L’invité de la rédaction d’Info241 est cette semaine Johnny Patcheko Antonio, célèbre activiste Ivoirien, membre de la Djossi Gang dont l’objectif est de dénoncer tous les maux qui minent l’Afrique et les injustices dont les Africains sont victimes. L’activiste n’est pas particulièrement tendre avec les autorités Ivoiriennes actuelles qu’il accuse notamment de partialité dans la gestion de l’après crise.
Victime d’une agression à l’arme blanche à La Courneuve (près de Paris en France) il y a quelques semaines, il revient requinqué sur l’agression dont il a été victime mais aussi sur son engagement qui dépasse les limites de sa Côte d’ivoire natale.
Vous avez été victime d’une agression, pouvez-vous nous en dire plus ?
Johnny Patcheko : D’abord, je tiens à saluer tous les Africains qui m’ont envoyé des messages. Je tiens aussi à leur dire que Johnny Patcheko Antonio va bien par la grâce de Dieu. Ce que je peux dire à propos de l’agression c’est qu’en marge des manifestations de la Djossi Gang à Paris, nous avons décidés d’aller écouter du zouglou, une musique traditionnelle ivoirienne à la « place Vendôme » de la Courneuve. Aux environs de 5 heures du matin, un groupe d’individus, une quarantaine environ armés de couteaux, de barres de fer et de gourdins se présentant comme des pro-Ouattara m’ont agressé et j’ai reçu plusieurs coups de couteaux.
La Djossi Gang croit au pouvoir des mots. Nous disons toujours aux Africains que nous ne sommes pas des partisans de la violence. Notre seule arme, c’est la parole".
Au cours de l’agression certains de ces individus m’ont dit : « les vidéos que tu fais là, aujourd’hui c’est ta fin ». Donc par la force des choses et surtout par la grâce de Dieu, je ne suis pas mort, je suis vivant ! Je ne peux pas donner plus de détails puisque l’affaire est entre les mains de la justice. Comme vous le savez la Djossi Gang croit au pouvoir des mots. Nous disons toujours aux Africains que nous ne sommes pas des partisans de la violence. Notre seule arme, c’est la parole.
Ceux qui nous ont agressés n’ont malheureusement pas compris que nous ne sommes pas leurs ennemis. Mes amis et moi avons saisi les autorités judiciaires et nous pensons poursuivre ce dossier jusqu’à ce que les responsabilités soient situées. Parce que lorsque des individus qui se font appeler talibans, un nom qui n’est pas très catholique, vous agressent tout en se réclamant de la formation politique de monsieur Dramane Ouattara (le président ivoirien - Ndlr), il y va de s’interroger sur la personnalité même de monsieur Ouattara. Parce que le nom taliban rappelle le terrorisme, le djihadisme etc.
Ces gens qui m’ont agressé sont des membres du RDR, il faudrait que ce soit clair !"
J’ai donc été agressé par ces gens-là. Ce que j’aimerais dire à tous les Africains, à tous ceux qui m’ont soutenu de loin ou de près, c’est merci. Merci au peuple Gabonais, merci à tous les Africains. Je vous aime et sachez que la Djossi Gang vous porte dans son cœur et que ce combat va continuer.
Ceux qui vous ont agressés se réclament du RDR, le parti au pouvoir en Côte d’Ivoire. Que reprochez-vous en tant qu’ivoirien et en tant qu’Africain à monsieur Alassane Ouattara, l’actuel Président de la Cote d’Ivoire ?
Johnny Patcheko : Ecoutez, ces gens qui m’ont agressé sont des membres du RDR, il faudrait que ce soit clair ! Je connais mes agresseurs, il y eu des témoins dont certains sont artistes très connus en Côte d’Ivoire. Ces gens-là ont proféré des menaces de morts à cause de mes convictions. Aujourd’hui faire des vidéos en Côte d’Ivoire contre le régime d’Abidjan est devenu un crime contre l’humanité.
J’ai été agressé pour mes idées, pour mes opinions politiques. Je pense que tout citoyen d’ailleurs, a le droit de s’exprimer. Moi je suis Africain, pro-Ivoirien, pro-Africain et j’ai le droit de dire ce que je pense de mon pays. Je suis quand même dans un état de droit et la parole est ce que j’ai de plus cher.
Je pense en tant qu’Ivoirien, il est de mon devoir de parler de ce qui ne va pas dans mon pays parce que je n’ai qu’un seul pays".
Ici en Europe, il y a la liberté d’expression. Mais si j’ai le droit de parler de ce qui se passe en Europe, pourquoi ne l’aurai-je pas pour parler de ce qui se passe dans mon pays ? Je pense en tant qu’Ivoirien, il est de mon devoir de parler de ce qui ne va pas dans mon pays parce que je n’ai qu’un seul pays. Je ne suis pas appelé à passer toute mon existence en Europe. Je suis appelé à retourner dans mon pays et si aujourd’hui je n’apporte pas ma pierre à la construction de l’édifice de mon pays, demain où voulez-vous que j’aille ? C’est pourquoi je dénonce ce qui ne va pas dans mon pays et il y a beaucoup de choses qui ne vont pas dans mon pays.
