Si les dessous de l’apparente « paix » du Gabon m’étaient contés ! C’est à cet exercice que notre rédaction vous convie. La paix est donc cette émanation politique importée depuis 1967 au Gabon par le patriarche françafricain Omar Bongo à condition, bien entendu, que seul lui et ses pairs se partagent l’avenir doré de ce pays pétrolier aux 1,5 millions d’âmes. Il y règne donc une omerta sur la nécessaire fusion entre impunité et enrichissement illicite ! Tour d’horizon de cette paix politique aux forts relents de malversations financières privées.
Seule « l’alternance dans la transparence des urnes (…) parle la langue de l’alternance démocratique et pacifique lors des élections », chante l’éclaireur des consciences P.C. Akendengué. Cependant, les chantres de « l’Avenir en confiance » ont toujours voulu nous faire croire qu’il existe au Gabon une seule et unique classe d’hommes capables de nous garantir « la paix » et sans qui cette paix se trouve menacée. Si nous n’irons pas jusqu’à répéter qu’ « on ne mange pas la paix », demandons-nous néanmoins de quelle « paix » s’agit-il ? Admettons-nous qu’au Gabon y règne une « paix des cimetières » comme l’a souvent rappelé M. Edzodzomo-Ela ?
En effet, dire et soutenir que si notre pays est à l’abri des conflits armés est le fait des pouvoirs ou de la volonté de certains individus, c’est, de manière subtile, nous rappeler une évidence : au Gabon les personnes et groupes de personnes qui ont les moyens d’équiper et d’entretenir des bandes armées pour défendre et préserver leurs intérêts ne sont pas nombreux ; ils sont connus !
Ce sont les mêmes qui instrumentalisent et ont toujours instrumentalisé les forces de défense et de sécurité en les transformant en « milices d’Etat ». Ce ne sont pas nos voisins et parents de Belle-vue, de Kinguélé, de Cocotiers, des Akébés, de Matanda, de Mini-Prix, de Quartier Sud etc. Le discours sur la paix est suffisamment clair : tant qu’ils tiennent les caisses de l’Etat, contrôlent l’armée, « gèrent » le pays et toutes ses institutions, il y aura « la paix ». Dans le cas contraire…. C’est l’autre vérité des prédicateurs de la paix.
Une opération de gendarmerie à Libreville © GabonActu.com
Ce discours, au-delà d’autres intentions malveillantes qu’il nourrit et entretient, a pour but de jouer sur les peurs. Peurs qui, entre autres, tétanisent toute conscience citoyenne et transforment ainsi le peuple en « zombis » ou « objets » politiques. C’est donc à juste titre que l’économiste Edzodzomo-Ela parle de « paix des cimetières ». Cette « paix » a donc un prix réel auquel les Gabonais la payent et auquel ses chantres la font régner : C’est le « terrorisme d’Etat ».
« Etats voyous » et « gouvernement de voyous » ?
Souvenons-nous que c’est sous le vocable d’ « Etats voyous » qu’au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis qu’étaient désignés, par l’administration G.W. Bush, les pays soupçonnés de soutenir et financer le terrorisme et, ainsi, semer peurs et chaos sur d’autres territoires. Si nous ramenons cette expression au contexte politique africain, les « Etats voyous » pourraient désigner ces pays dans lesquels les constitutions et institutions sont dévoyées au gré des groupuscules qui tiennent les manettes du pouvoir ; dans lesquels les forces armées et de défenses sont transformées en milices d’Etat ; dans lesquels les médias publics servent d’organes de propagande aux partis au pouvoir et sont fermés aux partis d’opposition et à la société civile ; dans lesquels l’ordre établi est assimilé à l’ordre public. En somme, dans les « Etats voyous » africains les institutions politiques sont littéralement prises en otage par des « groupes d’intérêts » et les peuples sont bâillonnés, le tout couvert par des lois iniques pour donner un semblant de légalité à ces archaïsmes politiques et idéologiques. Ce sont là les aspects de ce que nous appelons « le terrorisme d’Etat » en vigueur dans les démocraties bananières tel que la Gabon.
Ali Bongo le 13 janvier 2010 à Yamoussokro
Bien qu’il n’ait jamais refusé d’aller y siéger chaque fois que proposition lui était faite, Pierre-Claver Maganga Moussavou ne parlait-il pas déjà de « gouvernement de voyous » dans notre pays au début des années 1990 ? Que dire du scénario de la proclamation des élections présidentielles de 1993 et dont le remake a été réalisé et sorti en 2009 avec quelques petites différences au casting ?
