Elections législatives

Bourdes Ogouliguende : « Ceux qui veulent aller aux élections législatives gabonaises dans le désordre actuel doivent se ressaisir »

Bourdes Ogouliguende : « Ceux qui veulent aller aux élections législatives gabonaises dans le désordre actuel doivent se ressaisir »
Bourdes Ogouliguende : « Ceux qui veulent aller aux élections législatives gabonaises dans le désordre actuel doivent se ressaisir » © 2018 D.R./Info241

La crise post-électorale au Gabon a atteint une aggravation alarmante qui fait que le pays est grièvement divisé eu égard du non respect de l’expression démocratique du peuple par le régime Bongo-PDG au sortir de l’élection présidentielle du 27 août 2016. C’est face à cette inquiétante radicalisation de la dictature que le régime d’Ali Bongo prône curieusement une ’’démocratie despotique ’’ en voulant s’autoriser unilatéralement l’organisation des législatives en mars 2018. En réponse à cela, Jules Bourdes Ogouliguende, ancien Président de l’Assemblée Nationale du Gabon (1990 à 1993), Président du Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ), membre de la Coalition de Jean Ping s’adresse aux chantres de ’’ la prise du pouvoir par les législatives ’’, à travers une analyse empreinte d’un vécu politique intitulée : ’’Elections législatives : le culte du désordre’’. Dans cette dernière, l’opposant averti scrute les postures ombrageuses et positionnements fébriles de l’opposition gabonaise. En rappelant cette implacable vérité : ’’Ceux qui veulent aller aux élections législatives dans le désordre actuel doivent se ressaisir. Il ne s’agit pas de boycotter les élections. Il s’agit de faire en sorte qu’elles aient lieu dans le cadre des réformes nécessaires. Le Passé n’a pas été qu’un simple moment déjà relégué dans nos souvenirs proches ou lointains, avec ses errements et avancées. Il est un miroir qui structure le Présent avant d’éclairer le futur. Songeons-y !’’.

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Comme à l’accoutumée cette réflexion de l’ancien Président du Parlement gabonais respire l’expérience d’un homme politique averti autour des faits rien que les faits. Elle vise assurément une énième fois à lancer une une prise de conscience nationale sur le machiavélisme politique d’Ali Bongo et de ses sbires qui ne sont pas d’être contaminés par l’Esprit Républicain. Mais aussi, elle lance une énième alerte d’alarme à la communauté internationale, aux tenanciers du régime d’Ali Bongo et à leurs soutiens des lobbys Françafricains au sujet de ce déni de démocratie patent en présence en terre gabonaise. Sinon qu’ils commencent à reconnaître la fraude électorale à la soviétique du 27 août 2016 et surtout les graves violations des droits de l’homme qui ont endeuillé de nombreuses familles gabonaises.

Nous vous livrons dans les lignes suivent l’intégralité de cette analyse de l’homme de loi, Monsieur L’Honorable Jules-Aristide Bourdes-Ogouliguende qui gagnerait à être relayée et intériorisée par les membres qui constituent des véritables défenseurs et piliers d’une alternance démocratique, de l’état de droit et de la restauration des Valeurs Républicaines au Gabon. Comment est-ce logique de prendre part aux prochaines Législatives repoussées à l’envi après le projet de révision constitutionnelle qui vide le Parlement, le Gouvernement et toutes les institutions de leurs missions régaliennes ? S’interroge le président du CDJ.

Face aux tenants d’une participation aux élections législatives organisées par le Pouvoir d’Ali Bongo, les récents propos du Professeur André Wilson-Ndombet sur la position contraire sont dignes d’intérêt. Une réflexion sur les tenants et les aboutissants desdits propos s’impose à chaque homme politique et commentateur épris de démocratie et militant de l’Etat de Droit.

De nombreuses personnes non suspectes de collusion avec le Pouvoir estiment qu’il est temps de balayer le Pouvoir d’Ali Bongo par une victoire aux urnes incontestable. Ils affirment que le rejet de ce pouvoir est tel qu’une élection dans les conditions actuelles ne peut qu’aboutir à une déroute du PDG qui donne l’impression d’être divisé entre plusieurs courants, situation confortée par une lutte de personnalités meurtrière. Ils ajoutent que le boycott des élections n’apporte rien au boycotteur. Il conforte les adversaires politiques membres du Pouvoir. Ceux-ci en profitent pour confisquer et instrumentaliser tous les leviers du Pouvoir et toutes les Institutions de la République.

En conséquence, cette situation éloigne le pays d’une alternance politique attendue et vivement souhaitée aussi bien par la Classe Politique que le Peuple. Ils évoquent pour asseoir leur position, le boycott des élections législatives de 2011 qui ont donné au PDG une position extra dominante dans une Assemblée Nationale introuvable. Celle-là même qui vient de voter dans la soumission, un projet de Constitution décrié et non consensuel.

