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Emmanuel Macron, le nouvel « ami » d’Ali Bongo

Emmanuel Macron, le nouvel « ami » d’Ali Bongo
Emmanuel Macron et Ali Bongo sur le perron de l’Elysée à Paris, le 12 décembre 2017 © 2018 D.R./Info241

Les dirigeants africains sont friands de relations « familiales » avec les dirigeants français. On se souvient encore d’un Bokassa qui appelait Charles de Gaulle « papa » et d’un De Gaulle qui appelait Bokassa tout aussi chaleureusement « le soudard », « le couillon » ou encore « le cinglé ». On se souvient également du même Bokassa dont Valéry Giscard d’Estaing était « le Cher Parent » et d’un Jacques Chirac « ami très cher » d’Omar Bongo et de Mobutu Sese Seko. Aujourd’hui cette merveilleuse tradition se perpétue avec une dernière merveille en date : l’amitié entre Emmanuel Macron et Ali Bongo.

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On savait Emmanuel Macron et Ali Bongo particulièrement pas très proches. De l’avis de connaisseurs de la politique française, il n’a jamais été question d’amitié entre Emmanuel Macron et le fils aîné d’Omar Bongo plus connu pour ses activités musicales (lorsqu’Ali Bongo a publié son premier album "A brand new man" avec l’orchestre de James Brown en 1978, Emmanuel Macron avait un an !) aux résultats décevants malgré des moyens publics colossaux investis. Mais à en croire Ali Bongo qui revendique une amitié avec Emmanuel Macron, on s’était trompé.

La traversée du désert

Interrogé sur l’élection de 2016 au Gabon et sur la sanglante répression qui s’en est suivi, le candidat Emmanuel Macron s’était - sans clairement dénoncer les multiples violations de droits de l’Homme au Gabon – bien gardé d’apporter son soutien à Ali Bongo. Une fois élu, Emmanuel Macron avait évité soigneusement d’inviter Ali Bongo à l’Elysée, ni même de lui rendre visite.

Cela avait eu pour effet d’isoler Ali Bongo, qui dès lors faisait tout pour montrer urbi et orbi qu’il avait le soutient de Paris. La disette était telle que le régime gabonais, toute honte bue, alla jusqu’à présenter grossièrement un message de félicitation traditionnel à l’occasion de l’indépendance du Gabon comme une reconnaissance d’Emmanuel Macron, ce que l’Elysée s’empressa de démentir !

Puis il y eut l’intervention de Lionel Zinsou, proche de Macron, invité à Libreville et grassement payé (près d’1 million d’euros) par Ali Bongo pour redorer son image en participant à un séminaire gouvernemental gabonais au cours duquel Lionel Zinsou anima tout de même une conférence au thème plus que nébuleux : Trajectoire de développement de l’Afrique, de l’Afrique centrale et du Gabon : perspective et défis. A Libreville, l’équipe de communication d’Ali Bongo se tuait pourtant à la tâche pour rehausser l’image du « Patron », mais les résultats n’étaient pas au Rendez-vous…

Sauvé par la forêt…et le réchauffement climatique

Heureusement pour Ali Bongo - et bien qu’il n’y soit absolument pour rien - le Gabon appartient au bassin du Congo le « deuxième poumon » de la terre après l’Amazonie et 85 % de son territoire est recouvert par la forêt équatoriale. Ce qui qui fait que le Gabon possède le plus fort taux de superficie forestière par habitant en Afrique. Et comme il est de plus en plus question de réchauffement climatique et de la préservation des forêts tropicales pour le freiner, le Gabon est sollicité, ce qui signifie pour Ali Bongo un retour en grâce, mieux une renaissance et il compte bien en profiter surtout que c’est le seul atout qui lui reste, puisque personne de sérieux ne le considère comme un démocrate ou encore un dirigeant adepte de l’orthodoxie financière de gestion.

Ali Bongo rencontre enfin Emmanuel Macron !