Pour (douloureux) rappel, en 1993 le processus de décompte des voix fut interrompu par des para-commandos emmenés par un officier supérieur de l’armée, proche parent du candidat proclamé officiellement vainqueur. La suite on la connaît. En 2009, c’est encore après une intervention militaire que des résultats fondés sur des procès-verbaux non valides juridiquement, car n’ayant pas été signés par tous les membres de la Commission Nationale Electorale et Permanente (CENAP), que celui qui ne put affronter une simple primaire au sein de son propre parti fut officiellement proclamé vainqueur. La suite on la subit.
Entre temps, ces mêmes escadrons, en 1993 et 2005, sont allés saccager domiciles, médias et sièges des principaux challengers du parti au pouvoir, attentant même à leur intégrité physique. Et comme récemment on a utilisé les mêmes méthodes et recettes de barbouzes ; les fameuses caches d’armes. Curieusement c’est toujours quand il se sent acculé que ce pouvoir honni et vomi depuis longtemps que ses milices découvrent les « caches d’armes ». Et comme toujours, seuls l’ « éminente juriste » qui préside depuis toujours la Cour Constitutionnelle et ceux qui l’accompagnent dans cette « lourde tâche » peuvent démontrer le caractère objectivement juridique des arguments souvent avancés pour vider les contentieux nés de ces parodies d’élections.
Tout est donc conçu sous le leitmotiv que Laurent Gbagbo a eu au moins l’honnêteté de revendiquer ouvertement : « on gagne ou gagne ». La suite de cette « manière de penser et d’agir » on la connaît aussi, et ne l’ignorent ou l’ont oublié que ceux dont le psychique est altéré par le « Syndrome du Titanic » dont le principal symptôme est caractérisé par « l’illusion de l’invincibilité et de l’immortalité ».
Le chantage politique autour de « la paix » est fondamentalement soutenu par ce terrorisme d’Etat. Ayant pour principe « qu’on ne perd pas une élection qu’on organise », c’est donc en bons démagogues et avec tout le cynisme que « le bon dieu leur a donné » qu’ils viennent nous faire les leçons sur le « respect des institutions et de ceux qui les incarnent » ou sur le « recours aux voies légales et démocratiques ». Et ils viennent de nous le rappeler, non sans arrogance et mépris : ils y sont, ils y restent.
Et ce, par tous les moyens. C’est clair ! Ce ne sont pas les mêmes qui promettent d’ « écraser tous les chiens qui aboient » ? Allez-y comprendre ! Mais mesdames et messieurs, « distingués camarades » (sic), la première institution à respecter n’est pas celle incarnée par le peuple, c’est-à-dire la souveraineté ? C’est pourquoi quand l’opposition actuelle se projette déjà vers la présidentielle de 2016 sans strictement poser les conditions et interroger les acteurs de son organisation, nombreux Gabonais restent perplexes et sceptiques.
Quel scénario pour 2016 ?
Soyons honnêtes envers nous-mêmes et lucides, voire triviaux : même dans le pire des scénarii ou des cauchemars, voyez-vous un seul instant Marie-Madeleine Mborantsuo venir sur les antennes et devant les caméras de la RTG dire que son fils (contentons-nous de rester dans l’anthropologie de la famille gabonaise) Ali Bongo n’a pas gagné les élections ? « Ne riez pas, c’est sérieux ! », on ne peut avoir un grave différend avec son voisin et aller demander à sa mère de trancher !
Marie Madeleine Mbourantsuo, l’éternelle présidente de la Cour constitutionnelle
Réné Aboghé Ella qui dans la vie privée comme en public « fait affaires » aux côtés de Mborantsuo, la mère d’Ali Bongo Ondimba, « c’est cadeau ? » « Le » Réné Aboghé Ella là qui, comme Ali Bongo Ondimba et Mborantsuo et à la suite de leur « demi-dieu, faux dieu », veut, a priori, lui aussi son record de « 40 ans de pouvoir » pourra enfin nous organiser des élections sans cafouillage ? Guy-Bertrand Mapangou lui-même ne sait pas faire la différence entre le moment où il est ministre de l’Intérieur et celui où il est le fils et filleul politique d’Ali Bongo (ndlr - on oublie parfois d’ajouter Ondimba, il nous en excusera), pour qui il « appelle à la candidature et paye la caution ».
Alors, imaginer qu’il a été nommé à ce poste stratégique à quelques mois de la dite présidentielle sans calcul politicien et croire que, lui, Mapangou Guy Bertrand, puisse, même par lapsus, proclamer des résultats donnant Ali Bongo Ondimba perdant, c’est faire dans la fiction politique ou politique-fiction. Pareil scénario ne serait envisageable ni à Hollywood, ni à Nollywood, mais uniquement à Bolywood, car c’est le seul véritable monde des Bisounours où tout se fait et s’exprime en danses et en chansons. « Ne riez pas, c’est sérieux », chers compatriotes et excusez mon ton caustique, car la « vérité se dit en blaguant ». C’est là où il faut louer la lucidité, le pragmatisme et le réalisme de Daniel Mengara…
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