Pour revenir à votre question, il y a beaucoup de choses que je reproche à monsieur Ouattara. La première chose est que les Ivoiriens aujourd’hui sont divisés à cause de lui. Je reproche à Ouattara d’avoir envoyé des gens comme les « talibans » venir m’agresser alors que j’étais en train de prendre simplement un verre avec des amis. Je reproche à Ouattara d’embrigader les Ivoiriens, d’esclavager les Ivoiriens dans leur propre pays.
Je reproche à Ouattara de dilapider les fonds de l’Etat à ses propres fins. Les Ivoiriens sont dehors et les Ivoiriens sont confrontés à la malnutrition et à la prostitution tandis que lui et sa femme ne font qu’arnaquer le peuple, ne font que voler l’argent des Ivoiriens.
Je reproche à Ouattara, sachant qu’une guerre se fait à deux, qu’il n’y a que les partisans du président « Koudou » Laurent Gbagbo qui sont poursuivis. Je ne comprends pas. Il faut qu’on m’explique cela. J’ai été en Côte d’Ivoire et tous les Ivoiriens autant que moi, savent qui a fait quoi en Côte d’Ivoire. Les rebelles qui ont génocidé les Ivoiriens depuis 2002 ont aujourd’hui des postes de responsabilités dans le régime de Ouattara. Comment peut-on réclamer être impartial et travailler avec des gens qui ont du sang sur les mains ? Je m’interroge.
Il faut que Ouattara nous dise qui est ceux qui ont agressé la cote d’ivoire. Qui a acheté les armes de la rébellion ? S’il ne se reproche de rien pourquoi travaille-t-il avec ces gens-là ? Il faut qu’il nous explique cela".
Le chef d’état-major était le chef d’état-major de la rébellion. La ministre de la communication était dans la rébellion. Guillaume Soro, la deuxième personnalité de Côte d’Ivoire était le porte-parole de la rébellion. Les ancien Com’Zones Koné Zacharia, Issiaka « Wattao » Ouattara, Sherif Ousmane ont été promus au lieu de répondre de leurs actes devant les tribunaux nationaux et internationaux. Nombreux sont devenus officiers supérieurs sans avoir respecté les usages militaires.
J’ai fait l’armée, pour devenir officier il faut avoir été à l’EFA. Aujourd’hui en Côte d’Ivoire sous Ouattara, nombreux sont ceux devenus officiers parce qu’ils ont pris les armes pour tuer les Ivoiriens. Donc quand vous voulez que Johnny Patcheko se taise quand il voit toutes ces choses dans son pays la Côte d’Ivoire. Je ne peux pas me taire.
Ce que je reproche à Alassane Ouattara, c’est que son ministre de l’Intérieur Ahmed Bakayoko qui pratique une politique tribale. Il n’y a pas longtemps que son ministre de l’Intérieur prenne une photo avec un gangster qui a passé son temps à me menacer de mort sur les réseaux sociaux dans des vidéos notamment. Ce monsieur a invité chez lui Rihanna et Chris Brown pour un concert privé pour un montant de 2 milliards de francs CFA, pendant que les Ivoiriens souffrent de faim.
Il faut que Ouattara nous dise qui est ceux qui ont agressé la cote d’ivoire. Qui a acheté les armes de la rébellion ? S’il ne se reproche de rien pourquoi travaille-t-il avec ces gens-là ? Il faut qu’il nous explique cela. Ce sont toutes ces choses que je reproche à Ouattara. Il est entouré de rebelles. Quand on est chef de l’Etat, cela ne se fait pas. Il est bientôt à la fin de son mandat est ce qu’on peut nous citer un des hommes qui a commis des exactions à Duekué, qui a égorgé les le gendarmes à Bouaké, qui a tué Marcelin Yacé, Emille Boga Doudou et Désiré Tagro. Est-ce qu’on peut nous donner un seul nom qui a comparu devant les tribunaux ? Cela n’existe pas.
Les Ivoiriens peuvent se taire cela n’engage qu’eux, mais moi Johnny Patcheko Antonio, je ne me tairai jamais. Si Alassane Ouattara entend cette interview, qu’il sache que les gens qu’il va payer un jour partiront, ces milliards qu’il possède ne prolongeront pas sa vie, qu’il cherche plutôt à sauver son âme qu’à faire périr son prochain.
J’aimerais dire à tous les Africains que je me bats pour eux, je me bats pour l’unité Africaine, je suis de ceux qui veulent la coordination des Etats Africains, parce que je pense que si les Africains sont unis, personne ne viendra nous embastiller. Nous parlons de tous les pays Africains, le Togo, le Gabon, le Congo… Nous parlons du Franc CFA. Les Africains doivent apprendre à s’aimer. Je suis un jeune Ivoirien qui a le droit de dire ce qu’il pense.
Propos recueillis par Jocksy Ondo Louemba
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