Invité de la rédaction

Omar Defunzu : « L’humour et la culture seront les matières premières de demain de l’Afrique »

Omar Defunzu : « L’humour et la culture seront les matières premières de demain de l’Afrique »
Omar Defunzu : « L’humour et la culture seront les matières premières de demain de l’Afrique » © 2020 D.R./Info241

Après avoir ouvert les portes ce 5 octobre de son Defunzu Comedy Club (DCC), la rédaction d’Info241 a rencontré pour vous le président de l’humour gabonais : Omar Defunzu. L’humoriste revient sur le lancement de cette première école de formation professionnalisante de l’humour lancée à Libreville, sur sa carrière et l’avenir de l’humour qu’il considère comme le pétrole, le manganèse, le bois, l’uranium de demain du continent africain.

Moov Africa

Omar Defunzu, bonjour. Merci d’être l’invité de la rédaction d’info241. Vous n’êtes plus à présenter dans le domaine de l’humour au Gabon et même en Afrique. Vous avez près de 20 ans de carrière. Vous venez d’ouvrir à Libreville la toute première grande école d’humour au Gabon et en Afrique.

 Info241 : Comment vous est venue l’idée de la mise en place du « Defunzu Comedy Club », cette école toute spéciale ? Qu’appendront vos futurs élèves ?

Omar Defunzu : Déjà pour revenir sur l’histoire, c’est un projet qui date depuis 10 ans. En 2012, j’avais déjà créé un espace de laboratoire pour donner un espace de formation aux jeunes qui souhaitent embrasser la carrière d’humoriste. A l’issue de ce labo, nous avons Zaef qui évolue aujourd’hui en France. Il nous envoie la bonne nouvelle qu’il joue déjà sur la scène de Jamel Comedy Club. Nous avons aussi Yann KOKO qui se déploie sur la toile et sur certains festivals sur le continent.

La photo de famille du lancement du DCC

Et en 2013, j’ai été sollicité pour la formation. Tout ce cas pour former la future génération des humoristes congolais et donc le prix RFI Talents du rire sort des jeunes qui ont suivi ma formation dont Doncien Koukeboukila et bien d’autres. Je suis parti du constat qu’il y’avait un véritable engouement pour les jeunes qui souhaitaient embrasser le métier et sollicité à avoir un cadre d’apprentissage. Comme il y’avait pas un cadre d’apprentissage et qu’il n’y avait pas une formation proprement dite en 2012, je suis allé me former à l’école du One man show de Paris.

C’est à l’issue de cette formation que j’ai créé le labo et après j’ai suivi d’autres formations parallèles avec les professeurs sortant de l’école de l’humour du Québec. Aujourd’hui, c’est un projet qui me tient vraiment à cœur de doter le Gabon d’un cadre exceptionnel parce qu’on va dire c’est la première école du genre en Afrique. Nous sommes en train d’inscrire le Gabon à un autre niveau. Faire parler du Gabon autrement que par sa politique, par son bois, par son pétrole.

Pour ce que les élèves vont apprendre à l’école, ils vont apprendre les notions. Ils vont commencer étape par étape, le baba, les procédés humoristiques, les techniques d’écriture, d’interprétation comique… L’idée derrière est de former des humoristes professionnels capables de vivre de ça, comme tous les autres métiers à part entière. Comme par exemple les médecins, les enseignants… L’idée, c’est de suivre leur cursus normal de deux ans à l’issue duquel ils seront capables de livrer leur matériel humoristique pour la radio, pour le web, pour le cinéma etc.

 Quelles sont les difficultés que vous avez dû rencontrer, en lançant cette école qui a été inaugurée il y a quelques jours ?

Omar Defunzu : Les difficultés sont à tous les niveaux. La première difficulté, c’est le nerf de la guerre : l’argent. Mais aujourd’hui, nous avons tenu à mettre en place cette école pour montrer que nous même nous devons d’abord chercher les voies et moyens pour créer notre richesse. La seule matière que nous avons pour démarrer, c’est la connaissance, c’est la compétence. C’est ce que nous mettons en valeur et quand vous voyez toute l’équipe qui m’accompagne chacun dans son domaine d’activité est un leader.