Tous ces arguments sont estimables et sont de bonne foi. La seule remarque que nous faisons est la suivante : Tirons nous au moins les enseignements du passé qui font que des années durant alors que l’alternance politique semble proche et à la portée de l’opposition, c’est toujours le PDG et le Président en place qui récoltent la mise, reprennent du poil de la bête et finissent par détricoter les quelques avancées démocratiques obtenues ?

Pour les plus jeunes, il y a peut-être un manque d’éléments de comparaison et d’analyse, mais pour les plus anciens et les hommes politiques de plus de 45 ans qui ont une vision et des repères de la vie politique gabonaise, en est-il de même ? Assurément non. Rien ne nous échappe des faiblesses et lacunes du Parti Démocratique Gabonais. Nous connaissons tout autant la force de l’opposition et sa faiblesse stratégique. Les enseignements et conclusions tirés par les uns et les autres diffèrent en raison de la « perception de la bonne foi » des interlocuteurs du Pouvoir.

Des années durant l’opposition s’est attachée à exiger la mise en place de conditions d’organisation des élections politiques transparentes et incontestables. La fiabilité des élections étant une condition sine qua non d’une arrivée pacifique de l’opposition au pouvoir avec une large adhésion du Peuple. Les initiatives pour l’organisation apaisée de la vie politique et des conditions d’accession au Pouvoir ont toujours donné lieu à des disputes sans fin et des divisions dans le camp de l’opposition qui s’est révélée bien plus hétéroclite qu’on l’aurait souhaitée.

La faiblesse stratégique de l’opposition vient de cette hétérogénéité congénitale qui peut se comprendre. La diversité de l’origine des « oppositions » plus marquées par des antagonismes de personnalités, les ambitions et calculs personnels, constituent un lourd handicap. Ce qui provoque une incapacité des dites oppositions à s’agréger et conjuguer leurs forces communes. L’incapacité de mettre en place une plateforme idéologique et l’élaboration des procédures et mécanismes pour une conquête commune du Pouvoir avec un, ou trois Chefs de file incontestables démontre la faiblesse de cette opposition, la nôtre !

Et surtout explique l’indiscipline et l’incapacité à prendre le pouvoir et à le conquérir au moment où tout semble possible. Cette situation regrettable est renforcée par la volonté pour chacun d’exister de manière autonome et la diffusion de stratégies individuelles qui ne peuvent emporter l’assentiment de tous parce que prises de manière unilatérale. La crise post-électorale que traverse notre pays depuis août 2016, au lieu de servir à consolider l’opposition face à un Pouvoir inique et truqueur, a plutôt permis à celui-ci de prendre des initiatives toutes plus anti-démocratiques les unes que les autres.

Il s’ est imposé aux gabonais à l’usure après l’avoir fait par la confiscation du résultat des urnes travesti, falsifié, maquillé et truqué par des Institutions sans foi ni morale. Ce Pouvoir intimide par la violence des armes, la chasse aux jeunes Résistants et les emprisonnements arbitraires. Il entend verrouiller et museler l’Etat !

L’idée d’aller aux élections législatives et avoir la foi en une victoire certaine au terme du processus est séduisante. Pourtant, elle est illusoire à plus d’un titre !

Elle l’est d’abord sur un point d’évidence. Qu’est ce qui justifie un tel optimisme ? Les électeurs n’appartiennent à personne. Ils n’ont pas le même agenda ni les mêmes préoccupations que la Classe Politique ! Les électeurs se donnent bon gré mal gré à ceux qui les courtisent, leur apportent des réponses et solutions au jour le jour à des préoccupations immédiates. Ils peuvent ne pas partager leurs convictions politiques, peu leur importe, ils ont besoin de résoudre des problèmes de survie qui s’accommodent mal des lendemains conquérants qui ne chantent au présent qu’à voix basse. A ce niveau, rien n’est garanti ni gagné d’avance !

Elle est illusoire ensuite à cause des moyens et du cadre d’organisation d’une campagne électorale ; avec un Code Électoral, une CENAP, une Cour Constitutionnelle qui ont montré leurs limites et leurs insuffisances. Nous sortons d’une élection présidentielle avec des points totalement anti-démocratiques soulignés par l’opposition depuis des années et qui ont été mis en lumière par les Missions d’observation des élections de la Francophonie, de l’Union Africaine et fondamentalement par celle de l’Union Européenne.

Les réformes proposées Lors du dialogue organisé par le Pouvoir lui-même concernant le Code Électoral, la CENAP, la Cour Constitutionnelle ne sont même pas traduites dans les textes à 3 mois des élections. Sauf si quelque chose m’a échappé, je voudrais que nos amis de l’opposition qui militent pour une participation aux élections législatives avec cette même CENAP, Cette même Cour Constitutionnelle, nous fassent état des avancées obtenues sur ces points qui nous pousseraient à accepter non seulement une participation, mais une organisation d’élections qu’ils jugent gagnables !

