Déni de la réalité : Bilie By Nze botte en touche l’appel du Médiateur de la République
Alain Claude Bilie-By-Nzé, porte-parole du gouvernement, au cours de sa traditionnelle conférence de presse tenue le 12 mai à Libreville, a battu en brèche le diagnostic réel au sujet de crise généralisée au Gabon et la nécessité de l’appel au dialogue politique fait par Laure Olga Gondjout, Médiateur de la République. Tout en brandissant la menace du gouvernement de poursuivre en justice le candidat à la présidentielle 2016 Jean Ping.
Pour rappel des faits, à l’occasion d’une communication solennelle, après plusieurs consultations auprès de toutes les couches sociales et politiques de tous bords, Laure Olga Gondjout, Médiateur de la République, avait le 07 mai dernier, lancé un appel à l’ensemble des acteurs politiques gabonais à regagner le "corps de garde" pour y discuter de la situation politique et sociale hautement dégradées à l’orée de la prochaine présidentielle.
Quatre mois avant l’échéance électorale présidentielle, le Médiateur de la République, Laure Olga Gondjout, a procédé à un diagnostic amer et alarmant de la situation politique du pays. Elle a fait remarquer que le dialogue social est rompu, que les étrangers commencent à quitter le pays, ou encore que des Gabonais se préparent à aller en exil. Son constat avait-t-elle indiqué débouche de la consultation faite auprès de toute la classe politique gabonaise, les missions diplomatiques, le clergé, les ONG et associations.
Pour le Médiateur de la République, « Le Gabon, jadis havre et apôtre de paix, semble devenir à son tour une source d’inquiétudes graves pour les pays frères et la communauté internationale. Oui, la crise est sociale, morale, économique, politique. Leurs effets conjugués laissent planer l’incertitude du lendemain sur l’unité nationale ».
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Interrogé sur cette sortie publique du Médiateur de la République, qui a rappelé l’urgence de la tenue d’un dialogue inclusif, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Alain Claude Bilie-By-Nzé a brillé comme à l’accoutumé par un déni de la réalité implacable en affirmant que « l’appel du médiateur national est inopportun. Parce que les problèmes qu’elle décrie ne concernent pas que le Gabon et le Gabon n’est pas en crise pour que l’on organise ce dialogue. » Tout en prétextant une récrimination de la perte des avantages et privilèges accordés jadis par Omar Bongo, M. Bilie-By-Nzé a déclaré que « sont ceux qui ont perdu les privilèges. Et ils doivent savoir que chaque chose à une fin. Le temps des postes réservés aux familles est révolu ».
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Au moment où l’opinion nationale et internationale attendait une réaction digne d’un gouvernement dit de la République, le porte-parole a botté en touche ce diagnostic de Laure Olga Gondjout. Préférant tout comme le président gabonais Ali Bongo joué la carte du tout va mieux. Le Gabon ne traverse aucune crise. Il s’agit d’un autre pays que le Gabon. La crise ne concernerait donc pas le Gabon. Et donc il s’agirait selon le porte-parole du gouvernement d’un constat erroné. Tandis que tous les lampions sont au rouges. Les crises sociale, politique, économique font légion dans le pays. Alain Claude Bilie-By-Nzé a brillé par la diversion en accordant une teneur exceptionnellement partisane aux propos tenus pas Jean Ping.
Diversion gouvernementale : menace d’une action judiciaire contre Jean Ping
L’opinion gabonaise à force de répétition des mêmes manœuvres dilatoires contre tous les opposants au régime Bongo-PDG au pouvoir depuis 1967, commence à être au fait des cabales médiatiques de propagande et d’instrumentalisation, cette fois-ci à l’encontre de Jean Ping. Diffusé sur les antennes de Gabon Télévision et sur les médias à la solde du pouvoir, un extrait vidéo tronqué de son contexte d’énonciation laisse entrevoir le candidat à l’élection présidentielle affirmant lors d’une causerie politique : « Chez moi, là-bas à Omboué, quand on s’en va dans une bataille comme celle-là, on va au cimetière, on dit aux morts : on s’en va à la guerre. Levez-vous et accompagnez-nous… Il s’agit d’une véritable expédition pour nous débarrasser des cafards ! ».