Le président Defunzu

C’est vraiment quelque chose de professionnel et donc les difficultés sont plus sur le plan humain parce qu’aujourdhui, les gens ne font pas confiance dès le départ tant qu’il n’y a pas le nerf de la guerre. Même avec les élèves, on ne peut pas déjà leur partager tout ce que l’école va leur offrir. L’idée est de mettre en place un système qui permette de détecter les personnes qui viennent d’abord par la volonté. Par la suite voir ce que l’école peut offrir derrière. D’autres difficultés sont à tous les niveaux mais aujourd’hui l’idée C’est de montrer que le Gabon qui consomme doit aussi produire. Lorsqu’il y a les difficultés, les difficultés sont faites pour les franchir et non les éviter parce qu’à tout moment, les difficultés peuvent revenir.

 Comment vont se dérouleront les formations ? Quels sont les critères pour entrer à cette école ? C’est une école ouverte uniquement aux Gabonais ou à d’autres nationalités ?

Omar Defunzu : Déjà pour répondre à la toute dernière, aujourd’hui l’école est sollicitée par plusieurs pays. Pas plus tard que ce matin (vendredi, ndlr), je recevais une demande de certaines personnes qui sont rentrées en contact avec moi par personnes interposées. La demande est énorme ! Pour rentrer à l’école, il y a deux moyens. Le moyen gratuit est de participer au stage qu’on avait déjà animé. A l’issue duquel on avait déjà fait un spectacle de restitution qui constituait aussi les auditions pour rentrer à l’école.

Après l’école, c’est vraiment un accélérateur de carrière. il permet aussi aux humoristes qui sont déjà en activité de pouvoir venir améliorer leurs textes, de travailler la mise en scène avec nous, de pouvoir venir solliciter l’école pour préparer les dossiers, préparer les textes en vue de participer à certains festivals ou encore à certains grands événements humoristiques du continent.

 Avez-vous bénéficié du soutien de l’Etat ou du gouvernement pour réaliser ce projet ?

Omar Defunzu : De toutes les façons, si déjà j’ai des personnes qui travaillent avec moi c’est l’Etat. L’Etat, c’est moi, c’est vous, c’est tout le monde. Je peux dire aussi c’est dans ce sens mon pays à travers le public, les élèves, les gens qui me suivent. C’est déjà leur manière de m’accompagner dans le projet. Maintenant comme tout le monde l’a vu, le ministre de la Culture a bien voulu honorer par sa présence la cérémonie de l’inauguration de l’école. Nous souhaitons que ce soutien aille au-delà de cette présence physique. C’est ce que nous attendons. Nous croyons et nous avons foi en la personne du ministre qui nous a dit certaines choses en aparté que nous n’allons pas déjà dévoiler.

Nous attendons que les choses se fassent au moment opportun. Nous allons communiquer. De toutes les façons, nous avons déjà de potentiels partenaires avec qui nous allons discuter. On peut dire que le projet tant qu’il est bien monté… Tant qu’il est bien présenté, bien organisé même si ce n’est pas l’état en tant que gouvernement qui nous accompagné, nous avons des personnes, des entreprises, des mécènes qui pourront nous accompagner.

 Vous lancez une école d’humour dans un pays où l’artiste peine à vivre de son art. Que deviendront ces humoristes après leurs formations ? Quelles pourraient être leurs perspectives scéniques et artistiques ?

Omar Defunzu : Déjà, je vais dire que si ces jeunes-là ont eu confiance en moi, si ces jeunes-là sont venus vers moi… Il faut dire que lors de l’appel à candidature, il y’avait plus de 60 inscrits. Nous-même on a dû dire à certaines personnes de ne pas venir parce qu’on voulait des personnes qui devaient consacrer deux années à apprendre. Je pense que s’ils ont eu confiance en ce projet, c’est parce qu’ils savent que moi-même je ne vis que de ça.

La question, elle revient toujours. Moi je pense que parfois on est très mal placé en tant qu’artiste, pour dire que nous ne vivons pas de notre art. Quand nous voyons les cachets que nous gagnons, qui représentent parfois 30 jours de travail pour certaines personnes qui sont en activité… Je pense qu’à un moment donné, il faut qu’on s’assoie, qu’on réfléchisse bien pour ne pas tuer les vocations.

Les jeunes qui nous entendent dire qu’on ne vit pas de notre art. Comment on en entend vivre de notre art lorsqu’on a des cachets de 500, un million. Donc tout est question d’organisation. Ce n’est pas l’Etat qui va venir vous construire votre maison. Ce n’est pas l’Etat qui va venir faire votre organisation. C’est d’abord à nous de penser qu’avec mes revenus, « comment je peux gérer pour préparer une retraite », « comment je peux gérer pour diversifier mes économies ».

