Crise post-électorale

L’Union européenne invite Emmanuel Macron à se prononcer contre la dictature d’Ali Bongo au Gabon

L’Union européenne invite Emmanuel Macron à se prononcer contre la dictature d’Ali Bongo au Gabon
L’Union européenne invite Emmanuel Macron à se prononcer contre la dictature d’Ali Bongo au Gabon © 2017 D.R./Info241

La crise post-électorale gabonaise est loin d’être terminée même si Ali Bongo pense surfer sur l’Assemblée générale des Nations Unies et le machiavélique travail de ses lobbyistes cher payés pour faire avaler sa forfaiture. Le Parlement européen qui après avoir voté le 2 février 2017 une résolution d’urgence sur « la crise de l’état de droit en République démocratique du Congo et au Gabon » vient de voter ce 14 septembre une seconde résolution d’urgence portant sur « la répression de l’opposition au Gabon (2017/2830(RSP) ». Cette dernière invite clairement la France et le Président de la République française, Emmanuel Macron à clarifier leur position face à la fraude électorale et la violence avérées qui ont découlé de l’élection présidentielle du 27 août 2016 avec un appel aux sanctions ciblées contre les affidés du régime oppressif de Libreville.

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La résolution d’urgence portant sur la répression de l’opposition au Gabon (2017/2830(RSP) met en lumière un appel au Conseil de l’Europe à prendre des sanctions ciblées contre les autorités gabonaises coupables de la fraude électorale et des actes de violence qui ont suivi. La proposition de résolution du Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL) qu’Info241 a consulté sur place au siège du Parlement européen de Strasbourg, suite à la crise post-électorale du Gabon, « considère que le soutien de la France au régime d’Ali Bongo (notamment via sa coopération militaire) et les liens qu’ont quasiment l’ensemble de la classe politique gabonaise avec les réseaux d’affaires Français laissent à craindre fortement la perpétuation de cette politique de la « Françafrique » au détriment du peuple gabonais ».

Le Parlement européen à travers la résolution d’urgence portant sur la répression de l’opposition au Gabon (2017/2830(RSP) votée le 14 septembre 2017 a demandé instamment à la France, en particulier, en raison de ses liens historiques forts avec le Gabon, de peser de tout son poids politique et économique sur le gouvernement gabonais et de jouer un rôle constructif au sein des institutions européennes à cet égard ; demande à la délégation de l’Union européenne au Gabon de continuer à suivre attentivement l’évolution de la situation dans ce pays et de s’appuyer sur tous les outils et instruments appropriés, ainsi que sur le dialogue politique renforcé, pour assurer le respect des éléments essentiels de l’accord de Cotonou et pour soutenir les mouvements pro-démocratiques  ».

La résolution «  invite la Vice Présidente/Haut Représente, Federica Mogherini, la Commission et les États membres à réexaminer leurs politiques à l’égard du Gabon et à envisager des sanctions ciblées à l’encontre des responsables de la fraude électorale et des actes de violence qui en ont découlé ; réitère son appel au gouvernement gabonais pour qu’il mette en place un système judiciaire et un régime de sanctions qui garantissent que les arrestations et les condamnations soient proportionnelles à la gravité des délits ; avant d’exhorter le gouvernement gabonais à apporter une réponse concrète aux inquiétudes de la communauté internationale, en organisant rapidement un forum consultatif pour un dialogue réellement ouvert à tous, transparent et impartial ; demande également à l’opposition d’évaluer la crédibilité de ce processus  ».

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Les eurodéputés mettent au pilori le rôle de la République française, ancienne puissance coloniale dans l’accaparement du rêve de l’idéal démocratique et républicain exprimé le 27 août 2016 par l’ensemble du peuple gabonais.
Constats faits par le Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL). Les députés européens « considèrent que, selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’indice de développement humain (IDH) du Gabon se situait à 0,684 en 2014, ce qui en fait le 110e sur 188 pays, et que plus de la moitié des Gabonais vivent sous le seuil de pauvreté malgré le niveau du PIB par habitant relativement élevé  ».

Tout en indiquant que « selon l’indice de perception de la corruption de 2015 édité par Transparency International, le Gabon est classé 99e sur 168 pays ; considérant que le Gabon a signé en 2010 la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance mais ne l’a pas encore ratifiée ; que le 27 août 2016, les élections ont eu lieu au Gabon, et qu’une mission d’observation de l’Union européenne y a été déployée du 12 juillet au 30 septembre 2016 avec l’accord des autorités gabonaises  ».

Processus électoral entaché par une répression policière

Le groupe confédéral européen « considère que, d’après le ministère de l’intérieur, le Président sortant, Ali Bongo, a obtenu 49,80 % des voix, soit seulement 5 000 voix d’avance ; considérant que l’opposition conteste le score de l’élection et que des heurts ont eu lieu dans certains quartiers de Libreville, que l’Assemblée nationale a été incendiée, que des manifestations ont eu lieu et qu’au moins 6 blessés par balle ont été à déplorer le 31 août 2016 ».

Les eurodéputés« considèrent que le 1er septembre, les locaux du quartier général (QG) de Jean Ping ont été pris d’assaut par les forces de l’ordre, faisant 2 morts et plusieurs blessés, les témoins parlant d’un « carnage » ; que des violences ont encore eu lieu dans la capitale et plusieurs localités du pays ; que le Gabon s’est retrouvé privé d’accès à internet et aux réseaux sociaux ; que plus de 800 personnes ont été arrêtées dans la capitale durant les violences postélectorales ; que l’opposition parle d’au moins 50 morts à travers le pays  ».

