Génocide Rwandais : une plainte de Survie vise des responsables Français pour complicité
L’association Survie a déposé plainte, hier lundi 2 novembre contre X auprès du procureur du Tribunal de Grande Instance de Paris, pour des faits de complicité de génocide et complicité de crime contre l’humanité selon un communiqué de presse relayé ce mardi sur le site de la structure associative française.
Cette plainte vise des responsables politiques et militaires français en poste au début des années 90 pour l’assistance qui a été fournie au régime qui a préparé puis commis le génocide des rwandais désignés comme Tutsi en 1994, notamment sous la forme de livraisons d’armes et de munitions avant et pendant le génocide.
En amont du génocide déjà, relève le communiqué de presse de Survie, ’’notre association avait dénoncé l’implication des autorités françaises auprès du régime qui préparait l’extermination des Tutsi au Rwanda. Elle a continué de dénoncer cette proximité notamment dans le livre Complicité de génocide de François-Xavier Verschave paru dès la fin de l’année 1994."
L’association indique dans leur annonce officielle de leur procédure judiciaire : « qu’en 2004, Survie, entourée de journalistes, juristes et simples citoyens, menait une commission d’enquête citoyenne qui concluait à la complicité de génocide. Notre association, indépendante de tout gouvernement, entreprise ou parti politique, a continué son travail militant et bénévole afin que ce jugement citoyen trouve un débouché judiciaire. Aujourd’hui, les documents et témoignages disponibles sont suffisamment solides et étayés pour que nous ayons décidé de déposer cette plainte. »
Avant d’affirmer que, « nous devons la justice premièrement aux victimes rwandaises assassinées en 1994 par l’application d’une idéologie raciste portée par des alliés de nos autorités de l’époque. C’est aussi une exigence, pour nous, citoyens français, vis-à-vis de notre État : nous devons faire la lumière sur de tels agissements, en faire punir les auteurs.’
Pour l’association Survie, la plainte déposée porte sur deux aspects : »d’une part, sur toute livraison française d’armes, munitions ou autres matériels militaires au régime rwandais pré-génocidaire, au début de l’année 1994, malgré les massacres qu’il avait déjà commis, faits qui constituent selon nous une complicité de crimes contre l’humanité. A titre d’exemple le 21 janvier 1994, des munitions ont été livrées aux Forces armées rwandaises (FAR) depuis Chateauroux."
D’autre part, « sur toute livraison française d’armes, munitions ou autres matériels militaires au régime rwandais alors qu’il commettait le génocide, faits qui constituent selon nous une complicité de génocide. Par exemple, le 9 avril 1994, des munitions ont été débarquées des premiers avions de l’opération française Amaryllis et remises aux FAR. Nous rappelons qu’une personne est complice du génocide si elle a fourni une assistance aux auteurs du crime, tout en sachant que ceux-ci le perpétraient, même si elle ne partageait pas l’intention génocidaire. »
Tout en soulignant par ailleurs, que « cette année, François Hollande s’est engagé à la transparence sur l’implication de la France au Rwanda, à travers une annonce de déclassification de documents. Aujourd’hui, de nombreux documents sont encore sous le sceau du secret. A titre d’exemple, la note de la délégation aux affaires stratégique du 24/02/1995, qui évoque des livraisons d’armes pendant le génocide, citée par le journaliste Patrick de Saint-Exupéry n’est toujours pas déclassifiée. »
Sans oublier que, la responsabilité meurtrière du génocide rwandais est partagée entre, « la Grande-Bretagne, Israël et l’Afrique du Sud, entre autres », qui selon Survie "ont aussi livré des armes aux génocidaires. Nous encourageons les citoyens de ces pays à lutter contre l’impunité des complices dans leurs pays respectifs. Pour notre part, en tant que militants français, il est de notre responsabilité de nous occuper prioritairement du rôle de notre État, qui a été l’allié principal des génocidaires."Tout en concluant que, « nous espérons que cette démarche contribuera aussi à dissuader nos dirigeants de soutenir des régimes criminels, en particulier en Afrique. »
Le génocide des Tutsi au Rwanda a fait entre 800 000 et 1 million de victimes, massacrées dans des conditions atroces, pour la seule raison qu’elles étaient Tutsi. Il s’est accompagné du massacre de Hutu opposés à cette extermination. Les groupes Hutu et Tutsi ne constituent pas des ethnies ou des « races » différentes mais plutôt des catégories « socio-éonomiques ». La division entre Hutu et Tutsi a été attisée par les Européens cherchant à « diviser pour régner ».
Le génocide des Tutsi a été planifié et a duré 4 mois, du 7 avril à août 1994. Il est le résultat d’une volonté criminelle du régime rwandais, en guerre contre le Front Patriotique Rwandais (FPR) constitué en grande majorité de Tutsi exilés depuis les pogroms et les massacres dont ils ont été victimes depuis 1959 et auxquels le retour au Rwanda a été refusé.
Les extrémistes hutu au sein du régime n’ont eu de cesse d’attiser la haine anti-tutsi au sein de la population, ultime instrumentalisation d’une division Hutu/Tutsi utilisée comme arme politique. L’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion du président rwandais Habyarimana a constitué l’événement décisif pour la prise du pouvoir par ceux qui se réclamaient du Hutu Power et pour le déclenchement du génocide.
Ce génocide planifié, reconnu par la communauté internationale, a pu être mis en œuvre grâce au silence des grandes puissances, mais aussi et surtout au soutien apporté par les autorités françaises à ceux qui commettaient le génocide.
Rappelons que Survie est une association française de loi 1901 créée en 1984 qui dénonce toutes les formes d’intervention néocoloniale française en Afrique et milite pour une refonte réelle de la politique étrangère de la France en Afrique. Survie propose une analyse critique et des modalités d’actions encourageant chacun à exiger un contrôle réel sur les choix politiques faits en son nom. Elle rassemble les citoyens et citoyennes qui désirent s’informer, se mobiliser et agir.
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