Crise post-électorale

Le Mouvement civique du Gabon se livre sur l’actuelle crise post-électorale gabonaise

Le Mouvement civique du Gabon se livre sur l’actuelle crise post-électorale gabonaise
Le Mouvement civique du Gabon se livre sur l’actuelle crise post-électorale gabonaise © 2016 D.R./Info241

Par la voix de sa présidente, Mengue M’Eyaà, le Mouvement civique du Gabon proche de l’opposition, a livré via un communiqué parvenu à notre rédaction, sa lecture des suites de la crise post-électorale gabonaise. Martelant son soutien au président « élu » Jean Ping, le mouvement citoyen de la diaspora débraie sur la ghettoïsation d’Ali Bongo, la résistance mise en place notamment en France et les enjeux à venir.

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Voici in extenso, le communiqué de presse du Mouvement civique du Gabon daté du 22 octobre intitulé "Opposant-e-s, nous étions, opposant-e-s, nous resterons, mais toujours libres !" :

Le « perroquet national » propagateur des mensonges d’Etat a retrouvé de la voix. M. Ping s’estimant contraint dans sa liberté, et lui répétant qu’il peut aller et venir, comme si la liberté d’un individu se déterminait par le ressenti de quelqu’un d’autre. Or, il s’agit de faits réels,matérialisés par la présence d’un dispositif de forces d’insécurité du régime, devant son domicile et visibles par tout le monde. C’est donc un abîme qui sépare l’opposition et les permanents du coup d’Etat au pouvoir depuis 50 ans. Contrairement à ce que dit le perroquet national, le Gabon n’a pas été reconnu au niveau international, au contraire, le pays est dans un isolement total y compris en Afrique.

Le monde entier sait que M. Bongo n’a pas été élu. Seul son perroquet l’ignore !

Dans des conditions de violence inimaginable, le régime s’est succédé à lui-même, après une comédie autour des résultats du scrutin qui n’a trompé personne dans le monde mais qui a laissé la communauté internationale sans voix. Elle a pris acte de quoi ? Des massacres et des privations de liberté arbitraires de masse ? Du fait qu’il y a deux Présidents au Gabon ? L’un ayant gagné par les urnes, mais empêché d’exercer ses fonctions, l’autre armé jusqu’aux dents, putschiste constitutionnel, tentant un dialogue refusé depuis sept ans ?

L’Union européenne a bien essayé de faire valoir des principes, dénoncé les irrégularités et surtout le stupéfiant renversement des résultats du Haut Ogooué. S’appuyant sur les justes observations de la mission envoyée au Gabon, elle a dénoncé les manipulations. On apprend même que sans gêne, le régime avait fait écouter les communications privées des différents observateurs présents sur place.

L’arrogance d’Ali Bongo a rencontré un succès relatif. Les massacres commis au Gabon et au QG de jean Ping ont révulsé la communauté internationale, mais pas au point de déclencher une opération militaire sous mandat de l’ONU pour restituer la démocratie au Gabon. Il en est ressorti que le régime sort « vainqueur » du coup de force puisque détenant des quantités d’armes considérables et des mercenaires qui ne respectent aucune vie humaine, suivant les ordres reçus de l’occupant du pouvoir.

Les palinodies de la Cour constitutionnelle ont produit le jugement prévisible. Elle a sans trop de précaution habillé le coup d’Etat d’un vernis constitutionnel.

Il n’est pas encore temps de dresser un bilan de ce qui s’est passé.

Le vainqueur de l’élection présidentielle est traqué, obligé de se terrer dans sa résidence au Gabon, pendant que dans le monde entier des Gabonais se sont mobilisés en menant des actions de protestation en France, aux Etats-Unis, à Bruxelles, au Canada, et même dans certaines grandes villes africaines.

Ce mouvement de protestation va au delà même de l’élection, où le vainqueur est une fois de plus le perdant, et où le perdant se voit légitimer, même en cachette.

Bien sûr, la communauté internationale a fait le minimum en ne félicitant pas Ali Bongo, ou en envoyant des délégations de niveau technique, à sa pseudo investiture alors même qu’aucun Gabonais n’est prêt à accepter son maintien au pouvoir.

Pourtant, les événements avaient bien commencé avec des dénonciations exprimées par le Parti socialiste, lequel, dans une attitude exemplaire, a anticipé le coup de force.

C’était sans compter sur le Gouvernement français qui s’en est tenu à une prudente attitude de suivisme verbal de l’Union européenne, presque une résignation devant l’ampleur de la violence d’État du régime et du refus des règles démocratiques. L’Union européenne prendra t-elle des sanctions comme elle le fait dans ce genre de situations ? Elle a en sa possession tous les éléments lui permettant de le faire.

Ainsi, Ali Bongo, l’ « enfant » de la guerre du Biaffra, adopté par Omar Bongo dans les années 70 montre aux occidentaux son vrai visage, alors même qu’il espérait avoir l’air du « dirigeant moderne », selon le qualificatif de l’ancienne conseillère Afrique du Président Hollande.

Ce dernier n’a exprimé publiquement aucune compassion, ni souhait particulier tout au long de la crise, cultivant un silence pour le moins inhabituel quand on connaît la loquacité qui le caractérise quand il s’agit du Congo ou de la Guinée équatoriale.

Pas un mot sur les morts du Gabon.
Rien en direction du peuple gabonais.

Seuls Jean-Marc Ayrault, Ministre des Affaires étrangères, Elisabeth Guigou, Présidente de la Commission des affaires étrangères, ont agi dans les limites de ce qui était malgré tout le domaine réservé du Président de la République française.