Les députés « considèrent que certains journaux africains dénoncent la participation de militaires français ayant des responsabilités dans la Garde républicaine dans le bombardement du QG de Jean Ping ; considèrent que l’opposition, soucieuse de jouer le jeu des institutions et tout en doutant de leur indépendance, a déposé un recours devant la Cour constitutionnelle gabonaise début septembre, qui a été rejeté le 23 septembre, puis qu’elle a déposé un deuxième recours début novembre pour contester à nouveau les résultats de l’élection  ».

Le 7 septembre 2016, le gouvernement français a décidé d’envoyer le deuxième régiment de parachutistes à Libreville, officiellement pour protéger les ressortissants français ; considérant qu’un nouvel accord a été signé en 2010 stipulant que «  les forces françaises stationnées ont la faculté de circuler sur le territoire de la République gabonaise, y compris dans sa mer territoriale et son espace aérien. La liberté de déplacement dans les eaux territoriales gabonaises comprend notamment l’arrêt et le mouillage en toutes circonstances  » ; considèrent qu’aucune taxe ni loyer n’est par ailleurs demandé aux Forces françaises au Gabon, à l’inverse de ce qu’il est de coutume dans la plupart des pays ; considèrent que l’accord consacre aussi une totale impunité des militaires français en poste au Gabon, même si ces derniers entraînent la mort pendant leur activité.

L’ombre de la France a toujours plané sur son ancienne colonie ; les députés européens considèrent que les accords de coopération économique et militaire signés en juillet 1960, un mois avant l’indépendance, prévoient en effet que « La République française continuera à apporter à la République gabonaise l’aide matérielle (…) qui lui est nécessaire pour réaliser les objectifs du progrès économique et social qu’elle s’est fixés  » ; considérant que près de 14 000 ressortissants français vivent aujourd’hui au Gabon, où la France, son premier partenaire économique, compte près de 120 entreprises (environ 200 PMEPMI).

Ils considèrent que le soutien de la France au régime d’Ali Bongo (notamment via sa coopération militaire) et les liens qu’ont quasiment l’ensemble de la classe politique gabonaise laissent à craindre fortement la perpétuation de cette politique de la « Françafrique » au détriment du peuple gabonais ; déplore le fait de traiter dans une même résolution deux situations différentes que sont celles de la Républiques démocratique du Congo et du Gabon ;

Recommandations suite à la crise de l’état de droit au Gabon

Les députés européens se déclarent vivement préoccupés par la crise postélectorale au Gabon et les conséquences qu’elle pourrait avoir pour le pays et la région et les populations concernées, condamne le fait qu’après avoir demandé la publication des résultats, la France ait de nouveau reconnu la victoire d’Ali Bongo et ce malgré les constatations des observateurs européens et internationaux. Condamne toutes les violences perpétrées après les élections et notamment les violations des droits de l’homme, les arrestations arbitraires et les détentions illégales, ainsi que les violations de la liberté de la presse et de la liberté d’expression.

Réclament l’arrêt immédiat de tout acte de violence, de violation des droits de l’homme et d’intimidation politique à l’encontre de la société civile et des opposants, le respect du droit international et des droits de l’homme ; demande la mise en place d’une enquête internationale sous l’égide de l’ONU sur les élections et les exactions qui ont suivi afin de déterminer comment mettre en place un dialogue politique permettant de sortir de la crise en garantissant le respect des droits démocratiques du peuple gabonais. Demandent au Gabon de ratifier, déposer et respecter la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance ; condamne de nouveau le jeu et l’emprise de la France, ancienne puissance coloniale, au Gabon ; s’oppose à toute perpétuation de la politique de la Françafrique dans le pays.

Exigent le retrait immédiat des troupes françaises du pays. Estiment que les problèmes du Gabon ne pourront être résolus dans le pays qu’en veillant à garantir les mêmes droits à tous les citoyens et en s’attaquant aux problèmes liés au contrôle des terres agricoles fertiles, au chômage et à la pauvreté, à la lutte contre la corruption, à la pauvreté, aux inégalités et aux discriminations ainsi que par la promotion des réformes sociales, politiques et économiques afin de créer un État libre, démocratique et stable ; se déclare particulièrement préoccupé par la situation dans les écoles.

Jugent que l’incapacité de la population à avoir accès aux ressources naturelles du pays, l’accroissement du chômage, la dégradation de la situation sociale et la paupérisation sont des obstacles à la stabilité et doivent être des priorités absolues dans la prochaine période ; condamnent les ingérences économiques, sociales et politiques mises en œuvre dans les pays tiers via les plans d’ajustement structurel de la Banque mondiale et du FMI, ainsi que les accords de libre-échange dits «  accords de partenariat économique  » conclus par l’Union européenne.

Les eurodéputés soulignent que ces politiques ont entrainé un accaparement des terres, des ressources notamment pétrolières, et des situations de crises économiques, sociales, politiques et humanitaires, qui poussent les populations à l’exil ; demandent que l’Union européenne et ses États membres appliquent réellement le principe de la cohérence des politiques au service du développement dans toutes les mesures qu’ils prennent à l’égard du Gabon, afin qu’elles s’articulent harmonieusement et ne portent pas atteinte à la réalisation des objectifs de réduction de la pauvreté et des objectifs de développement durable ; condamnent toute conditionnalité de l’aide au développement à des fins d’externalisation des frontières et de gestion des politiques migratoires de l’Union.

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