Crise post-électorale

Réélection controversée d’Ali Bongo au Gabon : les élucubrations défensives de Mborantsuo

Réélection controversée d’Ali Bongo au Gabon : les élucubrations défensives de Mborantsuo
Réélection controversée d’Ali Bongo au Gabon : les élucubrations défensives de Mborantsuo © 2017 D.R./Info241

La belle-mère d’Ali Bongo, Marie-Madeline Mborantsuo s’est fendue jeudi matin sur RFI, d’une réponse saccadée aux graves accusations qui pèsent sur elle pour détournements de fonds publics, l’usage de faux diplômes, d’escroquerie. La sortie publique de la haute magistrate aux ordres du régime Bongo-PDG est tout ce qu’il y a de plus classique dans ce genre de cas. L’on utilise les médias pour tenter de discréditer des plaignants, mais chacun sait que la vérité se fera au sein d’un tribunal. Cela n’empêche cependant de faire quelques remarques et analyses.

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Interrogée jeudi dernier par nos confrères de RFI, Marie-Madeleine Mborantsuo (3M), visiblement remontée, s’est exprimée avec les nerfs à fleur de peau sur toutes ces poursuites judiciaires dans lesquelles son nom est empêtré. Les auditeurs ont été surpris par la forme décousue de l’expression et du fond tronqué des arguments utilisés par la magistrate de renom qui s’invente d’avoir une longévité de carrière à l’image de son amant de président dictateur Omar Bongo, la racine des maux du Gabon. Puis, d’avoir permis l’accession au pouvoir présidentiel et la réélection controversée d’Ali Bongo en 2009 et en 2016. Ses déboires judiciaires se multiplient le parquet financier de la justice française est à ses trousses depuis 2014, nous a révélait mercredi 22 mars dernier, le Canard enchaîné pour recel de détournements, soustraction ou destruction de fonds publics et blanchiment en bande organisée. Toutefois, la belle mère du président contesté au Gabon a tenté de se dédouaner, mais les faits sont têtus..

S’agissant de sa maîtrise de droit qu’elle aurait obtenu en 1979 à l’Université Omar Bongo (UOB), l’approximation de sa défense est inquiétante. Les mots ont un sens, particulièrement pour une présidente de Cour constitutionnelle cumulant 26 années non stop d’exercice de réformes et manipulations des contentieux électoraux. Quand on est un peu rigoureux, on comprend que cette dame ne peut se targuer d’un diplôme qui n’existait absolument pas dans la nomenclature même de l’enseignement supérieur de l’époque. L’on apprend finalement qu’elle aurait obtenu une licence ancien régime en 4 ans. Ce qui est totalement faux et c’est impossible de démontrer le contraire. Marie-Madeleine Mborantsuo a bien obtenu une licence qui se faisait en 4 ans, comme nombreux étudiants gabonais de cette époque. Et ce n’était aucunement pas une Maîtrise qui s’obtenait en 5 ans.

Et si tel était le cas, pourquoi ne pas l’indiquer puisque c’était ce qui existait ? Sur la biographie de son collègue M. Christian Baptiste Quentin, consultable en ligne sur le site de la Cour constitutionnelle, il est bien indiqué que ce monsieur est titulaire d’une licence ancien régime (4 ans). Il est cohérent. En sus l’enseignement en 4 années ne signifie pas que sont dispensés en quatrième année les cours de Maîtrise, mais tout simplement que les enseignements de Licence sont étalés sur 4 ans. Pour comparaison, une personne obtenant un BTS en 3 ans parce que n’ayant pas eu le baccalauréat a bénéficié d’une année de préparation, elle ne peut prétendre avoir eu une Licence, alors même qu’elle a eu 3 ans de cours post bac.

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En réalité, cette référence à la maîtrise ne paraît pas être un abus de langage, mais plutôt le signe de la méconnaissance des cursus universitaires de l’époque par l’intéressée. En outre mettre en ligne, sur le site officiel de la Cour constitutionnelle, dans une biographie consultable par tout un chacun pareille assertion ne reposant sur rien, semble plus relever de l’usage de faux diplôme, de la supercherie, voire de l’escroquerie. Que cette femme produise sa maîtrise renseignée licence ancien régime, à l’image de son beau-fils Ali Bongo qui avait vainement tenté de produire dans la presse des actes de naissance qui se sont avérés tous plus faux les uns que les autres !

