Mba porte son nom et a été créé en 1968 en reconnaissance des soins qu’il avait reçu de la part de la France. Il est aussi l’éponyme d’autres édifices au Gabon tels que l’aéroport international de Libreville, un lycée d’excellence à Libreville dit Lycée national Léon Mba ou encore le palais qui abrite l’Assemblée nationale.

Le 28 novembre 2007, lors du 40ème anniversaire de sa disparition, le feu président Omar Bongo Ondimba avait inauguré à Libreville, un mausolée en sa mémoire.

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