L’allusion à cette expression connotée tristement célèbre "cafards" donne du grain à moudre à une campagne médiatique du palais du Bord de mer. Machiavéliquement orchestrée, assurément instrumentalisée par les sbires du palais présidentiel, sous les auspices d’Ali Bongo. Contre le natif d’Omboué qui gagne le terrain jours après jours, mois après mois avec la poursuite de sa tournée provinciale de proximité qui a mis le cap sur la Ngounié (sud du Gabon).
Très inspiré pour l’obreptice et la rhétorique sophiste le porte-parole du gouvernement au sommet de son art a indiqué que « Monsieur Jean Ping ne peut pas tenir de tels propos pour avoir été longtemps ministre des Affaires étrangères d’Omar Bongo et président de la Commission de l’Union africaine ». Tout en affabulant une comparaison historique que : « ce sont des termes sans équivoque, qui rappellent certaines tragédies de l’histoire de l’humanité. Adolf Hitler traita les Juifs de cafards, il eut six mille morts pendant la Seconde Guerre mondiale (…) Plus près de nous, des extrémistes Hutu traitèrent les Tuttis de cafards et il eut le génocide rwandais avec ses 800 mille morts ».
Des montages et rapprochements historiques visiblement surfaits montrant le deux poids, deux mesures du pouvoir de Libreville. Cet argumentaire avilissant et malicieux a fait dire au porte-parole du gouvernement, qui fût muet et très silencieux face au propos scandaleux au sujet de la radiation de l’ethnie fang au Gabon, tenus par Michel Ogandanga, conseiller en communication d’Ali Bongo, ce qui suit : « Le gouvernement de la République, soucieux de maintenir l’unité nationale, de garantir la sécurité, la stabilité, la paix et la cohésion sociale aux côtés de S.E. Ali Bongo Ondimba, président de la République, chef de l’État, relève l’extrême gravité de ces propos. Le gouvernement note que ces propos qu’il condamne avec la plus grande fermeté, sont l’expression d’une violence verbale sans précédent dans notre pays. Ces propos prouvent également les limites d’une opposition en manque de projets et de crédibilité. Une opposition qui n’a que la guerre et le chaos à proposer aux populations gabonaises. »
Alain-Claude Bilie-By-Nze a conclu sa menace et sa communication de propagande à peine voilée, sans fondement, si ce n’est que trouver un vil astuce pour stopper les ardeurs de Jean Ping, en déclarant ostentatoirement que : « Face à cette gravité, nous entendons poursuivre Monsieur Jean Ping en justice, et ça doit se faire ! ». Un timing bien maîtrisé de ce plan de conspiration, à travers un communiqué largement diffusé signé de la presse présidentielle et citant mot pour mot le porte-parole, ministre de la communication du gouvernement indiquant qu’il « explore toutes les voies de droit pour donner une suite judiciaire à ces propos qu’aucune démocratie au monde ne peut ni tolérer ni accepter. »
Tout gouvernement de la République sous l’ère PDG est considéré par l’opinion gabonaise comme étant toujours naturellement l’antichambre du parti au pouvoir. Au lieu de s’intéresser aux missions régaliennes dont il a du mal à réaliser, Ali Bongo qui a déclaré sa candidature à la présidentielle brille dans la confusion des genres. Un porte-parole du gouvernement doit s’intéresser uniquement à l’action gouvernementale et non commenter, critiquer, diffamer, scruter chaque sortie publique de l’opposition gabonaise. Sinon Bilie-By-Nze est libre de le faire mais en se revêtant de sa casquette de membre du PDG. Et donc en dehors du champ gouvernemental vu qu’il s’agit du ressort partisan.
Le parti au pouvoir ayant un siège, le porte-parole du gouvernement, ministre de la communication ne doit pas utiliser les arcanes républicains du pouvoir présidentiel et gouvernemental pour s’attaquer aux pourfendeurs du régime. Continuons à rêver, car au Gabon c’est tout à fait logique et cohérent de tenir une réunion politique du PDG à la présidence de la République, à la Primature et au sein des ministères étatiques. Toutefois, nous continuerons toujours à relever ces contresens des dirigeants politiques gabonais mués en génies de la méconnaissance criarde du sens de l’Etat et de la République au Gabon.
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