Sur la question du mandat dépassé, là aussi les approximations sont effarantes venant de la présidente de la Cour. Elle parle d’une modification constitutionnelle qui serait intervenue un jour au Gabon. Quand exactement serait intervenue cette modification et dans quels termes ? Était-il réellement spécifié que la modification actée (si tant est qu’elle ait existé) ne concernait pas les mandats en cours. C’est une chose de le dire, c’est encore une autre que cela soit inscrit effectivement dans le texte de la loi organique et de la constitution modifiée.

Marie-Madeleine indique en outre que ce serait les dispositions initiales prévoyant les mandats des conseillers de la Cour qui auraient changé. Soit. Les mandats de la Constitution du 26 Mars 1991 étaient de 5 années renouvelables 1 fois. Soit 10 ans. En 2001, Marie-Madeleine et ses compères de a Cour entrés en même temps qu’elle auraient du mette un fin à leur fonction. Si modification il y a eu à partir de quand court-elle ? Tout cela est beaucoup trop vague pour être crédible. Le plus simple serait pour cette dame de publier la loi organique concernée par cette modification que chacun sache de quoi il en retourne.

Enfin, sur cette question de modification constitutionnelle, il y a un point primordial qu’il faut relever. Il existe en droit, dans notre droit e principe de no rétroactivité de la loi. Cela signifie que la loi ne régit que les situations à venir sauf cas exceptionnels que sont les questions fiscales ou e core certaines dispositions d’ordre public. Ce principe tiré notamment de l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789 qui fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité gabonais, s’étend bien au-delà des lois pénales car il est un fondement de la sécurité juridique et des institutions dans un Etat.

Ainsi a modification des mandats des conseillers de la Cour Constitutionnelle n’ayant pas un caractère impératif, ni d’ordre public, il n’y avait aucune raison que ce texte soit adopté dans les termes énoncés par la Présidente de la Cour. Au contraire, pareille disposition aurait dû être retoquée d’office par la Cour. En évoquant cette prétendue modification, Marie-Madeleine Mborantsuo prouve aux gabonais que son intérêt personnel de tout temps aura prévalu sur l’intérêt général puisqu’elle n’aurait pas du permettre que cela ne soit validé !

Pour finir, Marie-Madeleine Mborantsuo évoque le contentieux électoral. Bien que ce douloureux épisode n’ait strictement rien à voir avec la plainte pour détournements de fonds publics, il apparaît nécessaire d’en dire quelques mots pour répondre aux affabulations de la présidente de la Cour. Pour justifier l’élection d’Ali Bongo Ondimba le 23 septembre 2016, Marie-Madeleine évoque l’annulation des scrutins de 21 bureaux de vote dans l’Estuaire. Les articles 82 à 84 de la loi organique de la Cour constitutionnelle impose qu’en cas de scrutins annulés pour cause de fraude, violence ou irrégularités, la Cour qui annule les scrutins en informe le Ministre de l’Intérieur qui prend toutes les dispositions pour les réorganiser.

Il s’agit là d’une obligation qui n’a absolument pas été observée par Marie-Madeleine Mborantsuo. En sus, en prenant en compte, les du contentieux, la seule demande d’annulation d’Ali Bongo Ondimba au détriment de la demande de Jean Ping, elle place les candidats dans une situation intolérable d’inégalité devant la loi. Or, l’égalité de tous devant la loi est un principe fondamental de la Démocratie consacrés aux article 6 de déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 7 de la déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) ainsi qu’à l’article 3.1 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme.

Les violations de Loi Fondamentale par cette institution sont journalières, répétitives et intolérables. Les exemples sont nombreux : Les modifications des articles 8/28/36 78 ,à 81 de la Constitution entérinées au cours du Dialogue qui inscrivent définitivement le Gabon dans un Etat dictatorial, puisque place le Président de la République en dehors de tout contrôle institutionnel !. La prorogation par la CC du mandat des membres du Conseil National de la Communication (CNC) sur demande du premier ministre gabonais alors que ce dernier n’a absolument aucune prérogative en la matière ! En définitive, il est à craindre que l’intervention de Mme Mborantsuo ne la plonge plus dans la tourmente qu’elle ne l’aide. L’avenir le confirmera certainement. Affaire à suivre.

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