Nous ne pouvons pas évacuer ce problème. Nous devons en débattre d’urgence !
Au sortir de l’élection présidentielle, Ali Bongo, pour desserrer l’étau qui l’étreignait, a promis fondamentalement deux choses : Organiser un Dialogue qui englobe les acteurs politiques et Réformer les Institutions. Il avait même affirmé sur la question de savoir sur quoi porterait le dialogue ? « Sur tout », avait-il précisé. Il a présenté une consultation organisée à grands frais et renfort médiatique, avec des personnalités toutes acquises à sa cause, comme le « Dialogue » dont les Actes n’ont nullement été publiés, mais défendus becs et ongles par ces personnalités au bagout avéré et habituées à changer de positions aussi rapidement qu’une météo capricieuse !

Un Gouvernement a été nommé et installé. Les élections législatives fixées d’abord en Juillet 2017 viennent d’être reportées une fois encore en Avril 2018. Des nominations intempestives ont été effectuées dans les administrations et les sociétés du secteur public. Et comme cerise sur le gâteau, une Constitution dont le sens autant que la finalité sont incompréhensibles a été votée par une Assemblée Nationale dont le Mandat a été prorogé à deux reprises par la seule volonté d’Ali Bongo et la Cour Constitutionnelle.

Il est important de rappeler que l’engagement politique est un combat qui implique sincérité et honnêteté ; il ne se circonscrit pas aux propositions et autres ambitions personnelles de court terme. Il s’accommode mal de la précipitation et de l’improvisation. On parle même de la mise en place d’une transition qui exclurait Jean Ping et Ali Bongo du Processus. Cette position peut paraître séduisante pour de nombreuses personnes. Elle n’est pas réaliste ! Autant que ne sont point réalistes les positions et propos de tous ceux qui pour des raisons plus ou moins obscures accablent Jean Ping de tous les maux, jusqu’à considérer qu’il est à l’origine de la crise post-électorale en cours ! On parle encore de la convocation d’un troisième Dialogue ! Qui convoquerait ce 3è dialogue, sur la base de quelle légitimité ?

Ceux qui veulent aller aux élections législatives dans le désordre actuel doivent se ressaisir. Il ne s’agit pas de boycotter les élections. Il s’agit de faire en sorte qu’elles aient lieu dans le cadre des réformes nécessaires. Le Passé n’a pas été qu’un simple moment déjà relégué dans nos souvenirs proches ou lointains, avec ses errements et avancées. Il est un miroir qui structure le Présent avant d’éclairer le futur. Songeons-y ! Qu’avons-nous à gagner dans un scrutin sans repères ? Pensons-nous sérieusement que la participation à ces élections conduira Ali Bongo à une remise en cause d’un système dont il est le principal bénéficiaire ? Nous sommes nous posés la simple question de bon sens suivante : Qu’est ce qui fait courir Ali Bongo ? Depuis quand suivre les manipulations et les circonvolutions de nos adversaires politiques constitue-t-il un gage de cohérence et de rationalité ?

Si le Pouvoir a fait voter par son Assemblée, une Constitution à sa mesure, il est capable de bien lui faire adopter les réformes pour le renforcement de l’Etat de Droit et la Démocratie. La Démocratie Universelle, pas celle des Tropiques à laquelle semble attaché le Pouvoir actuel et ses thuriféraires ! Nous avons à prendre tous conscience de ce que la banalisation de l’indignation face aux élections maintes fois truquées crée le désamour et suscite, à la longue, discrédit et incrédulité auprès des populations acquises à la cause du Changement ainsi qu’auprès des Institutions qui œuvrent pour la DIGNITE ET LE BONHEUR DES HOMMES.

L’attentisme et le mutisme actuel de la Communauté Internationale sur le cas du Gabon procède de cette lassitude des combats menés sans cohérence.
Quand c’est de notre fait, quand les règlements des conflits et les crises sont sans fin et que les solutions avortent à cause de manœuvres irréfléchies, la désaffection se trouve renforcée avec un anathème d’incompétence et de manque de savoir-faire.
NOUS DEVONS RELEVER LE DEFI
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Jules-Aristide Bourdes-Ogouliguende, est né le 28 février 1938 à Libreville, est un homme politique gabonais. Il est le président du Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ), un parti d’opposition. Il a été ministre de 1976 à 1990 et fut le président de l’Assemblée nationale de 1990 à 1993. Lors des élections législatives de 1990, il est élu en tant que candidat du PDG, puis est élu président de l’Assemblée nationale, le 20 novembre 1990. Lors de son mandat à l’Assemblée, il a développé une certaine indépendance et il lui est arrivé de voter avec l’opposition. Il a démissionné du PDG en janvier 1993, puis de son mandat à l’Assemblée en avril. Il s’est présenté à l’élection présidentielle de 1993 au sein de la Convention des forces du changement et a terminé 5e avec 3,38 % des suffrages exprimés. Aux élections législatives de 1996, Bourdes-Ogouliguende est élu dans la circonscription de Port-Gentil. Il fut candidat à l’élection présidentielle anticipée de 2009, qui fît suite à la mort d’Omar Bongo Ondimba.

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