Donc à ce niveau, moi je ne suis pas pour dire que l’artiste ne vit pas de son art. Moi je connais beaucoup d’artistes ici, ensemble nous avons gagné beaucoup d’argent à une période où les cachets étaient gros. Mais ce n’est pas une raison pour dire qu’on ne vit pas de notre art. Personnellement, je ne le dirai jamais.

 Est-ce qu’on peut dire aujourd’hui que vous gagnez bien votre vie grâce à l’humour ? Quel est le secret de la réussite du président Defunzu ?

Omar Defunzu : Euh moi j’ai commencé à toucher mes premiers cachets en 1998. Et jusqu’à ce jour, je ne fais rien d’autre que ça. Donc, je vie de mon art. C’est vrai, je ne vais pas dire que je suis à l’abri du besoin, je suis comme tout le monde. Aujourd’hui on voit même les hautes personnalités qui peinent à pouvoir joindre les deux bouts. Je m’inscris dans la catégorie des Gabonais qui pensent qu’aujourd’hui, nous devons changer de paradigme.

Nous devons changer notre façon de voir. Nous devons changer de démarche. Nous devons changer tout et de faire en sorte qu’aujourd’hui, l’image qu’on avait de l’artiste à l’époque. Nous-mêmes, nous devons portées un autre visage de l’artiste, de sorte qu’on nous respecte. En réalité, l’image qu’on a de nous c’est celle qu’on présente aux gens.

Pour revenir sur l’autre question, que vous devenir ces humoristes ? Ils vont avoir beaucoup de débouchés. Tout le monde sait les scènes sur lesquelles j’évolue en Afrique, en Europe ou encore en Amérique. Ce sont des partenariats que je suis en train de tisser. Ces jeunes-là, au bout de trois mois de travail, sont capables déjà de se produire. Ce sont là les objectifs. Il faut qu’on arrive à montrer que l’humour peut nourrir son homme pour susciter davantage de vocations. Nous voulons créer des modèles de réussite sociale, comme le football l’a fait.

 Monsieur Defunzu, un mot en direction de vos fans et des passionnés d’humour gabonais et africain ?

Omar Defunzu : Ce que je vais dire aux passionnés de l’humour, à mes fans : c’est un grand merci pour l’attachement, pour l’accompagnement pour le soutien indéfectible qu’ils manifestent à ma personne depuis que j’ai commencé ma carrière. Je pense qu’ils ont toujours été ma première source de motivation. A chaque fois que j’organise un événement, ils sont toujours là. A chaque fois que je créai des projets, ils accompagnent, ils soutiennent. A ceux qui me suivent de partout, merci. Merci de s’être ajouté à ma communauté qui me suit.

Je pense qu’avant d’avoir du soutien à l’étranger, j’ai d’abord eu le soutien de ma communauté. C’est à dire les Gabonais. Aujourd’hui ma famille est en train de s’agrandir. Aujourd’hui les fans qui me suivent ne sont plus que du Gabon, ne sont plus que de l’Afrique… dans le monde entier ! Il faut continuer à soutenir l’humour parce que l’humour va tellement être le porte flambeau de l’art et de la culture au Gabon sinon même en Afrique.

Aujourd’hui lorsqu’il voit la résilience des humoristes face à la Covid-19 sur les réseaux sociaux, le déploiement de tous les humoristes… On montre qu’aujourd’hui on a essayé de faire oublier un tant soit peu cette difficulté-là. Imaginons 3 mois de confinement, 5 mois de confinement sans humour, sans musique sans rien du tout… Les gens deviendraient fous.

C’est aussi un appel que je lance aux autorités que ce soit du Gabon et de l’Afrique toute entière, de jeter un regard bienveillant sur la culture de chacun de leur pays. On monte, on descend, l’humour en particulier, la culture en générale, seront le pétrole, le manganèse, le bois, l’uranium toutes les matières premières de demain de l’Afrique. Il est temps, qu’on rigole de nos problèmes. Pour en arriver là, il faut la contribution des humoristes. Ceux qui continuent de traiter les humoristes de manière péjorative « rigolo », on leur dit merci pour le compliment. Nous on fait le travail qui est le nôtre.

 Omar Defunzu, la rédaction d’info241 vous remercie pour cette interview exclusive

Omar Defunzu : Merci beaucoup pour m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer à travers votre canal et merci pour tout ce que vous faites pour la culture, l’information le traitement de l’information. Donner des informations comme celle-là sur vos canaux. Peut-être qu’on n’aurait pas pu atteindre ces cibles à travers notre communication. Merci au nom de toute mon équipe. Merci de m’avoir permis de m’exprimer sur votre média.

@info241.com
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