Il est sans doute plus valorisant d’aller dénoncer des crimes commis en Syrie ou en Irak que d’agir directement sur ceux commis par un pouvoir illégitime d’un pays ayant une base militaire de 600 soldats français, qui n’ont pas bougé le petit doigt au moment des massacres commis lors de l’assaut du QG de Jean Ping.

Les perspectives sont désormais étroites. Le régime se survit pour le moment à lui-même ,entraînant le Gabon dans une sorte de ghettoïsation internationale, une déconsidération aggravée par la diminution drastique de ses faibles capacités de développement et compte tenu de l’incompétence de ceux et de celles qui en assurent la gouvernance. Les ressources en sérieuse diminution ne pourront suffire à masquer la crise politique et économique dans lesquelles est plongé le Gabon.

Les forces de résistance sont nombreuses. Elles sont majoritaires dans le pays. Le pays réel est hostile au pouvoir illégitime de M. Bongo.

Nous remercions tous les candidats qui ont choisi de s’effacer pour promouvoir une candidature unique qui a permis notre victoire dans les urnes.

Nous remercions également les milliers de gabonais et gabonaises qui continuent à se mobiliser en France et dans le monde, pour que leur vote soit respecté.

Nous souhaitons enfin, pour notre part, remercier le Président Ping d’avoir bien voulu me confier la fonction de porte-parole chargée des Affaires étrangères durant la campagne électorale, celle de défendre les intérêts de l’opposition, tels que précisés dans le mandat qu’il m’a confié.

J’ai tenté dans les limites de visibilité médiatique réduites qui étaient les miennes, de rendre un éclat particulier à la défense des intérêts de l’opposition gabonaise en France comme au niveau international.

Je remercie donc toutes les personnalités en France comme au niveau international , qui ont été sensibles à la situation gabonaise en agissant sur des cas précis et ce malgré un désordre parfois lassant y compris au sein de ce que l’on considère comme étant l’opposition.

Je ne peux que déplorer cependant que la stratégie de communication politique que j’ai mise en place pour Jean Ping, avant la décision de la Cour constitutionnelle, ait été sabotée en interne.

Cette fonction, nous l’avons assumée avec détermination et dignité pour porter haut et fort le vrai Gabon avide de changement et de développement.

Toutefois, nous considérons qu’il est vain de vouloir bâtir une stratégie de résistance à partir de l’extérieur du Gabon .

La mobilisation à l’extérieur doit bien sûr accompagner le processus démocratique, la résistance et le refus du coup d’État. Elle ne peut s’y substituer.

Aussi, nous allons désormais faire entendre notre voix de refus du régime à travers l’expression de nos deux organisations pré-existantes depuis plus d’une dizaine d’années, le Mouvement Civique du Gabon, et le Mouvement Civique des Femmes, que nous présidons.

Nous n’entendons pas intégrer la moindre structure visant à taire les singularités, la richesse et la diversité de ceux et de celles qui, présents sur le terrain démocratique depuis de nombreuses années, mènent un combat collectif pour l’alternance.

Nombreuses sont les personnes présentes dans les manifestations qui ne se considèrent pas comme une « diaspora », mais, Gabonais de l’étranger ou bi-nationaux, bénéficiaires d’une culture démocratique qui leur rend insupportable ce qui se passe au Gabon depuis 50 ans.

Combattant le régime avec force, il est hors de question de s’agréger à une structure dont la caractéristique a démontré par le passé, qu’elle était source de conflits et de rivalités incessantes,d’instrumentalisation improductives.

La cause de la résistance est trop importante pour qu’elle se dissolve dans les différentes stratégies opportunistes de débutants de la vie politique, voire même d’anciens collaborateurs ou collaboratrices du régime, désireux de se refaire une virginité politique en ayant l’exclusivité des médias.

C’est dans le sens de la libération du Gabon que nous souhaitons agir, sans exclusive mais sans concession par rapport au régime . Mais notre combat se fera sur la base des valeurs de liberté,d’intégrité, de démocratie et du respect des hommes et des femmes sincères qui nous définissent.

Nous sommes féministes également. Nous nous battons aussi pour l’égalité femmes-hommes, pour le développement d’ une société mixte et paritaire.

Ainsi, par exemple, nous refusons que des groupes d’hommes monopolisent la parole dans les manifestations parisiennes devant l’ambassade.

Chacun doit pouvoir prendre la parole ,dans les limites du temps qui nous est imparti.
Vouloir le changement,c’est commencer par considérer qu’une femme est son égal.
On ne peut vivre en France comme si on n’avait jamais quitté son village.
Nous combattons donc le tribalisme , le sexisme et le machisme.

Les échanges participatifs doivent demeurer pour maintenir la flamme de notre combat ,et non pas les intrigues et les dénigrements moteurs d’avancement hérités du PDG .

Nous combattrons avec force ceux et celles qui n’ont pas compris qu’ils ne sont plus dans le régime Bongo.

Nous n’accepterons jamais les suites du coup d’État électoral mené par le clan Bongo.

Il suffit d’observer la créativité et la détermination de tous et de toutes, dans les marches de libération du Gabon par delà le monde.

Nous n’accepterons pas non plus que la formidable mobilisation des Gabonais de l’étranger pour défendre les valeurs de la démocratie ,soit confisquée par des apprenti-e-s sorcier-e-s en quête d’une respectabilité opposante.

Notre combat pour l’alternance est plus grand que nos personnes..
La résistance est avant tout un état d’esprit que tous les Gabonais ont aujourd’hui en partage.

Paris, le 22 octobre 2016.

Mengue M’Eyaà

@info241.com
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