La première rencontre Bongo-Macron a eu lieu aux Etats Unis dans les locaux de l’ONU en marge d’un sommet sur le climat le 19 Septembre 2017. Une certaine presse, connue pour ses articles à la gloire d’Ali Bongo, s’empresse de saluer ce « geste de reconnaissance » d’Emmanuel Macron qui a n’a pas jugé utile d’inviter Bongo à l’Elysée mais à l’ONU pour parler du climat et du rôle que la forêt gabonaise doit jouer dans sa préservation. La même presse présente cela comme « un sérieux revers stratégique pour l’opposition radicale coalisée autour de Jean Ping ». Ali Bongo jubile, mais ce n’est pas assez, il lui faut d’autres photos avec Emmanuel Macron…

Au sommet UE – UA de Novembre dernier à Abidjan, Ali Bongo revoit Emmanuel Macron, des meilleures photos sont prises. Mais cela ne suffit pas, Ali Bongo tient à montrer à tous qu’il est proche du jeune président français. Pour ce faire, il n’hésite pas à se faufiler entre ses « collègues » au point de « coller » Paul Biya, le Président du Cameroun pour aller rejoindre Emmanuel Macron alors en discussion avec le Roi du Maroc Mohamed VI. Lorsqu’il les laisse poursuivre leur conversation, Ali Bongo est transfiguré, il est enfin « reconnu » par la France et par son Président, « une reconnaissance de paternité » en quelque sorte. Mais ce n’est pas tout, comme Bokassa et Giscard étaient « parents », Ali Bongo décide de clamer qu’Emmanuel Macron et lui sont « amis ».

Ali Bongo de retour à Paris

Invité au One Planet Summit, Ali Bongo, faux président de la République Gabonaise mais véritable phénix sanglant, prépare minutieusement son arrivée. Largement battu dans les urnes au Gabon et en France où se trouve la plus forte communauté gabonaise à l’étranger qui manifeste sans discontinuer depuis septembre 2016, Ali Bongo n’hésite pas à faire venir par charters ses supporters du Gabon. Et comme ses supporters en France ne sont pas légion, Ali Bongo n’hésite pas à payer 500 euros par jour ses « soutiens » qui se recrutent parmi tout ce que Paris compte « d’Africains désœuvrés et opportunistes ».

Ce sont ces « soutiens » qui sont chargés de l’acclamer à chaque fois qu’il entre ou sort de l’Hôtel Georges V où il a pris ses quartiers surtout que plus loin, contenus par les CRS, ses opposants manifestent bruyamment et le traitent d’assassin ! Ali Bongo rassuré et serein, se rend au enfin au One planet summit où il compte rencontrer Arnold Schwarzenegger, revoir Bill Gates et bien entendu revoir Emmanuel Macron qui l’a invité à dîner en compagnie d’autres dirigeants africains.

« Mon ami, le président Emmanuel Macron »

Interrogé sur la contribution du Gabon à la lutte contre le réchauffement climatique, lors du One Planet Summit, Ali Bongo, très attaché à des fiches très peu pointues et tenant un discours truffé de fautes de syntaxe (il en a profité pour inventer le mot : vulnabilité ), se présente en défenseur de l’environnement (annonce la création d’un fonds dont le Gabon est le premier contributeur à hauteur de 500.000 dollars US !), mais surtout réclame, revendique à deux reprises son amitié avec Emmanuel Macron qu’il appelle très affectueusement« mon ami, le Président Emmanuel Macron ».

Il est difficile de savoir si Emmanuel Macron considère réciproquement Ali Bongo comme son ami. Ce que l’on sait, grâce à la loquacité d’Ali Bongo qui n’a pas voulu selon ses dires « mobiliser la parole », c’est que son « ami, le président Emmanuel Macron » lui a donné un conseil : « Si tu prends la parole, c’est que tu as quelque chose à dire et annoncer » … si ce n’est pas un conseil d’ami.

@info241.com
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